(Kyiv) Samedi, Viktoria Lukovenko préparait une salade pour la fête du Réveillon quand des explosions au-dessus de sa tête l’ont fait se précipiter à l’abri dans une station de métro de Kyiv.  

Deux heures plus tard, l’alerte arienne levée, elle est de retour dans sa cuisine pour éplucher des œufs durs et essayer des tenues, bien décidée à ne pas laisser les missiles russes gâcher ses projets du Nouvel An.  

PHOTO SERGEI SUPINSKY, AGENCE FRANCE-PRESSE

Viktoria Lukovenko prépare sa fête du Nouvel An à Kyiv, le 31 décembre 2022, avant que des explosions au-dessus de sa tête ne l’obligent à se mettre à l’abri dans une station de métro. Deux heures plus tard, alors que l’alerte au raid aérien était levée, elle était de retour dans sa cuisine pour éplucher des œufs durs et essayer des tenues, déterminée à ne pas laisser les dernières frappes russes faire dérailler ses projets de vacances.

« Nous allons célébrer la nouvelle année avec nos amis », déclare à l’AFP cette étudiante de 18 ans. « Je pense que c’est vraiment cool que même dans ces conditions, nous puissions nous le permettre ».   

La salve de samedi a tué au moins un homme à Kyiv et a blessé une vingtaine de personnes, ont indiqué des responsables. Des bombardements ont également été signalés dans la région de Mykolaiv (Sud) et celle de Khmelnytskyi (Ouest).

Pourtant, dans la capitale, les habitants éprouvés par dix mois de guerre ont assuré n’avoir pas l’intention de modifier leurs projets de fête, dont beaucoup impliquent des réunions toute la nuit en raison du couvre-feu qui dure de 23 heures à 5 heures du matin.

Le cinéaste Yaroslav Mutenko, 23 ans, était dans sa douche quand l’explosion la plus forte qu’il n’ait jamais entendue a éventré un coin de l’hôtel quatre étoiles Alfavito, près de son immeuble.

En regardant les secouristes boucler la rue jonchée de décombres devant l’hôtel, il assure à l’AFP qu’il se rendra lui aussi chez un ami.  

« Nos ennemis, les Russes, peuvent éprouver notre calme mais ils ne peuvent pas détruire notre esprit », dit-il. « Pourquoi faire la fête avec des amis ? Parce que cette année, il est important d’être entouré ».  

« Important d’être ici »

« Le criminel de guerre Poutine “célèbre” la nouvelle année en tuant des gens », a posté sur Twitter le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba.

Pour Kyrylo Tymoshenko, chef adjoint de la présidence, l’idée de Moscou d’une célébration du Nouvel An semble impliquer « des images de bâtiments résidentiels détruits en Ukraine ».  

En attendant la levée des alertes, les habitants de Kyiv se sont entassés dans les stations de métro. Certaines femmes ont déjà revêtu les jupes traditionnelles brodées de couleurs vives qu’elles porteront plus tard dans la soirée.

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Des personnes s’abritent à l’intérieur d’une station de métro pendant les frappes de missiles.

Khrystyna, une analyste financière de trente ans qui n’a accepté de ne donner que son prénom, déclare à l’AFP qu’elle vit actuellement en Norvège mais ne regrette pas d’être rentrée au pays pour les vacances.

« C’est toujours important d’être ici, et je pense que cela aide aussi à vivre la situation telle qu’elle est », dit-elle.

L’année dernière, ses amis avaient organisé une soirée de réveillon sur le thème des Vikings, mais cette année, ils ont prévu un rassemblement plus discret avec moins de convives.  

Rêver de « victoire »

Les frappes de samedi ont suscité des inquiétudes sur la possibilité de nouvelles coupures de courant, qui ont plongé des millions de personnes dans le noir ces dernières semaines.  

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Des maisons résidentielles ont été partiellement détruites par une frappe russe dans la capitale ukrainienne.

Achetant des fruits et des sushis sur un marché du centre de Kyiv, Evgueni Starovoytov, 45 ans, déclare avoir déjà prévu une soirée tranquille à la maison, avec sa famille habituée aux coupures.  

« Cela a même de bons côtés. Sans lumière, sans connexion, nous pouvons jouer et parler », dit-il, alors qu’en temps normal il est difficile d’arracher son fils de sept ans aux écrans.  

Tout le monde ne partage toutefois pas cette bonne humeur.  

Derrière le stand où il vend du caviar, Oleksiy Tykhonov, 40 ans, déplore le manque de clients.

« L’ambiance n’est pas à la fête, et les gens n’ont plus d’argent », dit-il.  

Pour l’an qui vient, il n’a qu’un souhait : la victoire.

« Le Nouvel An, l’année passée, peu importe », dit-il. « L’essentiel est que nous gagnions et le plus tôt possible ».