Le 20 avril 1999, deux adolescents armés faisaient 13 victimes à l’école secondaire Columbine, au Colorado, déclenchant une onde de choc qui résonne encore 25 ans plus tard. Les gains récents du mouvement pour le contrôle des armes redonnent espoir aux survivants de la tragédie.

Lorsqu’on demande à Tom Mauser ce qu’il pense du passage du temps – un quart de siècle s’est écoulé depuis la fusillade de Columbine –, le père de famille prend un moment pour réfléchir.

« C’est difficile de trouver les mots, dit-il. Ça ne s’en va jamais. Mais ça devient un peu plus facile avec le temps. Un peu plus facile. »

Le 20 avril 1999, son fils de 15 ans, Daniel, un élève brillant qui excellait en maths et qui revenait d’un voyage d’échange en France, est parti à l’école secondaire Columbine et n’est plus jamais rentré à la maison.

Malgré le choc d’avoir perdu son fils, emporté avec 12 autres victimes de la fusillade menée par deux assassins ce jour-là, Tom Mauser trouve du réconfort dans le fait de continuer à parler de Daniel et à se battre pour des lois plus strictes en matière de contrôle des armes à feu.

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Tom Mauser lors d’une immense manifestation pour le contrôle des armes à feu à Denver, en mai 1999, quelques jours après la tuerie de Columbine

« Je reçois des messages de jeunes qui me disent qu’ils sont touchés par l’histoire de Daniel. Des gens qui n’étaient même pas nés au moment de la fusillade. C’est ça qui me donne de l’espoir. »

Aux États-Unis, les tueries de masse n’ont pas suivi une trajectoire encourageante ces dernières décennies. Entre 1995 et 1999, on en a déploré 15. Lors de la période de 2015 à 2019, 33 de ces tueries ont eu lieu.

Tom Mauser n’est pas surpris. Les lois sur le contrôle des armes à feu n’ont pratiquement pas évolué durant cette période aux États-Unis.

Avec le clivage politique, le dossier n’a pas bougé. Tout le monde reste campé sur ses positions, alors ç’a été difficile de faire des gains. Et sans gains, on ne s’attaque pas à l’accessibilité des armes, qui est à la source du problème.

Tom Mauser

Résultat : la situation dans les écoles est toujours tendue. Ce mois-ci, une enquête de l’organisation Pew Research révélait qu’un enseignant sur quatre aux États-Unis avait vécu un confinement en lien avec les armes à feu à l’école au cours de la dernière année scolaire.

De plus, 59 % des enseignants se déclarent « inquiets » de la possibilité d’une fusillade dans leur école, tandis que 31 % disent ne pas être inquiets.

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Rassemblement pour les victimes de la tuerie de Columbine, à Littleton au Colorado, en avril 1999

Tom Mauser voit les choses de manière plus positive. C’est qu’au cours des dernières années, des avancées sont survenues.

« Les temps ont changé »

Il y a deux ans, la première loi fédérale majeure en matière de contrôle des armes à feu a été adoptée au Congrès. La loi impose des contrôles plus stricts aux jeunes acheteurs et encourage les États à retirer les armes aux personnes considérées comme une menace.

« Et ç’a été un effort bipartisan », dit M. Mauser.

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Un homme se recueille devant l’école primaire Robb, à Uvalde au Texas, où 19 enfants et 2 enseignants ont été tués en mai 2022.

Ce qui a été le point décisif, c’est la tuerie d’Uvalde, au Texas, où 19 enfants et 2 enseignants ont été massacrés par un assassin en mai 2022. « Après ça, les élus ont finalement bougé. »

Au Colorado, les choses ont progressé encore plus rapidement. Cette année, 10 projets de loi sur le contrôle des armes à feu seront déposés.

« Il n’y a pas si longtemps, les démocrates nous disaient que deux ou trois projets de loi par année étaient le maximum qu’ils pouvaient faire, car ils se faisaient trop critiquer. Cette année, c’est dix ! Ils ne seront pas tous adoptés, mais si quatre ou cinq le sont, ce serait déjà énorme. Les gains récents sont exceptionnels. »

La différence, c’est que le Colorado est passé d’un État solidement républicain dans les années 1990 à un État solidement démocrate aujourd’hui. « Les républicains au Colorado sont très, très à droite et ne représentent pas une grande partie de la population. »

Tom Mauser était à Washington cette semaine lorsque La Presse lui a parlé. Il s’y trouvait pour participer à une manifestation devant les locaux du lobby proarmes National Rifle Association (NRA), ainsi que pour rencontrer les officiels du tout nouveau bureau de la Maison-Blanche pour la prévention de la violence par arme à feu. Une réalisation qui donne de l’espoir, dit-il.

« Quand George W. Bush a été élu en l’an 2000, la NRA a dit qu’elle aurait son propre bureau à la Maison-Blanche. Aujourd’hui, c’est la prévention de la violence qui a son bureau à la Maison-Blanche. Les temps ont changé. »