« Marcher à Lahaina, c’est comme se retrouver dans une photo de la Seconde Guerre mondiale, confie Jock Armour, joint dans l’île de Maui par visioconférence. Il n’y a que la charpente des structures en béton debout, il y a des animaux morts, tout est calciné. »

Ce qu’il faut savoir

• Les incendies ont fait au moins 67 morts, selon un nouveau bilan.

• Environ 1000 personnes manqueraient toujours à l’appel.

• Vendredi, des pompiers travaillaient encore à éteindre complètement le brasier, qui a pris naissance mardi.

Le centre historique de l’île de Maui, dans l’archipel d’Hawaii, a été détruit par des brasiers qui ont pris naissance mardi, causant la mort d’au moins 67 personnes – le bilan devrait s’alourdir encore puisque les opérations de recherches ne sont pas terminées. Quelque 1000 personnes manquent toujours à l’appel et des centaines de familles ont dû être évacuées.

PHOTO FOURNIE PAR JOCK ARMOUR

Jock Armour, qui habite à quelques kilomètres de Lahaina, a été évacué et a trouvé refuge chez un ami, à Kihei.

M. Armour est directeur de la galerie d’art Wyland, à Lahaina, un bâtiment sur le bord de l’océan. Complètement détruit par l’incendie.

Heureusement, il ne s’y trouvait pas mardi. Un brasier à l’extérieur de la ville a provoqué une panne de courant, une « bénédiction déguisée », dit l’homme de 42 ans, puisque tout le personnel est resté à la maison – lui-même habite à quelques kilomètres de la galerie.

S’il avait été en poste, il aurait peut-être dû, lui aussi, courir vers l’océan pour échapper aux flammes, comme d’autres personnes prises au piège par la progression rapide de l’incendie. Il s’est rendu sur place par la suite pour constater les dégâts, incapable de croire que sa galerie n’existait plus, pénétrant dans la zone sinistrée à pied.

« Nous cherchons nos amis »

Les recherches se sont poursuivies, vendredi, pour retrouver les personnes toujours portées disparues après les incendies ravageurs.

PHOTO GARDE NATIONALE DES ÉTATS-UNIS, FOURNIE PAR REUTERS

Des membres de la Garde nationale des États-Unis aident les responsables du comté de Maui et de l’État dans leurs efforts de recherche, à Lahaina.

Pendant que les pompiers s’affairaient encore à contenir le brasier à Lahaina, Pulehu/Kihei et Upcountry Maui, familles et amis de disparus tentaient de retrouver leurs proches. Environ 1000 personnes manqueraient à l’appel.

« Je suis désespérée de retrouver mon cousin » ; « Nous cherchons nos amis » ; « Quelqu’un a vu cette personne ? » : sur les réseaux sociaux, de nombreux messages témoignaient des heures d’attente pénibles sans nouvelles d’un être cher. Les pannes de courant et la destruction d’antennes de télécommunication contribuaient à rendre difficiles les communications dans une partie de l’île.

PHOTO RICK BOWMER, ASSOCIATED PRESS

Les voitures incendiées pullulent à Lahaina, dans l’île de Maui

« Je viens d’apprendre qu’un ami est sain est sauf, confie M. Armour. Moi-même, j’ai été sur la liste des disparus pendant deux jours. » Ses textos rassurants ne quittaient pas son téléphone, faute de réseau.

Un bilan qui pourrait encore s’alourdir

Le maire du comté de Maui, Richard Bissen Jr., a précisé dans une entrevue à NBC News que le décompte officiel ne tenait compte que des corps retrouvés à l’extérieur des bâtiments et pourrait donc s’alourdir au cours des prochains jours.

Les images du centre historique de Lahaina montrent l’étendue des dégâts matériels, avec les maisons détruites, les arbres calcinés, les décombres partout sur le sol, les carcasses de voitures noircies.

Le gouverneur d’Hawaii, Josh Green, a publié une vidéo sur X (anciennement Twitter), avec, en arrière-plan, le paysage dévasté de Lahaina. « Nous avons probablement plus de 1000 immeubles détruits, et plusieurs centaines de familles ont été déplacées », a-t-il dit, ajoutant que la reconstruction serait longue.

PHOTO RICK BOWMER, ASSOCIATED PRESS

Une femme ramasse sa tirelire trouvée dans les décombres de sa maison rasée par les flammes, à Lahaina.

Des familles ont trouvé refuge dans l’un des six centres d’hébergement d’urgence de l’île. Des distributions de nourriture, d’eau et de vêtements étaient aussi prévues pour les résidants qui ont dû quitter leur demeure extrêmement rapidement.

Critiques et questionnements

Des questions ont été soulevées vendredi sur des lacunes possibles quant à l’évacuation de Lahaina.

PHOTO MARCO GARCIA, REUTERS

Ce refuge mis en place à Wailuku, dans l’île de Maui, bourdonne d’activité.

Un premier brasier avait été découvert mardi matin, mais les autorités responsables dans le comté avaient annoncé quelques heures plus tard qu’il était maîtrisé. L’incendie s’est propagé en après-midi à Lahaina, sans que ses habitants aient pu évacuer. Les vents de l’ouragan Dora et la sécheresse ont permis au brasier de s’étendre rapidement.

Jeudi soir, le chef des pompiers, Bradford Ventura, a affirmé qu’il avait été « pratiquement impossible » pour les autorités de procéder assez rapidement à l’évacuation, en raison de la vitesse de propagation. Certains résidants ont dit avoir reçu une notification sur leur cellulaire pour les alerter du danger, d’autres, non. Des habitants de la ville ont aussi déploré ne pas avoir entendu retentir le système d’alerte de l’île.

Une enquête sur la gestion de crise des autorités a d’ailleurs été ouverte, a annoncé vendredi la procureure générale de l’archipel d’Hawaii.

Je ne comprends pas pourquoi ils n’ont pas utilisé les sirènes, qui servent à alerter lorsqu’il y a un tsunami ou un désastre imminent.

Jock Armour, résidant de l’île de Maui

Quelque 14 900 visiteurs ont quitté Maui par avion jeudi, selon les données du comté. Les compagnies aériennes ont ajouté des vols pour répondre à la demande en cette période estivale, l’île étant une destination populaire pour les touristes.

PHOTO RICK BOWMER, ASSOCIATED PRESS

Immeubles rasés par les incendies à Lahaina

Les gens d’un peu partout dans le monde se rendent à Hawaii, un État américain reconnu pour sa culture et la chaleur de ses habitants. « La culture du “aloha” [salutation utilisée dans l’archipel], c’est celle de la solidarité, note M. Armour. J’espère que les gens qui ont découvert cette culture seront solidaires pour aider les gens d’ici, pas nécessairement juste financièrement, mais en faisant preuve de sollicitude. »

Avec l’Agence France-Presse, le New York Times et l’Associated Press