Vingt-deux civils ont été tués jeudi dans des tirs de mortier à Lougansk, bastion des séparatistes prorusses alors que l'Ukraine a envoyé son propre convoi humanitaire aux populations dans l'Est en réponse à l'aide russe controversée.

Près de 300 camions russes sont arrivés jeudi dans la région de Rostov, frontalière de celle de Donetsk en Ukraine.

Kiev a envoyé, jeudi en fin de matinée, un convoi composé de 15 camions transportant 240 tonnes de produits de première nécessité à destination des civils des bastions rebelles de Donetsk et Lougansk, assiégés par l'armée ukrainienne.

Ce chargement s'arrêtera dans la ville de Starobilsk, localité sous contrôle du gouvernement à 97 km au nord de Lougansk, où il sera pris en charge par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui se chargera de sa distribution.

Cette annonce sonne comme une réponse au convoi humanitaire envoyé par la Russie mardi sous le même prétexte vers la frontière ukrainienne, et qui fait l'objet depuis plusieurs jours d'un bras de fer entre Kiev et Moscou sur les modalités de son acheminement.

L'Ukraine, comme de nombreux pays occidentaux, soupçonne que ce convoi parti mardi matin d'une base militaire des environs de Moscou ne sert de couverture à une éventuelle intervention russe en Ukraine. Un scénario qualifié «d'absurde» par le ministère russe des Affaires étrangères.

Piège pour l'Ukraine

Petro Porochenko s'est entretenu à ce sujet par téléphone dans la nuit de mercredi à jeudi avec le vice-président américain Joe Biden et ils «sont convenus de continuer à coordonner les efforts pour répondre aux menaces et aux défis actuels et potentiels», selon la présidence ukrainienne.

Après avoir initialement annoncé qu'elles empêcheraient le convoi russe d'entrer sur son territoire, les autorités ukrainiennes ont finalement proposé mercredi que l'aide soit acheminée puis distribuée par la Croix-Rouge au fief rebelle de Lougansk, sans électricité ni eau courante depuis bientôt deux semaines.

«Si l'Ukraine décide de bloquer l'entrée à cette aide, alors c'est un piège, à la suite de quoi débutera un conflit d'envergure (avec la Russie). Et alors, cette aide entrera d'une manière tout à fait différente: avec des prétendues forces de maintien de la paix et une escorte armée» russe, s'est justifié à la télévision le chef adjoint de l'administration présidentielle ukrainienne Valeri Tchaly.

Le convoi russe près de la frontière

Le convoi russe, chargé selon Moscou de plus de 1.800 tonnes d'aliments, de médicaments et de générateurs, est arrivé jeudi dans la région de Rostov-sur-le-Don, selon un responsable du ministère russe des Situations d'urgence.

Frontalière de l'Ukraine, la région de Rostov pourrait permettre aux quelque 300 camions russes de passer directement en territoire contrôlé par les insurgés.

Selon le scénario proposé par Kiev, cette aide passera par un poste-frontière proche de Lougansk, où la cargaison sera inspectée par les douaniers, les gardes-frontières ukrainiens et des représentants de l'OSCE. Le convoi poursuivra sa route par le territoire contrôlé par les rebelles et l'aide sera distribuée aux civils du bastion prorusse par la Croix-Rouge.

Lougansk est, avec Donetsk, un des deux derniers bastions des séparatistes prorusses, qui ont été contraints à des reculs importants face à une offensive ukrainienne d'ampleur depuis plus d'un mois.

Sur le terrain, de violents combats se poursuivaient jeudi au prix de lourdes pertes : neuf soldats en 24 heures pour l'armée et plus de 20 civils.

Signe de l'intensification du conflit en Ukraine, le nombre de victimes dans l'est de l'Ukraine a doublé en quinze jours atteignant désormais 2086 morts, selon l'ONU.

Le service de presse de l'opération menée par l'armée ukrainienne a notamment indiqué qu'une offensive était en cours dans la partie orientale de Lougansk, et que des tirs avaient lieu sur son aérodrome. Un responsable local a fait état de 22 morts et de «nombreux blessés» parmi les civils après que des obus ont touché un bus, un magasin et plusieurs immeubles d'habitation.

À Donetsk, d'intenses bombardements ont repris dans la nuit de mercredi à jeudi après une journée relativement calme, faisant un mort civil et 11 blessés, selon la municipalité. Un obus est également tombé sur un hôpital sans faire de victimes.

Le président russe Vladimir Poutine doit pour sa part s'exprimer jeudi en Crimée, péninsule ukrainienne annexée en mars par la Russie, devant des députés russes.