Si, en 2020, on a parfois eu l’impression que le monde avait arrêté de tourner, la pandémie nous renvoyant chacun dans nos terres, l’année 2021 n’aura pas été l’antidote espéré.

La trame de fond : le repli

PHOTO BAZ RATNER, ARCHIVES REUTERS

Centre de vaccination contre la COVID-19 à Narok, au Kenya

Oui, les avions ont redécollé et on a commencé à regarder ailleurs, mais les idées en vase clos ont continué à faire des ravages. L’année n’était pas vieille d’une semaine encore quand une nébuleuse conspirationniste a pris d’assaut le Capitole à Washington. On a aussi vu des théories du complot ralentir la vaccination contre la COVID-19 dans de nombreux pays. Cette même vaccination a été une véritable guerre de clochers entre pays riches. Alors que l’année tire à sa fin, la pandémie qui s’étire s’efforce toujours de nous faire comprendre qu’elle ne dira pas son dernier mot tant que nous n’adopterons pas des solutions globales plutôt que de nous occuper chacun de notre petite cour. C’est vrai en santé, mais aussi dans la lutte contre les changements climatiques, un des autres grands enjeux de l’année. Une leçon à transformer en action en 2022.

Le fiasco de l’année : le retrait de l’Afghanistan

PHOTO TAYLOR CRUL, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Opération militaire américaine pour évacuer des centaines de personnes fuyant l'Afghanistan, à l'aéroport de Kaboul, le 21 août dernier

S’il y a une image qui aura marqué l’année, c’est bien celle d’Afghans tombant des avions américains auxquels ils s’étaient accrochés dans l’espoir de fuir leur pays à la mi-août. Les semaines qui ont précédé cette scène de désespoir, le monde a regardé avec stupéfaction les villes afghanes tomber comme des dominos pour passer aux mains des talibans. Et tout ça après des milliers de milliards d’investissements étrangers pour doter le pays d’une armée qui devait prendre le relais au départ des troupes des États-Unis et de l’OTAN, mais qui a plutôt été vendue à la pièce aux islamistes ultrarigoristes. Le Canada, qui s’est retiré de l’Afghanistan en 2014, n’a pas particulièrement brillé dans ses efforts tardifs pour rescaper les milliers d’Afghans qui ont aidé ses militaires, ses diplomates et les journalistes canadiens pendant 20 ans. Cruellement décevant.

Peut faire mieux l’an prochain : le président américain, Joe Biden

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Joe Biden

Après quatre années de présidence de Donald Trump, marquées par l’imprévisibilité, le mensonge et le manque de compassion pour une grande partie de la planète, les espoirs de voir Joe Biden redresser la barre étaient grands. Peut-être trop grands, car ils ont été partiellement déçus. La relation canado-américaine est peut-être moins explosive, mais elle reste difficile. Le président démocrate continue de jouer la carte protectionniste. Les politiques migratoires du président Biden – notamment à l’égard des Haïtiens – n’ont pas brillé par leur humanisme. Les États-Unis se sont aussi mis à dos la France, pour vendre des sous-marins nucléaires aux Australiens. À la fin de l’année, Joe Biden a tendu à nouveau la main à ses vieux alliés, mais il y a encore un décalage entre le ton conciliant et le fond quelque peu nombriliste.

Le zéro de l’année : le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed

PHOTO TIKSA NEGERI, ARCHIVES REUTERS

Abiy Ahmed

Abiy Ahmed était premier ministre d’Éthiopie depuis un an à peine quand il a reçu le prix Nobel de la paix en 2019. Et pour cause. À son arrivée au pouvoir, l’homme de 41 ans a réussi à régler un conflit avec l’Érythrée qui traînait depuis 20 ans, il a libéré des centaines de prisonniers politiques et permis aux médias de s’exprimer librement. Il promettait d’unir le pays. Malheureusement, deux ans après l’obtention du prix, le portrait est tout autre. L’homme de paix est maintenant un commandant de guerre qui demande à ses fidèles, sur Facebook, d’« enterrer » les rebelles du Tigré qui lui tiennent tête. La guerre de la dernière année a fait des milliers de morts et des millions de déplacés. La famine guette de larges pans de la population. Des violations graves des droits de la personne, dont des violences sexuelles, ont aussi été dénoncées. L’homme de paix n’est plus qu’un souvenir.

L’héroïne de l’année : l’ancienne chancelière allemande Angela Merkel

PHOTO ODD ANDERSEN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Angela Merkel

Souvent sous-estimée, décrite comme une politicienne prudente, quelque peu effacée, Angela Merkel aura souvent causé la surprise pendant son règne de chancelière de l’Allemagne réunifiée. Rien ne prédisposait cette scientifique, fille de pasteur luthérien, élevée en Allemagne de l’Est, à devenir la femme la plus puissante de la planète. Et à se maintenir à la tête du pays le plus prospère de l’Europe pendant 16 ans, jouant un rôle crucial au sein de l’Union européenne. Prudente, certes, mais audacieuse aussi. C’est elle qui a décidé d’accueillir 1 million de migrants dans son pays en 2015 alors qu’une bonne partie de l’Europe leur fermait les portes. Et toute l’Allemagne a été bouche bée quand, pour la cérémonie militaire qui a été donnée pour marquer son départ du pouvoir au début de décembre, Angela Merkel a choisi un grand succès d’une chanteuse punk de l’ancienne Allemagne de l’Est. Et rideau !