Le plus haut tribunal du Pakistan a maintenu mardi l'acquittement d'une chrétienne accusée de blasphème, et Ottawa se dit prêt à faire tout ce qui est en son pouvoir pour assurer sa sécurité.

Asia Bibi risquait la peine de mort au Pakistan pour blasphème contre l'islam. Elle est maintenant libre de quitter le pays et de venir rejoindre au Canada ses filles, qui ont déjà obtenu l'asile politique.

La décision rendue mardi par le tribunal confirme l'acquittement de Mme Bibi prononcé en octobre et élimine le dernier obstacle juridique à sa demande d'asile. Affaires mondiales Canada considère que le cas de Mme Bibi est une priorité et affirme que son objectif est d'assurer sa sécurité et celle de sa famille.

Saiful Malook, l'avocat de Mme Bibi, indiquait dans un article d'opinion au « Washington Post » le mois dernier que si sa cliente pouvait un jour quitter le Pakistan, sa destination la plus probable serait le Canada. L'automne dernier, le premier ministre Justin Trudeau déclarait à l'Agence France-Presse à Paris qu'Ottawa était en pourparlers avec le gouvernement pakistanais dans cette affaire, sans commenter davantage, étant donné la nature délicate des négociations.

Après le premier acquittement de Mme Bibi, en octobre, des partis religieux radicaux au Pakistan avaient manifesté dans les rues, réclamant l'assassinat des juges et le renversement du gouvernement du premier ministre Imran Khan. À la toute dernière minute, ils ont également interjeté appel de l'acquittement. Le gouverneur d'une province qui avait pris la défense de Mme Bibi a été tué par balle, tout comme un ministre du gouvernement minoritaire qui remettait en cause les lois sur le blasphème.

Affaires mondiales exhorte maintenant le gouvernement pakistanais à prendre toutes les dispositions nécessaires afin d'assurer la sécurité de Mme Bibi.

Des preuves « douteuses »

Les trois juges de la Cour suprême avaient réclamé « des preuves très strictes de blasphème » et ils n'en ont trouvé aucune, selon l'avocat de Mme Bibi. Le juge en chef Asif Saeed Khan Khosa a conclu que les accusateurs de Mme Bibi s'étaient rendus coupables de parjure et qu'ils auraient pu être incarcérés à vie si l'affaire n'était pas aussi épineuse.

Le juge Khosa a ajouté que « l'image de l'islam que nous présentons au monde me cause beaucoup de peine et de tristesse ». La plupart des preuves déposées contre Mme Bibi étaient douteuses et certaines semblaient même avoir été fabriquées, a dit le magistrat. Il a rappelé que le religieux qui a accusé Mme Bibi s'est contredit, ce que personne n'a contesté au cours du procès.

Les problèmes de Mme Bibi avaient commencé en 2009, quand elle a offert de l'eau à des ouvriers agricoles avec qui elle travaillait. Une dispute a éclaté quand certains ont refusé de boire dans le même contenant qu'une chrétienne, et deux d'entre eux l'ont ensuite accusée d'avoir insulté le prophète Mahomet. Elle a été condamnée à mort l'année suivante.

La loi pakistanaise sur le blasphème est souvent utilisée lors de règlements de comptes ou pour intimider les fidèles de religions minoritaires, y compris les chiites.