(Mae Sot) Des véhicules blindés thaïlandais patrouillaient mercredi dans la ville de Mae Sot tandis que des tirs d’artillerie étaient entendus en Birmanie où la junte et un groupe ethnique armé s’affrontaient mercredi pour la deuxième journée consécutive près de Myawaddy, une localité d’une très grande importance pour les échanges commerciaux.

Des centaines de personnes faisaient la queue pour entrer en Thaïlande au poste de contrôle de l’immigration de Mae Sot, beaucoup fuyant la dernière série de combats qui ont secoué la Birmanie depuis que l’armée a arraché le pouvoir à un gouvernement démocratiquement élu en 2021.

Les soldats thaïlandais ont pris position sous le pont de l’amitié, un ouvrage enjambant une rivière à sec qui relie leur pays à Myawaddy, et les silhouettes de militaires birmans étaient visibles sur l’autre rive.

« J’avais peur, alors j’ai décidé de passer du côté thaïlandais », raconté à l’AFP Khu, une habitante de 49 ans de Myawaddy, serrant son chien contre sa poitrine.

PHOTO MANAN VATSYAYANA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Khu, une habitante de Myawaddy fuyant les violences

Elle affirme avoir obtenu un visa pour rester en Thaïlande pendant sept jours mais confie qu’elle n’entend pas retourner en Birmanie avant la fin des affrontements.

Un soldat thaïlandais, qui a refusé de donner son nom, a assuré que les détonations causées par le conflit étaient les plus intenses qu’il ait entendues en quinze ans à Mae Sot.  

Jafal Sweardik, 14 ans, vient de traverser la frontière avec sa famille à partir de Myawaddy, où, selon lui, les échos des tirs d’artillerie et des coups de feu ont assombri les festivités de l’Aïd.

« C’était horrible, très effrayant », dit-il à l’AFP, ajoutant qu’il avait hâte de retrouver sa famille en Thaïlande et de partager avec elle un repas pour l’Aïd.

Des combats « toute la nuit »

Les combattants de l’Union nationale Karen (KNU) ont affirmé samedi avoir pris la base militaire de Thingannyinaung, située à environ 10 kilomètres à l’ouest de Myawaddy, et que plus de 600 militaires, policiers et leurs familles s’étaient rendus.

Aucun commentaire à ce sujet n’a pu être obtenu de la part de la junte.

Selon le ministère birman du Commerce, les échanges commerciaux via Myawaddy se sont élevés au cours des 12 derniers mois à 1,1 milliard de dollars, une source de revenus vitale pour l’armée birmane à court d’argent.  

Des habitants de cette cité ont dit à l’AFP que les combats avaient commencé mardi dans ses environs, poussant les gens à fuir en Thaïlande mais que les troupes de la KNU ne semblaient pas être entrées à Myawaddy.  

« Il y a eu des combats toute la nuit dernière et aussi dans la matinée », a déclaré mercredi à l’AFP l’un d’eux, qui a refusé de donner son nom pour des raisons de sécurité.

« Nous pouvons entendre de chez nous des tirs d’artillerie et des explosions. Des avions survolent la ville ».

« Ma mère et mes frères et sœurs ont fui vers Mae Sot ce matin. Je garde désormais notre maison avec mon oncle ».

Un chauffeur de camion sur la route de Myawaddy en Birmanie a également rapporté avoir entendu le survol d’avions et des tirs d’artillerie mercredi.

Un endroit où rester

En Thaïlande voisine, un habitant de Mae Sot a dit à l’AFP avoir vu mardi soir huit véhicules militaires thaïlandais se diriger vers la frontière.

« De nombreuses personnes sont entrées à Mae Sot en provenance de l’autre côté (Birmanie) », a-t-il souligné.

« J’ai aussi vu de nombreux messages en ligne de personnes recherchant un logement ».

Le nombre de ceux qui transitent quotidiennement par le poste d’immigration thaïlandais en provenance de Birmanie est passé à environ 4000 ces derniers jours contre 1900 habituellement, a confié à l’AFP un responsable de l’immigration.

Il a ajouté que les autorités étaient en train de renforcer les effectifs des agents d’immigration pour faire face à un éventuel gonflement du flux des arrivées.

La Thaïlande a une frontière de 2400 kilomètres avec la Birmanie et le ministre thaïlandais des Affaires étrangères a affirmé mardi que ce royaume était prêt à accueillir 100 000 personnes fuyant le conflit en cours.