L’armée israélienne a tué mercredi trois fils du chef du Hamas Ismaïl Haniyeh dans une frappe aérienne à Gaza, mais le dirigeant du mouvement islamiste palestinien a prévenu que cette attaque ne ferait pas plier son mouvement après six mois de guerre dévastatrice.

« Je remercie Dieu pour l’honneur que nous fait le martyre de mes trois fils et de certains de mes petits-enfants », a déclaré à la chaîne du Qatar Al Jazeera M. Haniyeh basé à Doha. « L’ennemi a visé une voiture à bord de laquelle ils se trouvaient. »

Le Hamas a précisé dans un communiqué qu’outre trois de ses fils, quatre petits-enfants de M. Haniyeh avaient péri dans la frappe survenue dans le camp de réfugiés de Chati, dans la ville de Gaza (nord), où la famille rendait visite à des proches au premier jour de la fête du Fitr marquant la fin du mois sacré musulman du ramadan.

L’armée israélienne a confirmé avoir tué dans une frappe aérienne les trois fils de M. Haniyeh, qualifiés d’« agents militaires de l’organisation terroriste Hamas ».

Israël a juré de détruire le Hamas après une attaque sans précédent menée le 7 octobre par des commandos du mouvement palestinien infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël, qui a coûté la vie à 1170 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l’AFP à partir des chiffres officiels israéliens.

La frappe s’est produite alors que les médiateurs qatari, égyptien et américain attendent la réponse du Hamas à leur proposition de trêve avec Israël, associée à une libération d’otages retenus à Gaza.

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Le dirigeant Hamas, Ismaïl Haniyeh

« L’ennemi pense pouvoir briser la volonté de notre peuple et pousser les dirigeants à faire des concessions […] Il peut rêver ! Ce sang versé nous rendra encore plus fermes », a dit M. Haniyeh à Al Jazeera.

« […] Nos exigences sont claires et nous n’y renoncerons pas. Si l’ennemi croit que cibler mes fils au plus fort des négociations et avant que le Hamas ne donne sa réponse, poussera le mouvement à changer de position, il se trompe. Les positions ne changeront pas », a-t-il souligné.

Le Hamas est « vaincu »

Hossam Badran, membre du bureau politique du Hamas, a affirmé que le mouvement n’avait pas encore répondu à la proposition de trêve et démenti des informations selon lesquelles il l’a rejetée.

Le Hamas a répété la semaine dernière ses exigences pour tout accord : un cessez-le-feu définitif, le retrait israélien de Gaza, une augmentation importante des aides humanitaires, un retour des déplacés et un accord « sérieux » d’échange d’otages et de prisonniers palestiniens.

La proposition des médiateurs prévoit une trêve de six semaines, la libération de 42 otages retenus à Gaza en échange de 800 à 900 Palestiniens incarcérés par Israël, l’entrée de 400 à 500 camions d’aides chaque jour à Gaza et le retour chez eux des habitants du nord de Gaza, selon une source du Hamas.

Durant l’attaque du 7 octobre, plus de 250  personnes ont été enlevées et 129 restent détenues à Gaza dont 34 sont mortes d’après des responsables israéliens.

Le président américain Joe Biden, allié d’Israël, a dit que le Hamas « doit avancer » sur la proposition de trêve.

Malgré les appels à un cessez-le-feu, de nouvelles frappes israéliennes ont fait 14 morts dont des enfants dans le camp de Nousseirat dans le centre de Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas.

Ces dernières 24 heures et selon le même ministère, 122 morts supplémentaires ont été recensés dans le territoire assiégé par Israël, portant à 33 482 le nombre de personnes tuées dans les opérations militaires israéliennes depuis le début de la guerre.

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Des Palestiniens se rendent sur les tombes de personnes tuées lors du conflit dans la bande de Gaza, à l’occasion du jour de l’Aïd al-Fitr, le 10 avril 2024.

Considéré comme une organisation terroriste par Israël, les États-Unis et l’Union européenne, le Hamas a pris le pouvoir à Gaza en 2007. Cette année-là, Israël a imposé un blocus total à la bande de Gaza, deux ans après son retrait du territoire palestinien qu’il a occupé pendant 38 ans.

« D’un point de vue militaire, le Hamas est vaincu. Ses combattants ont été éliminés ou se cachent. Ses capacités sont réduites », a affirmé Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien.

« Erreur »

Dans un entretien diffusé mardi par la chaîne hispanophone Univision, M. Biden a qualifié « d’erreur » la conduite de la guerre à Gaza par le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.

Mercredi, il a de nouveau critiqué Israël qui selon lui ne permet pas l’entrée d’assez d’aides dans la bande de Gaza menacée par la famine, après qu’Israël a annoncé l’accroissement, ces derniers jours, de l’aide autorisée à entrer dans le territoire palestinien.

Dimanche, l’armée israélienne a annoncé le retrait de ses soldats de Khan Younès, la grande ville du sud transformée en un champ de ruines, afin de préparer l’offensive terrestre sur Rafah, à 3 km plus au sud.

Israël présente Rafah comme le dernier grand bastion du Hamas. Les États-Unis ont dit leur opposition à une telle opération, s’inquiétant pour les civils dans la ville où s’entassent 1,5 million de personnes en majorité des déplacés selon l’ONU.

Selon l’armée, désormais une seule brigade est encore déployée dans la bande de Gaza, dans le centre.

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Des déplacés palestiniens à Rafah font une prière spéciale au premier jour de l’Aïd al-Fitr.

« L’Aïd le plus triste »

Dans le territoire palestinien dévasté, au milieu des ruines ou dans leurs abris, de nombreux Palestiniens ont prié, autour de petits gâteaux préparés malgré les pénuries, à l’occasion du Aïd.

« Nous n’avons jamais vécu un Aïd comme celui-ci, plein de tristesse, de peur, de destruction et de dévastation », a déclaré Ahmed Qishta, un père de quatre enfants, réfugié à Rafah.

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Une photo prise à l’aide d’un drone montre les ruines de la mosquée al-Farouk, à Rafah.

Sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem, les fidèles avaient en tête la guerre à Gaza.  

« C’est l’Aïd le plus triste que nous ayons vécu », a dit Rawan Abd, une infirmière de 32 ans.