(Hong Kong) La nouvelle loi de Hong Kong sur la sécurité nationale prévoyant des peines de prison à perpétuité pour la trahison ou l’insurrection est entrée en vigueur samedi, dénoncée par les militants pro-démocratie et provoquant l’inquiétude de l’Occident.

Ce texte complète la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin en 2020 après les grandes manifestations de l’année précédente en faveur de la démocratie à Hong Kong.

Plusieurs catégories d’infractions s’y ajoutent par rapport au texte de 2020 : la trahison, l’insurrection, l’espionnage et le vol de secrets d’État, le sabotage mettant en péril la sécurité nationale, la sédition et l’« interférence extérieure ».

Il a été adopté mardi à l’unanimité par le Conseil législatif de Hong Kong (LegCo), qui ne comprend pas de représentants de l’opposition.

Plusieurs pays occidentaux dont les États-Unis, l’Union européenne et le Royaume-Uni, se sont dits alarmés par cette nouvelle loi.

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a exprimé vendredi sa « profonde inquiétude » quant à l’utilisation de cette loi pour réduire les voix dissidentes, estimant qu’elle pourrait nuire à la réputation de Hong Kong en tant que plaque tournante de la finance internationale.

Le dirigeant de Hong Kong, John Lee, ancien chef de police a de son côté évoqué un « moment historique » estimant que la loi permettra de « prévenir, d’interdire et de punir les activités d’espionnage, les complots et les pièges mis en place par les services de renseignement étrangers ».

« Violence en noir »

Elle permettra également de « prévenir la violence en noir », a-t-il dit, en référence aux manifestations pro-démocratie de 2019, au cours desquelles des centaines de milliers de personnes avaient réclamé une plus grande autonomie par rapport à Pékin.

Les manifestations avaient été durement réprimées et Pékin avait imposé en 2020 une loi sur la sécurité nationale.

Près de 300 personnes ont à ce jour été arrêtées à Hong Kong au titre de la loi de 2020, et des dizaines de responsables politiques, militants et autres personnalités publiques ont été emprisonnés ou contraints à l’exil.

Le texte prévoit des peines allant jusqu’à la prison à vie pour le sabotage mettant en danger la sécurité nationale, la trahison et l’insurrection, 20 ans pour espionnage et sabotage, et 14 ans pour « interférence extérieure ».

La loi élargit également la définition du crime de « sédition », datant de l’époque coloniale britannique, pour y inclure l’incitation à la haine contre les dirigeants communistes chinois, avec une peine aggravée pouvant aller jusqu’à 10 ans d’emprisonnement.

Lors de la rétrocession de 1997, Hong Kong s’était vu garantir certaines libertés, ainsi qu’une autonomie judiciaire et législative, pendant 50 ans, dans le cadre d’un accord intitulé « Un pays, deux systèmes ».

Le nouveau texte met fin à une grande partie des garanties juridiques dont bénéficiait Hong Kong, afin de s’aligner sur la législation de la Chine continentale.

Manifestations à l’étranger

Le ministre de la Sécurité peut désormais imposer des mesures punitives aux militants qui se trouvent à l’étranger, y compris l’annulation de leur passeport.

Les pouvoirs de la police ont également été étendus pour permettre de détenir des personnes jusqu’à 16 jours sans inculpation – contre 48 heures actuellement – et d’empêcher un suspect de rencontrer des avocats et de communiquer avec d’autres personnes.

À Londres, où une importante diaspora hongkongaise s’est réinstallée après la répression des manifestations de 2019 par le gouvernement, une centaine de manifestants se sont rassemblés samedi devant le ministère des Affaires étrangères et du Commonwealth, scandant « Hong Kong libre ».

« Lorsque les journalistes approchent les citoyens à Hong Kong, ceux-ci ne sont pas vraiment disposés à partager leur point de vue parce qu’ils ont peur, a déclaré “J”, un manifestant de 30 ans, l’un de ceux qui ont déménagé en 2019. » Chaque fois que nous retournerons (à Hong Kong), nous devrons être plus prudents. 

Des citoyens chinois étaient également présents, dont « Fernando », un étudiant de 23 ans originaire de la région de Shanghai.

 « Je veux que la Chine soit démocratique et que l’État de droit y règne. J’ai un certain devoir moral pour les soutenir », explique-t-il.  

Interrogé sur le risque d’être surveillé, il a répondu : « Je pense qu’ils regardent, ils sont partout. Vous voyez beaucoup de gens ici, ils portent des masques et des lunettes de soleil, comme moi ».

Des dizaines de personnes ont participé à un rassemblement à Taipei, certains brandissant des pancartes « loi scélérate » et des images du journal prodémocratique Apple Daily, aujourd’hui fermé.  

 « Hong Kong n’a plus de démocratie ni de liberté d’expression », a déclaré Leos Lee, un ancien conseiller municipal de Hong Kong qui s’est installé à Taïwan.