(Meulaboh) L’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a indiqué vendredi craindre des dizaines de morts ou disparus dans le naufrage au large de l’Indonésie d’un bateau transportant des réfugiés rohingyas, dont 75 ont été secourus alors que les autorités ont annoncé la fin recherches.

« La crainte concerne ceux des 151 (réfugiés) qui n’ont pas encore été secourus » et le risque « que ces vies soient perdues ou que ces (réfugiés) soient portés disparus », selon le porte-parole du HCR en Indonésie, Babar Baloch.

« Espérons que demain ils soient encore en vie quelque part, qu’ils soient secourus », a-t-il ajouté.

Après avoir sauvé 75 réfugiés ayant survécu dans des conditions dantesques au naufrage de leur bateau à 30 km des côtes, les secours indonésiens ont indiqué vendredi avoir arrêté les recherches entamées mercredi.

Des survivants avaient estimé qu’environ 150 Rohingya se trouvaient à bord avant le naufrage.

« Les recherches se sont terminées jeudi. Tous les réfugiés rohingya qui se trouvaient hier sur le bateau ont été secourus », a déclaré Muhammad Fathur Rachman, un responsable de l’agence locale de sauvetage à Aceh, à l’extrémité occidentale de la grande île de Sumatra.  

« Nous n’avons reçu aucune information supplémentaire sur des personnes disparues et il n’y a pas de liste de passagers du bateau », a ajouté M. Rachman. « Selon nos analyses, le bateau ne (pouvait) pas contenir 150 personnes. »

Dans une déclaration conjointe, le HCR et l’Organisation internationale des migrations (OIM) ont indiqué vendredi être « choqués et profondément préoccupés par la situation ». Si le chiffre des disparus était confirmé, « il s’agirait de la plus grande perte de vies humaines jusqu’à présent cette année », selon le communiqué.

Jeudi, un navire de secours avait recueilli à son bord 69 Rohingya qui avaient survécu accrochés à la coque retournée d’un bateau de pêche. Parmi eux se trouvaient neuf enfants, 18 femmes et 42 hommes.

Ces réfugiés, membres d’une minorité musulmane persécutée en Birmanie, venaient de faire naufrage deux fois : le rafiot en bois sur lequel ils étaient partis du Bangladesh a chaviré mercredi, puis le bateau de pêche venu les secourir s’est retourné à son tour sous la surcharge.

« Quand nous étions en mer, à ce moment-là, nous avions l’impression que nous allions mourir, que tout le monde allait mourir », a témoigné à l’AFP Rehena Begum, une survivante de 33 ans interrogées dans un refuge à Aceh. « Il y avait beaucoup de gens qui mouraient. Beaucoup de femmes, beaucoup d’enfants mouraient devant nous ».

Selon elle, plus de 140 personnes se trouvaient à bord du bateau en bois naufragé. Beaucoup d’entre elles sont mortes coincées à l’intérieur d’une section du bateau sans issue.

« Beaucoup de personnes sont décédées… il y avait deux ou trois salles dans le bateau. Dans une salle, il y avait beaucoup de monde et il n’y avait aucun accès pour sortir de cette salle, c’est pourquoi les gens sont décédés », a-t-elle encore déclaré.

La grande pièce du refuge où s’entassent les réfugiés a été divisée en deux, entre hommes et femmes, sans climatisation ni ventilateur malgré la chaleur, selon un journaliste de l’AFP.

Huit hospitalisés

PHOTO ZAHLUL AKBAR, AGENCE FRANCE-PRESSE

La plupart des réfugiés ont été conduits dans un centre d’hébergement temporaire, dans un ancien immeuble de la Croix-Rouge.

Au moins huit des rescapés, déshydratés et malades, ont été hospitalisés jeudi soir.

Les autres ont été conduits dans un centre d’hébergement temporaire dans un ancien immeuble de la Croix-Rouge, dans un village proche de Maulaboh, ville principale du district d’Aceh occidentale.

Leur arrivée a déclenché les protestations de certains habitants, qui voient d’un mauvais œil l’arrivée constante de réfugiés qu’ils accusent de consommer leurs ressources déjà maigres.

Depuis novembre, des centaines de Rohingya ont fui les camps les hébergeant au Bangladesh pour gagner par la mer la province d’Aceh, sur des embarcations de fortune.

Selon des survivants du naufrage, les réfugiés entendaient rejoindre les côtes thaïlandaises, mais ont finalement opté pour Aceh après avoir été repoussés par la Thaïlande.

Des milliers de Rohingya risquent chaque année leur vie dans des voyages en mer périlleux et coûteux pour gagner l’Indonésie ou la Malaisie.

Depuis la mi-novembre, plus de 1700 d’entre eux sont arrivés en Indonésie, le plus important mouvement de Rohingya vers l’archipel depuis 2015, selon les Nations unies.

Des centaines d’entre eux sont hébergés dans des centres temporaires dans la région.