(Almaty) Le président du Kazakhstan a limogé mercredi son gouvernement, en réponse aux manifestations qui ont agité une province riche en pétrole de ce pays d’Asie centrale, des troubles liés à une hausse des prix du gaz.

Un arrêté publié sur le site présidentiel indique que Kassym-Jomart Tokaïev a accepté la démission du gouvernement dirigé par le premier ministre Askar Mamin. Le vice-premier ministre Alikhan Smailov assumera le rôle du premier ministre par intérim jusqu’à la formation d’un nouveau cabinet.

La veille, le chef d’État avait décrété l’état d’urgence, à partir du 5 janvier et jusqu’au 19 janvier, dans cette région pétrolifère de Mangystau et à Almaty, la capitale économique, dans le sud-est du pays. Un couvre-feu sera instauré de 23 h à 7 h locales.

« Ne répondez pas aux provocations venant de l’étranger et de l’intérieur du pays. Ne répondez pas aux appels à prendre d’assaut les bâtiments officiels. C’est un crime pour lequel vous seriez puni », avait déclaré le chef de l’État de 68 ans, qui gouverne le pays depuis 2019.

La police avait utilisé mardi à Almaty des grenades assourdissantes et du gaz lacrymogène pour disperser une manifestation contre la hausse des prix du gaz qui avait rassemblé plusieurs milliers de personnes, aux cris de « le vieil homme dehors ! » et « démission du gouvernement ! ».

M. Tokaïev avait été choisi comme successeur par le dirigeant historique Noursoultan Nazarbaïev, 81 ans, qui a dirigé le Kazakhstan durant 30 ans à partir 1989 et conserve une influence.

PHOTO ABDUAZIZ MADYAROV, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

La police avait utilisé mardi à Almaty des grenades assourdissantes et du gaz lacrymogène pour disperser une manifestation contre la hausse des prix du gaz qui avait rassemblé plusieurs milliers de personnes

Cette manifestation, dans un pays autoritaire où ce type de rassemblement est rare, fait suite à un mouvement de colère qui a éclaté dans plusieurs villes depuis dimanche.

Le Khazakstan, première économie d’Asie centrale habituée par le passé à des taux de croissance à deux chiffres, souffre de la baisse des prix du pétrole et de la crise économique en Russie, qui a mené à la dévaluation du tenge kazakh et une forte inflation.

Tirs pour disperser

Deux journalistes de l’AFP, qui ont vu mardi les tirs de la police pour disperser la foule à Almaty, ont comptabilisé au moins 5000 participants à cette manifestation. Les messageries WhatsApp, Telegram et Signal étaient inaccessibles dans la nuit.

Le mouvement de colère a débuté dimanche, après une hausse des prix du gaz naturel liquéfié (GNL), dans la ville de Janaozen, dans l’ouest de ce pays riche en ressources naturelles, avant de s’étendre à la grande ville régionale d’Aktau, sur les bords de la mer Caspienne.

Mardi soir, les autorités avaient tenté de calmer la situation en concédant une réduction du prix du GNL, le fixant à 50 tenges (0,14 dollar) le litre dans la région, contre 120 au début de l’année.

Cette promesse n’a pas pour autant entraîné la dispersion des manifestants, qui exigeaient de parler au président.

Janaozen a été par le passé le théâtre des troubles les plus meurtriers ayant secoué le Kazakhstan depuis son indépendance de l’URSS en 1991. En 2011, au moins 14 ouvriers d’un site pétrolier avaient été tués quand la police avait réprimé une manifestation contre les conditions de travail et les salaires.

La région de Mangystau, où est située la ville de Janaozen, dépend du GNL comme principale source de carburant pour les voitures et toute hausse de son prix entraîne celle des produits alimentaires, déjà à la hausse depuis le début de la pandémie de coronavirus.