(Nations unies) Redire sa « préoccupation » sur la démocratie en Israël et les colonies, sans compromettre les chances d’une normalisation avec l’Arabie saoudite : Joe Biden s’est livré mercredi à un exercice d’équilibriste en rencontrant le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.

Le président américain a « redit sa préoccupation face à tout changement du système démocratique israélien qui se ferait sans le consensus le plus large possible », selon un communiqué publié par la Maison-Blanche après une entrevue à New York, destinée à réchauffer un peu la relation glaciale entre les deux hommes.

Il s’agit d’une claire allusion à la réforme de la justice lancée par le gouvernement israélien, qui a déclenché un mouvement de contestation massif et que Washington a maintes fois critiquée.

Joe Biden a aussi mis en garde contre de nouvelles « mesures unilatérales » de la part des Palestiniens comme des Israéliens, cela alors que Washington s’oppose à la politique d’implantation de nouvelles colonies de Benyamin Nétanyahou, notamment en Cisjordanie occupée.

Mais le démocrate de 80 ans a aussi « invité » le dirigeant israélien « à Washington avant la fin de l’année », ce qui est un clair signal d’apaisement.

Benyamin Nétanyahou a lui insisté sur la possibilité d’une normalisation des relations avec l’Arabie saoudite, fortement encouragée par Joe Biden.

« Je pense que sous votre houlette, Monsieur le Président, nous pouvons forger un accord de paix historique entre Israël et l’Arabie saoudite », a dit le premier ministre.

Invitation

Benyamin Nétanyahou, revenu au pouvoir fin 2022, n’a toujours pas été reçu dans le bureau Ovale comme le sont traditionnellement les premiers ministres israéliens, ce qui a été interprété comme une marque de défiance de la part de l’administration Biden.

Leur première rencontre depuis que Benyamin Nétanyahou est à nouveau chef de gouvernement a eu lieu dans le cadre plus neutre d’un hôtel new-yorkais, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies.

« Sans Israël, aucun Juif dans ce monde n’est en sécurité. Israël est essentiel », a dit le président américain au début de l’entretien.

« Il y a une chose qui ne changera jamais, et c’est l’engagement d’Israël pour la démocratie. Nous continuerons à défendre les valeurs que nos deux pays […] chérissent », a pour sa part promis le premier ministre israélien.

Le gouvernement israélien assure vouloir rééquilibrer les institutions en réduisant les prérogatives du pouvoir judiciaire, mais les opposants dénoncent un projet autoritaire.

Joe Biden, candidat à un second mandat, sait que le sujet est particulièrement sensible pour l’électorat juif progressiste aux États-Unis, très hostile à cette réforme.

Mais le démocrate de 80 ans ne peut pas se permettre une crise prolongée avec Israël s’il veut faire advenir une normalisation des relations entre le pays et l’Arabie saoudite, et ainsi laisser son empreinte sur l’histoire diplomatique du Moyen-Orient.

« En profondeur »

Cette possible normalisation, qui impliquerait des garanties de sécurité pour la monarchie pétrolière ainsi que des assurances pour les Palestiniens, a été « discutée en profondeur » par les deux dirigeants, a dit un haut responsable américain à l’issue de la rencontre, estimant que cela « restait un sujet très compliqué ».

« Tous les dirigeants impliqués doivent décider des choses très difficiles, y compris le premier ministre israélien, et il y a une composante liée à la relation entre Israéliens et Palestiniens », a-t-il précisé.

« On s’en rapproche tous les jours », a pour sa part dit, à propos d’une possible normalisation, le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed ben Salmane mercredi dans une interview à la télévision américaine.

Selon le New York Times, Joe Biden serait prêt à accorder à l’Arabie saoudite les mêmes solides garanties de sécurité qu’au Japon ou à la Corée du Sud, par exemple.

Son prédécesseur Donald Trump avait enclenché un mouvement historique de rapprochement en accueillant en 2020 à la Maison-Blanche la signature entre Israël, les Émirats arabes unis et Bahreïn des « accords d’Abraham ».