(Helsinki) Le Parlement finlandais a commencé mercredi à débattre d’une adhésion à l’OTAN, désormais « très probable » après l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Moscou a menacé de renforcer ses moyens militaires, notamment nucléaires, dans la région baltique si la Finlande, qui compte 1300 kilomètres de frontières avec la Russie, ou la Suède rejoignaient l’alliance militaire menée par les États-Unis.

Mais mercredi, la première ministre finlandaise Sanna Marin a déclaré qu’« il est temps de trouver des solutions » et que « l’unité est la meilleure garantie de sécurité ». Elle avait estimé la semaine dernière que la décision d’adhérer ou non à l’OTAN serait prise dans moins d’un mois.

Il est « très probable » que la Finlande soit candidate, avait reconnu vendredi la ministre finlandaise des Affaires européennes, Tytti Tuppurainen.

Longtemps partagés sur la question, les 200 membres de l’Eduskunta, le Parlement finlandais, semblent majoritairement en faveur de l’adhésion, selon des pointages des médias, qui n’ont relevé que 12 oppositions.

« Il est clair que les actions de la Russie nous ont grandement rapprochés d’un alignement militaire », car Moscou « est devenu impitoyable, imprévisible et agressif », a jugé Antti Lindtman, parlementaire du Parti social-démocrate au pouvoir, lors du débat, sans aller jusqu’à déjà annoncer un revirement de son mouvement, historiquement réticent à intégrer l’OTAN.

L’écologiste Atte Harjanne a indiqué de son côté que son parti soutenait l’adhésion à l’Alliance atlantique.  

Pendant la première heure du débat, seule l’Alliance de gauche, partenaire mineur de la coalition au pouvoir, s’est opposée à l’adhésion, qui selon elle placerait la Finlande en première ligne en cas d’attaque russe.

Sans exprimer de recommandation formelle, un « livre blanc » remis la semaine dernière par le gouvernement aux parlementaires souligne que seule une adhésion à l’OTAN permet de bénéficier du « parapluie » de son article 5 de défense collective.

Même s’il a rompu avec sa stricte neutralité à la fin de la Guerre froide et adhéré à l’Union européenne en 1995, le pays nordique n’est aujourd’hui que partenaire de l’OTAN. Rejoindre les 30 membres de l’alliance apporterait une dissuasion « considérablement plus grande » contre une attaque russe, selon le livre blanc.

 « Conséquences » 

 « Les Finlandais semblent avoir pris leur décision et il y a déjà une énorme majorité en faveur d’une adhésion à l’OTAN », avait relevé vendredi Tytti Tuppurainen.

Les sondages suggèrent que près des deux tiers des 5,5 millions de Finlandais soutiennent désormais l’idée, soit près du triple d’avant la guerre en Ukraine.

 « J’étais hostile à l’adhésion à l’OTAN, mais en raison de cette situation, j’y suis maintenant plus favorable », a expliqué mercredi Sofia Lindblom, 24 ans, en promenant son chien dans le centre d’Helsinki. « L’adhésion offrirait une certaine forme de sécurité ».

Sur la place du Sénat voisine, Vuokka Mustonen, 69 ans, observe que l’invasion de l’Ukraine a « complètement changé » son opinion, dorénavant favorable à l’OTAN : « Je me sens plutôt en sécurité, mais vraiment effrayée ».

Moscou tente de décourager la démarche de son ancien grand-duché, qui a déjà obtenu un soutien de la plupart des membres de l’Alliance atlantique à une éventuelle adhésion.

 « Être membre de l’OTAN ne peut renforcer leur sécurité nationale. De facto, (la Finlande et la Suède) seront la première ligne de l’OTAN », a affirmé vendredi une porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova. Ces pays « doivent comprendre les conséquences d’une telle mesure pour nos relations bilatérales et pour l’architecture sécuritaire européenne dans son ensemble ».

La décision finlandaise est suivie avec grande attention en Suède, qui semble faire dépendre sa décision du choix d’Helsinki.

De nombreux analystes anticipent une candidature de la Finlande, et peut-être de la Suède, suffisamment rapidement pour le sommet de l’OTAN fin juin à Madrid.

L’unanimité des États membres est de rigueur. Si un point d’interrogation demeure sur le choix de la Hongrie de Viktor Orban, plus favorable à la Russie que les autres Européens, le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg a estimé qu’il n’y aurait pas d’obstacle.

Helsinki s’attend à ce que quatre mois à un an soient nécessaires pour entériner les procédures d’adhésion.

Si celle-ci devait se faire, les frontières terrestres entre les pays de l’OTAN et la Russie doubleraient d’un coup, atteignant près de 2600 kilomètres.

La Finlande, russe pendant un peu plus d’un siècle (1809-1917), partage une histoire lourde avec son grand voisin, marquée par une résistance héroïque lors de la Seconde Guerre mondiale, notamment lors de la guerre d’Hiver en 1939-40.