L'heure des ultimes arbitrages approchait vendredi à Cancun où plus de 190 pays étaient engagés dans d'intenses tractations pour sceller un accord sur le climat, et surtout éviter un échec qui, un an après Copenhague, pourrait être fatal au processus.

«La mobilisation des délégués jusqu'à 2, 4 ou 5 heures du matin a été totale», a expliqué Juan Elvira, ministre mexicain de l'Environnement.

Après une nuit blanche, les négociateurs devaient se retrouver en séance plénière dans l'après-midi pour se prononcer sur un texte rassemblant une série de propositions sur la lutte contre la déforestation ou encore la vérification des engagements de réductions d'émissions de CO2 des grands pollueurs.

«Nous avons des bouts de texte qu'il faut rassembler», a expliqué le ministre allemand de l'Environnement, Norbert Röttgen. «Il va falloir encore négocier. Personne n'est prêt à donner une pièce du puzzle s'il n'en reçoit pas une autre en échange».

«Cela commence à se mettre en place, je suis prudemment optimiste», a de son côté déclaré Chris Huhne, ministre britannique de l'Énergie et du climat. Cependant, a-t-il mis en garde, tout peut encore s'«effondrer»: «c'est un peu comme la météo chez nous, cela peut changer très vite».

L'aide financière aux pays les plus vulnérables aux effets du changement climatique (sécheresses, inondations...) est l'un des points sensibles. Les débats portent sur la forme que prendra le «Fonds vert», par lequel doit transiter une partie des 100 milliards de dollars par an d'ici 2020 promis par les pays développés à Copenhague.

L'Équateur a fait part de son «inquiétude» sur l'issue de cette réunion. «Nous ne savons pas comment le document (final) est préparé et par qui», a expliqué Ricardo Patiño, ministre des Affaires étrangères, mettant en garde contre des «surprises» de dernière minute.

La question de l'avenir du protocole de Kyoto faisait toujours peser une menace sur l'issue des discussions, à quelques heures de la fin officielle de la conférence.

Après le Japon, la Russie a clairement indiqué jeudi qu'elle ne voulait pas entendre parler d'une nouvelle période d'engagement dans le cadre de ce traité, qui fixe des objectifs chiffrés de réduction d'émission de gaz à effet de serre aux pays industrialisés (sauf les États-Unis qui ne l'ont pas ratifié).

Les pays en développement, grands émergents en tête, en font une condition «non négociable», mettant en avant la responsabilité «historique» dans l'accumulation de CO2 dans l'atmosphère, et le reste de la planète.

Le Premier ministre britannique David Cameron s'est entretenu par téléphone avec son homologue japonais Naoto Kan pour tenter de débloquer la situation, a-t-on appris de source diplomatique.

Au-delà des décisions qui pourraient être adoptées vendredi soir, l'enjeu de la rencontre dans la station balnéaire mexicaine est aussi celui de la légitimité et de la crédibilité du processus onusien sur le climat, lancé en 1992 à Rio lors du Sommet de la Terre.

Pour autant, il ne faut pas un accord au rabais et «sans contenu», a souligné le négociateur européen. «C'est une fausse solution, et ça ne crédibiliserait pas ce processus».

Pour limiter les effets dévastateurs annoncés du réchauffement, les réductions d'émissions de CO2 des grands pays pollueurs devront être nettement plus importantes que celles aujourd'hui envisagées, a rappelé la Commissaire européenne au Climat Connie Hedegaard.

«Nous voulons que le texte qui sortira de cette conférence dise clairement l'évidence: les engagements sur la table sont insuffisants pour nous permettre de limiter le réchauffement de la planète à deux degrés».