L’auteure réplique au dossier « Le gaz naturel à la croisée des chemins », d’Hélène Baril.

Cette semaine, La Presse présageait un futur sombre pour notre entreprise. La journaliste posait toutefois une question légitime : y a-t-il encore un avenir pour Énergir, l’unique distributeur de gaz de la province ?

Un échange avec la journaliste nous aurait permis de rappeler que nous avons amorcé, au tournant de la dernière décennie, une transformation profonde de notre modèle d’affaires pour nous diversifier et décarboner la consommation de nos clients. Aujourd’hui, 50 % de nos actifs sont dans les énergies renouvelables.

L’urgence climatique demande de poser des gestes forts et les entreprises énergétiques doivent faire preuve d’un leadership clair. Nous croyons fermement qu’il doit y avoir place à des échanges respectueux et raisonnés sur la façon dont nous consommons l’énergie et sur ses impacts environnementaux. Pour contribuer à cette importante discussion, nous souhaitons apporter notre éclairage sur des éléments qui nous apparaissent essentiels.

Mythe nº 1

La solution est simple : tout doit être électrifié

Selon L’état de l’énergie au Québec, l’électricité représente environ 42 % du bilan énergétique total de la province. Bien que le Québec soit déjà largement électrifié, la nécessaire transition énergétique qui doit s’opérer au cours des prochaines années mettra une forte pression sur la demande électrique. De plus en plus de voix s’élèvent publiquement pour rappeler que celle-ci se fera sentir de façon beaucoup plus marquée lors des périodes de pointes hivernales. Pourquoi ? Notamment parce que seulement 5 % des endroits dans le monde ont un climat plus froid que le Québec. Et parce que 80 % des résidences sont chauffées à l’électricité alors que le chauffage des bâtiments est l’usage qui requiert le plus de puissance au moment critique. Sans oublier qu’une part significative des besoins du secteur industriel québécois ne peut être électrifiée à court ou moyen terme.

C’est ici que le réseau d’Énergir entre en jeu. Sa contribution est colossale : c’est un actif souterrain, résilient, jeune et en bonne santé. Aujourd’hui, il équivaut approximativement à la puissance convertie de 10 complexes de la Romaine (17 000 MW). Dans le contexte énergétique actuel et de l’accroissement majeur des besoins électriques, il serait irréaliste de miser uniquement sur l’électricité. Nous devons plutôt capitaliser sur les infrastructures énergétiques existantes en y injectant plus d’énergie renouvelable afin d’assurer une résilience de nos réseaux d’énergies.

Mythe nº 2 

La transition énergétique se fera sans coût

La décarbonation aura un coût. L’écart entre les coûts historiques de l’énergie et celui des nouvelles énergies est important. C’est vrai pour les nouveaux approvisionnements électriques, tout comme pour l’hydrogène ou le gaz naturel renouvelable. La mise à niveau de la capacité de transport et de distribution électrique pour satisfaire à cette nouvelle demande a aussi un coût important. Si les plus nantis peuvent se permettre rapidement une hausse significative de leur facture énergétique, ce n’est pas le cas de tous, particulièrement dans le contexte économique inflationniste actuel.

Les citoyens et les entreprises doivent pouvoir compter sur un bouquet de solutions énergétiques pour faire le choix de celles qui seront adaptées à leur situation. Il faut ainsi cesser de parler au « ou » et plutôt parler au « et » parce que c’est en combinant toutes les solutions que nous pourrons collectivement mener avec succès la transition énergétique juste du Québec.

Mythe nº 

Sans le gaz naturel, Énergir fera faillite

Rassurez-vous : Énergir est en très bonne santé financière. Il est vrai que les facteurs qui contribuaient à notre succès par le passé ne sont plus les mêmes. Nous avons pris les devants avec une nouvelle trajectoire : distribuer moins de gaz naturel et nous concentrer là où notre réseau peut apporter de la valeur aux plans environnemental et économique. Notre modèle d’affaires vise désormais à offrir de nouvelles solutions de décarbonation à nos clients en apportant de la valeur à l’écosystème énergétique du Québec tout en assurant notre rentabilité à long terme.

Nous soulignons aussi qu’en 2023, nous avons réalisé la plus importante émission de dette long terme de notre histoire, appuyée par notre plan stratégique, auprès d’une quarantaine d’investisseurs institutionnels québécois et canadiens. La demande a excédé l’offre, ce qui a permis d’émettre à coût très compétitif. D’ailleurs, pas plus tard qu’en décembre dernier, Standard & Poor’s a reconfirmé la cote de crédit A d’Énergir, l’une des meilleures au Canada pour un service public. Énergir possède donc une excellente solidité financière et les investisseurs ainsi que nos actionnaires québécois ont confiance en notre pérennité.

Redéfinir un modèle d’affaires n’est pas une mince tâche. Nous n’avons pas la tête dans le sable, nous avançons avec détermination même si nous avons l’humilité de reconnaître que nous n’avons pas toutes les réponses. L’important, c’est d’être proactifs et d’agir dès maintenant.

Tandis que les enjeux auxquels nous faisons face exposent l’importance d’un dialogue constructif, je nous invite tous à y travailler avec moins de cynisme, de méfiance, et avec davantage d’ouverture.

Lisez le dossier d’Hélène Baril Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue