Nous y voilà. Tous rendus à bon port. 13 heures d’avion, cinq repas congelés et une valise en moins à l’arrivée.  Nous y sommes.

Juste un peu avant l’atterrissage, j’essayais tant bien que mal d’étirer mon cou pour entrevoir, par un des hublots de l’avion, les premières couleurs d’une ville complètement différente de celle que je m’attendais à trouver. 

Khartoum est une ville très prospère.  La présence de pétrole dans le pays et du pipeline qui le traverse a grandement aidé au développement des infrastructures.  Aux abords de l’aéroport, les routes principales sont pavées et les affiches publicitaires omniprésentes.  Usman, notre chauffeur, nous dit qu’il en coûte aussi cher pour louer un appartement dans la ville, qu’à New-York.

Les chants musulmans et les paroles des imams qui s’échappent des mosquées, le soleil comme une boule de feu qui plombe sur nos peaux- il fait un peu plus de 40 degrés- et le calme des rues depuis notre arrivée- les vendredis et samedis sont des jours de repos au Soudan -  nous rappellent que nous nous sommes envolés très loin, en très peu de temps, vers une aventure qui promet beaucoup de découvertes.

Aujourd’hui, nous avons pris le déjeuner avec Edward Carwardine, chef des communications pour Unicef Soudan et coordonnateur de notre projet au Darfour.  Si nous sommes au Soudan en ce moment, c’est en grande partie grâce à cet homme qui, durant les derniers mois, a tenté d’orchestrer nos visites dans les camps de réfugiés du Darfour. J’ai choisi de vous parler de lui parce qu’il mène, à mon sens, une vie vraiment hors du commun et fascinante.

Edward travaille pour l’Unicef depuis 1997.  Il a été en mission dans plusieurs pays, notamment l’Inde, le Madagascar, la Macédoine, l’Afghanistan et le Soudan. Il était en Afghanistan tout juste après la chute du régime taliban, en novembre 2001. Son premier mandat était de contribuer au retour, après le New arwze (jour de l’an islamique), d’un million d’enfants à l’école et de permettre aux filles de retrouver leur place dans les institutions scolaires.  Au terme de la première année, c’est trois millions d’enfants qui ont pu avoir accès au système éducatif, par les efforts coordonnés des ONG et du nouveau gouvernement en place.

Il a quitté l’Afghanistan parce qu’au fil des ans, il ne s’y sentait plus en sécurité.  Il nous dit : « Je me sentais incapable d’opérer, psychologiquement.  Je me levais le matin et je n’avais plus envie d’aller travailler ». 

En 2007, il s’installe donc au Soudan, pour prendre le relais des communications pour le Nord et le Sud du pays.  Il nous explique que selon lui, le grand défi pour les acteurs qui opèrent dans le domaine de l’aide humanitaire au Soudan est de travailler en fonction de la diversité et de la complexité des différentes régions du pays.  Dans un pays aussi vaste qu’une bonne partie de l’Europe de l’Ouest, des gens de différentes ethnies, religions ou tribus cohabitent.  «Au Sud, par exemple, les habitants sortent d’une période de 20 ans de guerre et les coopérants doivent tenir compte de cette réalité».

Edward nous aide à nous préparer pour les trois semaines de tournage qui nous attendent.  Il nous explique à quel point on doit se montrer vigilants lors de nos entrevues, pour ne pas mettre en péril la sécurité des gens qui acceptent de témoigner. 

Pour lui, la meilleure façon d’apporter un soutien aux populations en ce qui a trait aux médias est de montrer, en plus des images et récits que l’on connaît du Darfour, un autre visage de la région.  Il nous parle de la force des communautés qui, dans la stabilité, arrivent à joindre leurs efforts pour améliorer leur qualité de vie et celle de leurs enfants.  «C’est incroyable ce qu’ils arrivent à faire en communauté.»  nous dit Edward.  «Pour faire avancer les choses et favoriser un climat de stabilité, la question à se poser à ce moment-ci est peut-être, à quoi peut-on arriver quand il y a la paix?» conclut-il.

Si tout va bien, lundi matin, nous allons monter à bord d’un avion de l’ONU, en direction du nord du Darfour.  Le court documentaire que nous y tournerons portera sur une famille de réfugiés nouvellement arrivée dans le camp. 

À très bientôt !
Stéphanie

Pour en savoir plus : www.unicef.ca