L'acteur et producteur mexicain Diego Luna (Y tu mama también) a reçu au Festival de Sundance son baptême de réalisateur et de scénariste, en présentant son premier film de fiction, Abel, dans lequel il porte à l'écran, avec humour, ses expériences d'enfance.

La première mondiale du film, présenté hors compétition, a été très chaleureusement accueillie à Park City, la petite ville de montagne où se tient jusqu'à dimanche le festival de cinéma indépendant.

Diego Luna, 30 ans, célèbre pour son rôle dans le film d'Alfonso Cuaron Y tu mama también (2001), où il partageait l'affiche avec son ami Gael Garcia Bernal, travaillait sur l'histoire d'Abel depuis longtemps.

«Ça a évolué. Une fois, cela se passait pendant un carnaval à Vera Cruz, une autre fois c'était un Hamlet interprété par un enfant», déclare-t-il à l'AFP. «Mais cela a toujours été autour d'un enfant, et chaque fois un enfant qui devait être adulte avant l'âge. C'était ça l'idée», dit-il.

Finalement, Abel met en scène un enfant atteint de troubles du comportement (Christopher Ruiz-Esparza) qui, de retour dans sa famille après un long séjour à l'hôpital, se glisse dans la peau de son père absent et se met à régenter toute la maison.

A la demande de la mère (Karina Gidi), démunie face au comportement de son fils, la famille décide de ne pas contrarier l'enfant et de jouer le jeu. Jusqu'à ce que le père (José Maria Yazpik) vienne semer le trouble, en réapparaissant deux ans après avoir disparu sans laisser d'adresse.

«Cette histoire a beaucoup à voir avec moi, avec le fait qu'à six ans je travaillais déjà, que j'ai toujours vécu avec beaucoup d'adultes», raconte Diego Luna. «D'une certaine manière, je suis un exemple positif, parce que j'ai su utiliser (cette expérience) pour me construire. Mais cela me semble aussi très injuste d'imposer cela à un enfant».

Contre tout attente, le film n'est jamais larmoyant ni triste, mais au contraire rempli d'humour, jouant au maximum sur l'absurdité des situations.

«Le sujet était tellement personnel que si je n'en riais pas, je serais devenu fou», explique-t-il. «Pour parler de quelque chose d'aussi intime, l'ironie est toujours plus facile. Il est vrai aussi que pendant le développement du projet, je suis devenu père et cela a changé ma perspective».

Selon lui, le choix du thème de l'enfance est aussi à mettre en relation avec ses débuts comme réalisateur.

«Quand tu réalises pour la première fois, tu es comme un enfant qui commence à apprendre une nouvelle langue et je crois qu'il est naturel, d'une certaine manière, de raconter l'histoire de quelqu'un que tu as pu être par le passé», dit-il.

Le travail avec les enfants - qui sont frères dans la vraie vie - n'a pas été trop difficile, assure Diego Luna. «La seule différence entre un enfant et un acteur, c'est que ce dernier fait ce qu'il a à faire parce qu'il est professionnel», observe-t-il.

«L'enfant, à partir du moment où il ne s'amuse plus, ça ne va plus l'intéresser. Notre effort principal consistait donc à ce que le tournage soit toujours amusant et divertissant».

Cela n'a pas empêché le jeune Christopher Ruiz-Esparza, très impressionnant dans le rôle d'Abel, de prendre son rôle très au sérieux. Diego Luna en était même parfois «préoccupé, car il a commencé à prendre tout cela tellement au sérieux que son engagement dans le travail donnait froid dans le dos», dit-il.

Le jeune cinéaste, ravi de son expérience, est très motivé à l'idée de réaliser à nouveau, «mais comme pour Abel, en prenant le temps de trouver l'histoire et de la travailler beaucoup. Je perdais mes cheveux, je ne dormais pas, mais j'ai pris beaucoup de plaisir», conclut-il.