Entre ciel et terre dans le centre de la Grèce, pays de monastères suspendus, Météora, film exigeant de Spiros Stathoulopoulos à Berlin, détourne un moine et une nonne de l’amour divin pour les conduire vers Eros.

Bien qu’encore jeune (35 ans), le réalisateur explore dans ce film âpre les liens ou plutôt les différences entre «l’amour de dieu et l’amour charnel», les plaisirs spirituels et la religion accrochés aux monastères tendus vers les cieux et les délices terrestres, en bas dans la vallée, entre oliviers et figuiers.

Alors que Théodoros et la nonne Urania ont voué leur vie à Dieu, l’attirance qu’ils ressentent l’un pour l’autre remet en cause leur vocation et leur vie monastique, au prix de violents tourments.

Ainsi pour se punir, la nonne s’inflige de graves brûlures à la main tandis que le moine monte visiter et laver les pieds d’un vieil ermite qui s’obstine à parcourir à genoux les chemins empierrés.

«Pourtant, l’orthodoxie n’est pas la religion du châtiment», a défendu Spiros Stathoulopoulos en conférence de presse, confiant être doublement baptisé catholique par sa mère colombienne et orthodoxe par son père grec pour écarter tout soupçon de provocation.

«C’est un poignant dilemme de l’âme humaine, de ses conflits. Sa suspension entre deux mondes», a résumé ce cinéaste formé en Californie.

«La plupart du temps, on riait beaucoup sur ce film pour ne pas pleurer», a remarqué l’acteur principal, Théo Alexander, lors de la conférence de presse.

La beauté de «Meteora» tient aux paysages spectaculaires de Thessalie, avec ces pitons de grès vieux de millions d’années qui pointent à plusieurs centaines de mètres au-dessus de la plaine: c’est tout en haut, à leur sommet, que les moines orthodoxes ont commencé, dès le 14e siècle, à construire leurs monastères en partie éclipsés par les nuages.

À défaut de filmer dans les monastères, dont le réalisateur a pris soin, «par respect», de se tenir éloigné, la narration emprunte aussi les voies de l’animation au travers d’icônes byzantines dont il avoue raffoler et qui prennent vie.

C’est par ces icônes animées - une vraie réussite - que s’expriment les pensées et les états d’âme des deux protagonistes.

Judicieusement programmé dimanche matin, le film, présenté en compétition pour l’Ours d’or, a permis à une partie de la salle... de poursuivre sa nuit, tandis que l’autre cédait au ravissement. Sans qu’il soit possible de préjuger du camp du jury.

Le réalisateur, dont c’est le deuxième film, avait déjà été sélectionné à Cannes (2007, Quinzaine des réalisateurs) pour son premier, «PVC-1» - la course contre la montre d’une femme qui cherche à se libérer de la bombe verrouillée à son cou, filmée en un seul long plan séquence.