La ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, a bonifié son aide au Cinéma Impérial, en offrant 3 millions à l’OSBL afin qu’il « poursuive ses travaux de rénovation et qu’il reprenne ses activités ».

Mme St-Onge en a fait l’annonce au Théâtre Outremont mercredi soir, juste avant la présentation du film d’ouverture des Rendez-vous Québec Cinéma, Lucy Grizzli Sophie, d’Anne Émond.

Le film – et l’essentiel de la programmation de ce festival – devait d’ailleurs avoir lieu à l’Impérial, qui a suspendu toutes ses activités le 31 janvier dernier à la suite d’un ultimatum lancé au gouvernement fédéral, qui avait initialement offert 1 million à l’OSBL.

La somme consentie à l’Impérial provient du Fonds canadien pour les espaces culturels. « Un programme très contingenté », a précisé la ministre, qui s’est félicitée d’avoir pu bonifier l’aide demandée par le cinéma de la rue De Bleury en si peu de temps.

Mais la ministre du Patrimoine canadien était seule durant sa courte allocution. Le porte-parole du conseil d’administration du Cinéma Impérial, Benoît Clermont, brillait par son absence. Aucun représentant du Groupe Québecor n’était présent non plus. Plus tôt dans la journée, la responsable des communications du cinéma n’a pas répondu à notre demande d’entrevue.

Pas question de rouvrir tout de suite

Plus d’une heure et quart après l’annonce, M. Clermont a réagi par courriel à l’annonce de la ministre St-Onge.

« Le Cinéma Impérial est heureux d’apprendre qu’à la suite des représentations réalisées au cours des dernières semaines, le gouvernement fédéral ait consenti à octroyer un financement de 3 millions pour son projet de revitalisation. Nous poursuivons donc nos efforts afin de procéder à une mise à jour financière de notre projet et de ses paramètres, en fonction du financement public annoncé aujourd’hui. »

Pas question toutefois de rouvrir l’Impérial, a laissé savoir M. Clermont. « Nos opérations doivent demeurer suspendues pendant ce processus. » Aucune date de réouverture n’est évoquée. « Nous poursuivons nos efforts pour que ce soit fait dans les meilleurs délais », nous a-t-il écrit.

Les Rendez-vous Québec Cinéma ont d’ailleurs dû se redéployer dans six lieux distincts, tandis que les autres festivals de films, normalement présentés à l’Impérial, sont tous à la recherche de nouvelles salles de projection.

Il faut dire que M. Clermont demandait au gouvernement fédéral d’allonger la même somme versée par Québec, soit 5,6 millions. La Ville de Montréal s’était quant à elle engagée à contribuer à hauteur de 1 million le 6 février dernier. Au total, c’est donc une enveloppe de près de 10 millions dont dispose maintenant l’OSBL.

L’Impérial, qui est contrôlé par Québecor, devenu locataire prioritaire en 2017 après avoir racheté la dette hypothécaire du cinéma, a investi 8,5 millions au cours des six dernières années dans la sauvegarde du bâtiment patrimonial construit en 1913. De nouveaux travaux étaient toutefois nécessaires.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

La façade du Cinéma Impérial, rue De Bleury

« Un lieu mythique du cinéma québécois »

À quoi serviront les quelque 10 millions investis dans les travaux de rénovation ? Ce n’est pas clair. Lors de l’annonce de la fermeture imminente du cinéma, au mois de décembre dernier, le directeur général de l’Impérial, François Beaudry-Losique (le fils de Serge Losique, ancien directeur-fondateur du Festival des films du monde), avait admis en entrevue avec La Presse que le cinéma était déficitaire et que l’objectif était d’en repenser la vocation.

« En gros, on voudrait que le cinéma puisse se transformer en salle multidisciplinaire, parce qu’en ce moment, on vivote », avait-il confié. Dans son message envoyé à La Presse, Benoît Clermont réitère la volonté de l’Impérial « de rénover la salle de spectacle pour élargir sa vocation et accueillir toutes les disciplines artistiques ».

Les travaux comprennent également « la restauration de certains éléments patrimoniaux du bâtiment ».

Ce changement de vocation soulève beaucoup de questions. N’est-ce pas le projet qu’a tenté (sans succès) le regretté Daniel Langlois avec le Cinéma Excentris ? Pourquoi l’Impérial, qui accueille essentiellement des festivals (Rendez-vous Québec Cinéma, Cinemania, Festival des films sur l’art, Présence autochtone, Rendez-vous internationaux du documentaire de Montréal, etc.), ne projette-t-il pas des films sur une base quotidienne ?

Voilà quelques questions qu’on aurait bien aimé poser à un représentant de l’Impérial ou de Québecor si on avait répondu à nos appels.

Du côté du ministère du Patrimoine canadien, la ministre St-Onge a indiqué « qu’une entente sera signée entre l’organisation et le Ministère qui va détailler à quoi le 3 millions que l’on consent va servir ». Malgré le flou qui règne sur les détails des travaux et les nombreuses questions liées à la vocation future du théâtre, elle a insisté sur l’importance de sauvegarder le lieu. « C’est un lieu mythique du cinéma québécois, donc c’est important de sauver cette institution-là. »