(Cannes) « Rebelle. Héros. Arnaqueur. Dieu » : dans son documentaire Diego Maradona, présenté hors compétition à Cannes, le Britannique Asif Kapadia raconte les années napolitaines de la légende argentine du soccer, qui lui ont apporté ses plus grandes joies et ont fini par le broyer.

Avec ce film, Kapadia clôt une trilogie entamée avec Senna, consacré au pilote brésilien de Formule 1 mort à 34 ans d’un accident de course, et poursuivie avec Amy qui retrace la vie de la chanteuse Amy Winehouse jusqu’à son décès à 27 ans (Oscar en 2016).

Ici encore, il tente de faire découvrir l’homme qui se cache derrière le génie. Et pour raconter Diego plus que Maradona, Kapadia a fait parler l’intéressé, mais également toute sa famille, ses proches, en tout 80 personnes. Et il s’est appuyé sur quelque 500 heures d’images inédites issues des archives personnelles de l’ex-joueur de soccer.

« On doit l’existence de beaucoup de ces images au regretté Jorge Cyterszpiler, qui fut son ami d’enfance puis son agent. Anticipant, le phénomène que deviendrait Maradona, il eut l’idée d’embaucher deux vidéastes pour le filmer dans son quotidien. Il a été visionnaire », explique le réalisateur à l’AFP.  

Certaines images sont impressionnantes, comme celles de sa présentation aux partisans napolitains en furie dans le stade San Paolo, futur théâtre de nombre de ses exploits. Ce jour-là en conférence de presse, il confie après son passage compliqué à Barcelone : « À Naples j’attends un peu plus de tranquillité ». Tout sauf prophétique…

Car dans la cité mal-aimée du sud de l’Italie, la venue de la star du ballon rond, lui-même d’origine modeste, résonne comme une première revanche vis-à-vis des clubs fortunés du Nord, Juventus Turin, Ac Milan, Inter Milan… Entre 1984 et 1991, d’autres prendront des atours encore plus glorieux avec notamment deux titres de champion et une Coupe d’Europe (UEFA) glanés.

Durant ces années, tout Naples s’arrache l’idole Maradona, devenu entre-temps champion du monde avec l’Argentine en 1986. La Camorra en premier lieu qui lui fournit ses récréations, la cocaïne et les femmes. La pression est telle que l’idole veut partir, mais son président refuse.

La bascule survient au Mondial de 1990, lorsque l’Italie pays-hôte est éliminée par l’Argentine de Maradona en demi-finale. Un match qui se jouait, ironie du sort à… Naples. Personne ne le lui pardonna et lorsqu’il fut contrôlé positif à la cocaïne en 1991, il réalisa qu’il était lâché par tous. Son déclin pouvait commencer.

Qu’a pensé Maradona du documentaire dont il fait l’objet ? Asif Kapadia ne le sait toujours pas. « Cela devait se produire ici à Cannes ». Mais il n’est finalement pas venu en raison d’une blessure à une épaule, regrette-t-il.