Les scooters électriques de faible puissance sont de plus en plus visibles dans les rues de Montréal. Ce sont souvent des personnes âgées qui tiennent le guidon, notamment celles qui ont perdu leur permis de conduire après des ennuis de santé. Mais ces véhicules ont aussi la cote, de plus en plus, chez les jeunes.

Je me faufile silencieusement à droite des voitures qui attendent au feu rouge et je m'arrête à l'intersection. Quand le feu tourne au vert, je décolle sans effort, je file à 30 km/h, puis j'emprunte une piste cyclable qui serpente à travers les arbres.

Pour tester un petit scooter électrique, je n'ai pas besoin de permis de conduire. Mon véhicule ne requiert ni immatriculation ni assurance. Et il se branche dans une prise de courant ordinaire. Tout ce que je dois faire, c'est porter un casque et accepter la limite de 32 km/h de mon engin. Comme avec un vélo, je peux dépasser les voitures par la droite, me garer sur le trottoir et rouler sur les pistes cyclables (pour le moment - voir autre texte), au grand dam des cyclistes.

«La majorité de notre clientèle a de 20 à 30 ans», dit Joëlle Eibach, copropriétaire de la boutique Dyad, sur le boulevard Saint-Laurent à Montréal, qui vend et loue des vélos et scooters électriques depuis plus d'un an. «On a beaucoup de clients des milieux artistiques et universitaires, des trendsetters qui adoptent rapidement les nouvelles tendances.»

Certains clients ont des préoccupations écologiques, mais plusieurs sont surtout séduits par le côté pratique et ludique de ces petits véhicules, qui permettent de contourner les bouchons et les travaux qui ennuient tellement les automobilistes montréalais cet été. «Je possède une voiture, mais pour me déplacer en ville, je voulais un moyen de transport alternatif, moins dommageable pour l'environnement et plus économique,» explique Martin Durocher, propriétaire d'un scooter électrique depuis un an. Le jeune homme de 33 ans, résidant du quartier Rosemont, l'utilise notamment pour se rendre à son travail, coin Sherbrooke et Saint-Laurent.

Martin Durocher, directeur général du Zoofest, festival qui présente des spectacles d'artistes émergents, aime tellement son véhicule qu'il en a obtenu plusieurs pour les déplacements des employés et invités de son festival, qui se tenait en juillet. Pour circuler en ville, pas nécessaire d'aller plus vite que 30 km/h, dit-il. Les économies d'essence et la facilité de stationnement compensent largement ce petit inconvénient, selon lui.

Populaire auprès des personnes âgées

Pour bien des personnes âgées, cette vitesse réduite est plutôt un avantage. «On n'a plus les mêmes réflexes qu'avant», note André McDonald, 68 ans, qui a des douleurs aux jambes depuis une récente intervention cardiaque. M. McDonald a acheté trois scooters électriques depuis un an. Pourquoi trois? «Je suis concierge d'un immeuble à Laval, et je les prête aux petites madames pour aller à l'épicerie», dit-il, en ajoutant que sa cote de popularité a grimpé depuis...

Daniel Thibault, propriétaire de Daniel Bicycle, sur le boulevard Crémazie à Montréal, a commencé à vendre des scooters électriques en 2007. Il en écoule maintenant plus de 250 par année, soit trois fois plus qu'à ses débuts. Son magasin - situé dans un quartier moins branché que celui où se trouve Dyad - reçoit encore en majorité des clients de plus de 50 ans. «Les jeunes préfèrent les scooters plus rapides», explique-t-il.

Ces petits scooters, alimentés par un moteur électrique de 500 watts, pourraient rouler plus vite que 32 km/h. Mais les constructeurs limitent leur vitesse afin qu'ils soient considérés comme des «bicyclettes assistées» selon la loi canadienne, ce qui évite l'obligation de permis de conduire et d'immatriculation. C'est aussi pour cette raison qu'ils sont dotés de pédales, même si pratiquement personne ne s'en sert. D'ailleurs, certains conducteurs les enlèvent et les transportent dans leur sacoche, prêts à les sortir en cas de rencontre avec la police, raconte Patrick Perron, copropriétaire de Scooter Bazoo, à Laval.

La plupart des véhicules vendus au Québec sont fabriqués en Chine, où les scooters électriques sont immensément populaires. Des détaillants québécois ont conçu, avec des constructeurs chinois, des produits répondant aux normes canadiennes. C'est le cas de Dyad, et aussi de Scooter Bazoo, avec sa marque Scootterre. «On a vendu plusieurs marques au cours des années, mais c'était difficile d'avoir des pièces et du service, explique Patrick Perron. Maintenant, on fait faire nos scooters avec nos caractéristiques, on va tester les produits sur place dans le sud-est de la Chine et on vérifie les conditions de fabrication.»

Les batteries de scooter ont généralement besoin d'un temps de recharge de quatre à cinq heures. Ensuite, les véhicules ont une autonomie variant entre 30 et 60 kilomètres, selon le type de batterie, mais également selon la température, le poids du conducteur, sa vitesse et le type de conduite. Chez Dyad, on propose aussi un modèle qui peut parcourir jusqu'à 100 kilomètres, avec une batterie au lithium. Évidemment, les modèles plus performants coûtent plus cher. Les prix varient de 1000 à 3000 $, soit la même gamme de prix que les scooters à essence. Daniel Bicycle (marque Zongshen) et Scooter Cité (SCV), à Montréal, proposent des véhicules à moins de 700$. On en trouve même chez Wal-Mart, de marque Ecoped, à 1000 $.

Il existe aussi sur le marché des scooters électriques plus puissants, mais leur vitesse ne dépasse pas 60 km/h, leur autonomie n'est pas plus grande et leur prix est beaucoup plus élevé. Comme pour les scooters à essence, il faut un permis pour les conduire, et ils doivent être immatriculés et assurés, ce qui ajoute aux frais et nuit à leur popularité.

Photo: Alain Roberge, La Presse

Joëlle Eibach, propriétaire de la boutique Dyad, un magasin de vélo branché où l'on trouve aussi les fameux scooters électriques.