Jean-François Pronovost n’a pas froid aux yeux. Après avoir repris le rôle mythique de Passe-Montagne dans la nouvelle mouture de Passe-Partout, il s’attaque à un autre défi colossal : interpréter Jacques Brel dans le théâtre musical Amsterdam, sur la scène du TNM.

Le comédien a désormais l’habitude de se faire dire qu’il chausse de grosses chaussures. « C’est souvent ça dans le métier d’acteur, dit-il sans trop s’en faire. Quand on joue des classiques, on interprète des rôles joués maintes et maintes fois avant nous. C’est riche de pouvoir bâtir à partir de quelque chose de déjà créé et de voir si on peut aller ailleurs. »

Dans le cas d’Amsterdam, il s’agit d’une œuvre originale bâtie à partir de plusieurs classiques du célèbre auteur-compositeur-interprète belge. Le récit écrit et mis en scène par Mélissa Cardona n’est ni une revue musicale ni une biographie, mais une histoire inventée. 

« On suit Brel dans sa jeunesse, alors qu’il travaille à la cartonnerie de ses parents et qu’il commence à écrire des chansons, en s’inspirant des gens avec qui il travaille. Il est en train de monter une pièce lorsqu’un imprésario et sa comédienne fétiche débarquent, après avoir entendu parler du talent sur place. »

Les chansons font progresser l’intrigue et mettent en valeur le génie de Brel, un créateur à la fois cérébral et intensément connecté à ses émotions. 

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE

Jean-François Pronovost, qui prête ses traits à Passe-Montagne dans Passe-Partout, interprète Jacques Brel dans Amsterdam.

Il a quelque chose de passionné et d’entier. Brel chantait jusqu’au bout des cheveux ! Dans les vidéos de lui en spectacle, il est trempé et les veines veulent lui sortir du cou. Il faisait plus de 200 shows par année. Il brûlait de quelque chose !

Jean-François Pronovost

L’acteur croit que l’enfance du Belge sous l’occupation allemande a influencé son tempérament. « Il a vécu un sentiment d’oppression et il a sûrement connu des proches qui sont morts à la guerre. C’est pour ça qu’autant de ses textes sont des appels à l’amour, à l’amitié et à la fraternité. C’est à ça que je me suis intéressé quand j’essayais de déterminer à quoi il ressemblait à 20 ans, avant de devenir le monument qu’il est devenu. »

Toucher à l’essence de Brel

Il sait aussi que Brel est reconnu pour sa façon unique d’interpréter ses chansons. Pourtant, il n’essaie pas de l’imiter. « Je veux toucher à son essence. J’ignore pourquoi, mais il y a quelque chose dans son œuvre qui me va bien. On a le même registre vocal. Il y a une intensité théâtrale que je peux mettre à profit en l’interprétant. C’est un phrasé qui me permet de me déployer davantage comme interprète. »

Lors de notre visite à une répétition, on sentait chez Pronovost une fougue, une candeur et une grande aisance pour rendre chaque parole claire et sentie. Il faut dire que l’œuvre de Brel ne lui est pas étrangère. « Mon père écoutait ça quand j’étais petit à la maison. Ça fait partie de moi. »

D’ailleurs, lors d’un exercice de chant à l’école de théâtre, il avait interprété la chanson Mathilde

Quand mon père m’a entendu, il capotait. Ma mère m’avait ensuite suggéré de la rechanter pour sa fête. Je l’avais refaite et il avait les larmes aux yeux. Je sais que c’est une grande fierté pour eux qu’on joue maintenant au TNM.

Jean-François Pronovost

En effet, Amsterdam roule depuis 2017. Après quatre représentations au Gesù, un été 2018 passé au Théâtre des Grands Chênes de Kingsey Falls et une tournée du Québec, la création débarque au TNM, cinq décennies après que Brel en personne y eut donné un spectacle d’adieu en 1967.

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Amsterdam se veut une œuvre originale bâtie à partir de plusieurs classiques de Jacques Brel. Ci-dessus, les interprètes – qui, pour la plupart, ne sont pas très connus du public – répètent une scène de la pièce. 

Dotée d’un plus grand budget qu’à ses débuts, la production dans laquelle Pronovost joue et chante est toutefois passée de 14 à 11 interprètes. La distribution demeure majoritairement composée de comédiens qui ne sont pas les habituelles têtes d’affiche.

« Je trouve ça formidable que le TNM ose. Entre nous, on se dit que la tête d’affiche, c’est Brel. Mais quand même, dans nos rencontres avec le public, beaucoup de gens nous disaient qu’ils trouvaient ça agréable de voir des jeunes s’intéresser à un chanteur d’une autre génération. »

Passe-Partout, la suite

Parlant de rencontres intergénérationnelles, Jean-François Pronovost continue de recevoir beaucoup d’attention de la part des fidèles de Passe-Partout. « Ces temps-ci, je vois plein de photos de fêtes d’enfants avec des gâteaux sur lesquels nos visages ont été imprimés ou des enfants qui se costument en Passe-Montagne, en Passe-Partout et en Passe-Carreau. Je trouve ça super drôle ! »

L’équipe bouclera le tournage de la deuxième saison en septembre, et Télé-Québec prévoit la diffuser à l’automne. On verra aussi l’acteur dans la reprise, au Rideau Vert, de la pièce Comment je suis devenu musulman de Simon Boudreault, l’auteur de la pièce As Is (tel quel), dans laquelle Provonost jouait Saturnin.

Au Théâtre du Nouveau Monde (TNM) du 25 juillet au 10 août

Consultez le site du TNM