L'Orchestre symphonique de Montréal (OSM) propose, mardi, un accord images-musique lors d'une projection du film en noir et blanc et muet The Artist de Michel Hazanavicius à la Maison symphonique. La Presse a discuté de l'importance de la musique dans le cinéma avec la chef d'orchestre Dina Gilbert et la pianiste Lorraine Desmarais, qui seront de cette soirée.

Dina Gilbert se souvient du jour où elle a visionné le film The Artist. La trame sonore a tout de suite accroché l'oreille de la jeune chef d'orchestre, qui, incidemment, s'intéresse aux liens entre musique et cinéma.

« Au cinéma muet, l'émotion précède souvent l'explication [par l'entremise d'intertitres] et la musique permet de renforcer les passages émotifs, observe-t-elle. Elle permet aux gens de rester concentrés sur le film du début à la fin et elle donne une couleur, un caractère, aux personnages. Certains réalisateurs l'ont bien compris. Sans la musique, Star Wars ne serait pas le même. Et que dire d'E.T. l'extraterrestre ? Sans la trame sonore, ce serait un personnage terrifiant ! »

Pour The Artist, l'accord musique et image est parfait, dit Mme Gilbert. Opinion que partage la pianiste Lorraine Desmarais.

« La trame sonore est remplie d'humour et convient parfaitement aux images. » - Lorraine Desmarais

Cette trame sonore a été composée par Ludovic Bource et récompensée d'un Oscar (en tout, le film en a gagné cinq), mais on y retrouve aussi des éléments de la musique de Bernard Herrmann composée pour le film Vertigo d'Alfred Hitchcock.

Le 8 janvier, à la Maison symphonique, Dina Gilbert dirigera l'OSM, qui sera formée de 74 musiciens. Mme Desmarais accompagnera l'orchestre au piano. Il y aura aussi insertion de chansons et de passages à la guitare.

Si Dina Gilbert connaît bien les liens entre la musique et le cinéma, c'est parce qu'elle a travaillé sur le sujet durant son projet de recherche au doctorat.

« Gabriel Thibodeau, pianiste en résidence à la Cinémathèque québécoise, avait un projet avec la faculté de musique de l'Université de Montréal où des étudiants en composition devaient écrire de la musique pour accompagner de vieux films muets. On m'a proposé de prendre la direction des répétitions. Comme je faisais mon doctorat à cette même faculté, mon travail de recherche a porté sur la synchronisation entre musique et image. »

Un travail de minutie

Ici, le mot-clé est synchronisation. Car diriger un orchestre pour accompagner une projection de film demande un minutage parfait.

« Dans un tel concert, un délai d'une seule seconde entre musique et image est énorme, expose Mme Gilbert. Il faut alors trouver et maîtriser toutes les techniques possibles pour s'ajuster constamment durant le concert. »

À son pupitre, la chef d'orchestre disposera de plusieurs outils.

« En plus de la partition, j'aurai un mini-écran d'ordinateur devant moi avec toutes les indications nécessaires pour suivre à la lettre les différents tempos. » - Dina Gilbert

Devant elle, les musiciens n'auront rien de plus que leur partition sur laquelle seront inscrites des indications leur servant de repères.

« Je préfère avoir tout le poids [de la synchronisation] sur mes épaules pour que les musiciens aient la même aisance à jouer que dans les concerts réguliers. Cela leur donne l'opportunité de bien s'écouter, dit la jeune directrice musicale. C'est de cette façon que les spectateurs reconnaissent les couleurs de l'orchestre. »

Dina Gilbert

Originaire de la Beauce, Dina Gilbert a été chef associée de l'OSM de 2013 à 2016. Elle est actuellement chef de l'Orchestre symphonique de l'Estuaire (Québec) et du Kamloops Symphony Orchestra. Elle a dirigé, à Lanaudière, la première mondiale de la projection du film Le violon rouge de François Girard. Plus tôt cette année, elle a dirigé l'OSM pour une projection du film E.T. the Extra-Terrestrial.

Lorraine Desmarais

L'an dernier, la pianiste et compositrice Lorraine Desmarais a accompagné, avec des plages improvisées, la projection du film The Railrodder de Buster Keaton. Bien connue pour son travail de composition et d'interprétation en jazz, elle a été entendue partout à travers le monde. Elle a aussi composé de la musique pour des oeuvres cinématographiques de l'Office national du film.

The Artist et l'OSM, à la Maison symphonique, le 8 janvier