Stéphane Laforest, qui fut premier chef assistant de Kent Nagano à l'OSM de 2009 à tout récemment, ne se doutait certainement pas qu'il y reviendrait si peu de temps après la fin de son mandat. L'OSM lui a en effet demandé de remplacer Jean-Marie Zeitouni pour une tâche d'envergure: la première en cette ville de la quatrième (et dernière) Symphonie d'Albéric Magnard, une oeuvre imposante qui sollicite l'orchestre au grand complet presque sans répit pendant 40 minutes.

Programmer du Magnard à l'OSM était une initiative valable, cette musique étant à peu près inconnue ici. Disciple de Vincent d'Indy, admirateur de Beethoven et de Wagner, Magnard a composé son ultime symphonie dans la maison même de Baron-sur-Oise où, le 3 septembre 1914, il s'était enfermé à l'approche des Allemands, cette maison qui, ironie du sort, allait être le tombeau de ce germanophile puisque les envahisseurs y mirent le feu.

On connaît les symphonies de Magnard par le disque; on vient d'entendre la dernière en concert à l'OSM. Incontestablement le produit d'un maître de l'écriture et de l'orchestre, l'oeuvre rejoint, par l'importance donnée au rythme, le genre néoclassique de Roussel. Mais on ne saurait dire que cette musique parle à l'auditeur, qu'elle l'émeut, qu'elle le bouleverse. En fait, elle ne laisse aucune impression précise et on peut être certain qu'il n'y aura pas de «reprise à la demande générale». On a d'ailleurs vu beaucoup de gens partir avant la fin. Mais il était intéressant de l'entendre au moins une fois, surtout que le chef invité et l'orchestre y avaient mis, de toute évidence, tout l'effort requis.

Le Magnard est repris demain, 10 h 30, aux «Matins symphoniques»; le reste du programme est différent.

Le concert débutait par le Prélude à l'après-midi d'un faune, de Debussy. L'OSM et son soliste à la flûte, Timothy Hutchins, connaissent cette oeuvre dans le détail, le chef invité connaît l'orchestre tout aussi bien, et le résultat fut irréprochable... jusqu'à la dernière reprise, marquée d'un très léger décalage chez les violons en divisi.

La violoncelliste américaine Alisa Weilerstein, entendue en récital à Lanaudière en 2009, nous revenait comme soliste du célèbre Concerto de Dvorak. Il ne fait aucun doute que cette musicienne de 30 ans sait jouer du violoncelle. Pourtant, son exécution fut médiocre: maniérismes se ramenant à de la fausse profondeur, légers écarts de justesse, rubatos et égarements où chef et sections durent improviser pour maintenir un discours cohérent.

Le public a été accueilli à l'entrée de la salle par le bruit absolument infernal d'un «party» qui se donnait de l'autre côté du corridor. On ne s'explique pas comment l'OSM, principal locataire de la Maison symphonique, tolère que son auditoire soit perturbé à ce point, juste avant un concert, par un simple voisin qui fait un tel tapage.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef invité: Stéphane Laforest. Soliste: Alisa Weilerstein, violoncelliste. Hier soir, Maison symphonique, Place des Arts. Série «Grands Concerts». (Reprise de la Symphonie no 4 de Magnard, dans un autre programme, demain, 10 h 30.)

Programme:

Prélude à l'après-midi d'un faune (1894) - Debussy

Concerto pour violoncelle et orchestre en si mineur, op. 104, B. 191 (1894-1895) - Dvorak

Symphonie no 4, en do dièse mineur, op. 21 (1911-1913) - Magnard