Ses chansons demandent du temps. Du temps pour les façonner à son goût et du temps pour que l'auditeur les apprivoise. Cinq ans après un premier album remarqué, David Marin propose son second. Qui n'est pas à la mode, mais tout de même dans l'air du temps.

Le nom de David Marin n'apparaît sur la pochette d'aucun des albums des Douze hommes rapaillés. Or, si Yves Lambert est rapidement devenu le treizième homme - pour occuper la place vite laissée vacante par Plume -, David Marin est à la fois le quatorzième, le quinzième et le seizième puisqu'il a remplacé tour à tour Michel Faubert, Vincent Vallières et Martin Léon.

Une chance inespérée

Chanter Miron a été «une chance inespérée», estime David Marin. «Tous ceux qui faisaient partie de ce show-là avaient beaucoup plus de millage que moi», illustre l'auteur-compositeur-interprète, qui a lancé son premier album en 2008, la même année que le premier des deux disques consacrés à Gaston Miron.

«Ç'a été nourrissant à tous points de vue», dit-il, évoquant ses discussions avec ses pairs dans le bus de tournée.

Il n'était toutefois pas en terrain totalement inconnu au sein de ce groupe. Louis-Jean Cormier, directeur musical du projet, avait réalisé À côté d'la track, son premier album solo, quelques mois plus tôt. David Marin lui a de nouveau confié les rênes de son deuxième disque, Le choix de l'embarras, à paraître la semaine prochaine, cinq ans après le premier.

Se donner du temps

Ce délai entre les deux disques n'a rien de préoccupant pour lui. «La musique, c'est la locomotive, mais ce n'est pas la seule chose qui m'intéresse», dit-il. David Marin a d'ailleurs concocté un scénario de sitcom qu'il aimerait voir un jour à la télé... Et s'il prend son temps, c'est qu'il juge que ses chansons en ont besoin.

«Quand tu te permets de faire des critiques - qui partent souvent d'autocritique, précise-t-il -, c'est dangereux d'aller trop vite et de tomber dans l'anecdote. Puisque c'est une chose qui m'intéresse, il faut que je prenne le temps.»

Un certain ras-le-bol traverse en effet Le choix de l'embarras. L'envie de «cracher en l'air» tout ce qu'il «avale de travers», comme il le dit dans Tunnel 2: un système économique «qui sodomise et dévalise le monde à la journée longue» ou ces jeunes qu'il a vu se faire donner des coups par la police lors des manifestations du printemps étudiant. «Il y a un minimum de respect qui n'a pas été présent dans ce conflit-là, juge-t-il, et je pense que c'est ce qui a choqué beaucoup de gens qui ne seraient pas sortis dans la rue autrement.»

Air du temps

Sa sensibilité aux vents qui soufflent sur l'air du temps ne fait pas de lui un chansonnier anarchiste ni même un protest singer. Ses préoccupations sociales s'inscrivent même tout naturellement dans des chansons folk-rock, soigneusement arrangées, dont la principale caractéristique est de chercher l'espoir. Une lumière au bout du tunnel, quand bien même ce ne serait que la flamme d'une chandelle. «J'essaie de dépeindre ce sentiment que d'autres partagent peut-être qui est de se sentir impuissant, mais de garder espoir. Pas juste d'être cynique», tranche-t-il. Cet espoir, le chansonnier le cultive dans des chansons plus sensibles qu'avant, parfois teintées de romantisme.

Cet espoir, c'est aussi celui d'un père qui chante pudiquement avec sa fille sur Étoile de mer et qui a une idée en tête: remonter «la côte qui mène au domaine du possible».