La chronique de société est l'une des grandes spécialités du maître Randy Newman, antistar du songwriting américain qui n'a jamais conquis le grand public malgré tant de critiques dithyrambiques depuis ses débuts - son premier album (homonyme) remonte à 1968.

Voici le 11e, donc, qui démarre sur l'opposition très américaine entre croyants et scientifiques: matière sombre, théorie de l'évolution et réchauffement de la planète sont tour à tour l'objet de débats hilarants, et ce n'est pas parce qu'on rit que c'est drôle.

L'auteur enchaîne sur le récit du projet avorté de l'invasion de la baie des Cochons, à Cuba, prétexte d'un hommage à la chanteuse Celia Cruz. Puis il dresse le portrait du conquérant Vladimir Poutine dans le contexte de la dernière élection présidentielle américaine; signe de touchantes chansons d'amour; évoque à sa manière le bluesman Sonny Boy Williamson, et ainsi de suite.

Arrangeur, orchestrateur, compositeur en plus d'être brillant parolier, Randy Newman demeure ici fidèle à ses amours musicales: impressionnisme français, Tin Pan Alley, songstil (Kurt Weill), Broadway (George Gershwin), jazz primitif, blues, Texas swing, gospel. Amalgame d'une autre époque... qui deviendra intemporel, osons la prédiction.

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CHANSON. Dark Matter. Randy Newman. Nonesuch.