Ludovick Bourgeois a présenté mardi soir au Théâtre Maisonneuve la première médiatique de sa grande tournée consacrée aux chansons des BB, dont son défunt père Patrick Bourgeois était le chanteur. Un spectacle joyeux comme le répertoire du groupe, touchant comme peut l’être l’hommage d’un fils à son père, mais un peu sage.

Belle idée que de faire revivre les très nombreux hits des BB, trio qui a dominé les palmarès de 1989 à 1996, le temps de trois albums marquants. Et qui de mieux que Ludovick Bourgeois pour les chanter, lui qui a hérité du même timbre de voix que son père, capable d’aller chercher les notes les plus hautes avec une aisance impressionnante.

La ressemblance est frappante, et quand il ouvre le spectacle avec Snob, alors que sur l’écran géant derrière lui on voit en synchro Patrick Bourgeois chanter la même chanson, l’effet est saisissant. Dommage que sa voix n’ait pas toujours réussi à se démarquer de l’orchestre, particulièrement en début de représentation. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles il a fallu un peu de temps avant que la soirée ne lève, les autres étant probablement le difficile public de première, un peu de nervosité de la part du chanteur et le fait que même avec six personnes sur scène, l’énergie folle des trois Beaux Blonds, qui irradie à travers les vidéos, est difficile à reproduire.

Reste que Ludovick Bourgeois met tout son cœur dans ce spectacle, et on le sent.

Il y a mis du soin aussi avec son équipe, en particulier dans les éclairages, une série de lumières DEL en forme de losange qui évoquent les années 1980, avec leurs couleurs criardes et leurs formes géométriques un peu froides.

De temps en temps, des vidéos d’archives défilent derrière le chanteur. On voit parfois le groupe, parfois des moments intimes en famille. Sur la chanson Le gamin, c’est particulièrement émouvant de voir Patrick Bourgeois animer une chorale d’enfants lors d’une fête, ou le mini Ludovick derrière sa batterie. Et le jeune trentenaire n’hésite pas à évoquer son père dans ses interventions, raconte une foule de détails sympathiques et d’anecdotes amusantes.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE

Ludovick Bourgeois

Mais il est là aussi pour chanter, et les chansons défilent à un rythme trépidant, arrangées dans le même esprit qu’à l’époque : après Snob ont suivi Cavalière, Twist de nuit, Parfums du passé, La sirène, La poupée qui fait non (une chanson qui jouait toujours chez lui quand il était petit, et que le groupe reprenait en spectacle) et Le gamin, des pièces tirées essentiellement des deux premiers albums des BB.

Mais il a fallu l’increvable T’es dans la lune pour que la salle se transforme enfin en karaoké géant – et même si les paroles n’étaient pas bien synchronisées avec la chanson, pas grave, le public les connaît de toute façon, alors tout le monde chante quand même ! Et la choriste Katerine Desrochers a refait à l’identique l’inoubliable solo du dernier pont, un grand moment de réjouissance, on doit l’avouer.

Ludovick Bourgeois a ensuite dédié une jolie chanson moins connue à sa mère, Je tends les bras, puis enchaîné avec Voyou, Soir de septembre et Là où l’amour m’attend, tirée de l’album solo de son père sorti en 1998. Mais c’est seulement après qu’il a remercié ses musiciens, son équipe, sa famille et les anciens collaborateurs des BB que l’ambiance a monté d’un cran, sur le hook imparable de Fais attention, puis avec Donne-moi ma chance, que tout le monde a chantée spontanément.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE

Le spectacle était présenté en première médiatique au Théâtre Maisonneuve.

Un des plus beaux moments de la soirée, alors qu’on a enfin pu sentir vibrer toutes les belles sensations encore suscitées par ces chansons écrites il y 35 ans. Après ce moment de bonheur pur, Ludovick Bourgeois a ensuite raconté sa dernière rencontre avec son père, quelques jours avant sa mort le 26 novembre 2017 à l’âge de 55 ans, pour introduire Seul au combat… Il était déjà difficile de ne pas craquer, mais avec son interprétation vraiment incarnée, qui s’est terminée avec la chorale d’enfants de l’originale, puis dans le noir avec sa voix seule, l’émotion était à son comble.

Lui-même a dû prendre une petite pause, a remercié les deux autres membres du groupe, François Jean, mort il y a un peu plus de trois ans, et Alain Lapointe, qui était là en pensée. Le spectacle s’est terminé avec Tu ne sauras jamais (autre grand moment de défoulement), puis Loulou, première chanson des BB sortie en 1989, qui résume à elle seule l’esprit d’un groupe qui ne s’est jamais pris au sérieux, et dont le souvenir, malgré la mort beaucoup trop jeune de deux de ses membres, est synonyme de légèreté et d’insouciance.

C’est tout un héritage que Ludovick Bourgeois a entre les mains, et il lui rend hommage avec dignité et sincérité, et surtout avec générosité. Ce témoignage d’amour qu’il partage avec le public reste un geste exceptionnel et rare : de l’amour partagé en ce moment, on n’en a pas trop.