Douze ans après Appellation d’origine contrôlée, La Bottine Souriante revient avec Domino !, un disque tout frais qui témoigne de l’énergie renouvelée du monumental groupe trad. Entretien à l’avant-veille de la rentrée montréalaise du groupe, qui lance sa tournée vendredi au Club Soda, à Montréal.

Le matin de notre entrevue dans un café du Plateau Mont-Royal, Olivier Salazar et David Boulanger avaient encore le son de leur première répétition qui leur résonnait dans les oreilles.

« C’est compliqué en hostie ! », nous avoue en riant Olivier Salazar quand on demande comment c’est de répéter quand notre groupe compte sur onze musiciens et trois techniciens de scène provenant d’un peu partout dans le sud du Québec. Son collègue Boulanger renchérit.

C’est de la job, mettons. Il faut huiler l’engrenage comme il faut, mais quand ça roule, ça va bien. Hier, dans la dernière heure, c’était vraiment le fun.

David Boulanger

Sur scène, le groupe promet de jouer au moins la moitié des excellents titres de Domino !. « On voit depuis des années ce qui fonctionne bien, on essaie de garder ces chansons-là dans notre spectacle, nous dit David Boulanger. Mais cette fois-ci, on a donné un ordre d’importance différent à certains classiques. On a ainsi cassé des blocs de chansons qu’on jouait ensemble depuis des années. »

On entend donc remplacer certaines chansons plus anciennes par des pièces neuves qui sont dans le même esprit. Autre nouveauté, le déroulement du spectacle sera le même d’une soirée à l’autre. « Les gens vont revenir nous voir comme on retourne au cinéma pour revoir un bon film », se plaît à comparer David Boulanger.

Petits nouveaux

Ce sera aussi l’occasion de voir sur scène la dernière itération de La Bottine, qui n’a cessé d’évoluer au fil de ses 47 ans d’histoire. Le shérif Robert Bob Ellis, au trombone basse, et le saxophoniste et arrangeur Jean Fréchette, tous deux arrivés au début des années 1990, sont désormais les gardiens de la tradition presque quinquagénaire.

C’est toutefois David Boulanger qui a pris les destinées du groupe en main, mais il est appuyé par un noyau créatif qui comprend entre autres le bassiste Mathieu Gagné et le pianiste Olivier Salazar, qui ont rejoint le groupe lanaudois il y a deux ans seulement. « Ça faisait quatre ans que j’attendais que les gars me rappellent, j’avais perdu espoir, nous dit en rigolant Olivier Salazar, qui est à 28 ans le cadet du groupe. Je vais toujours me souvenir de mon premier show avec La Bottine ; c’était en 2017 à Petit Rocher pour la fête des Acadiens. J’étais encore à l’université à l’époque et je me souviens que c’était le meilleur show que j’avais fait dans ma vie, le plus dynamique, le plus physique, c’était vraiment le party ! »

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Olivier Salazar et David Boulanger n’étaient pas nés quand La Bottine Souriante a lancé son premier album, en 1976. Ils sont désormais au cœur du noyau créatif du groupe fondé par Yves Lambert, André Marchand et Mario Forest.

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On promet la même énergie ce vendredi au Club Soda. « Il y a quelque chose [dans notre musique] qui touche tout le monde qui a envie d’embarquer, soutient David Boulanger. Le répertoire, l’énergie, le côté dansant, avec une touche moderne dans les structures sonores et dans les arrangements. »

Domino ! se veut justement un exercice où se mêlent à merveille tradition et modernité. Certaines pièces comme Les jolies Québécoises et La Wagine sont fidèles au répertoire traditionnel, d’autres comme Le bal chez Jos Brûlé ou Pour oublier sont des coups de chapeau aux grands Tex Lecor et Gilles Vigneault, alors que d’autres sont des morceaux de bravoure qui témoignent des influences diverses qui alimentent les membres du groupe.

Extrait du Bal chez Jos Brûlé

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C’est dans Paris, superbe chanson à répondre presque rock qui s’amorce avec la mélodie du bouzouki irlandais d’Éric Beaudry filtrée dans une pédale de distorsion, est certainement l’un des exemples les plus étonnants. « Éric n’est pas le même gars qu’il y a 20 ans, nous dit son collègue Boulanger, arrivé lui aussi dans le groupe au tournant du millénaire. Il s’est mis à tripper sur d’autres genres de sonorités, il les inclut maintenant dans le groupe. Comme nous tous, sa personnalité façonne celle du band, c’est naturel, ce qui se passe. »

Il faut reconnecter avec notre monde. Mais c’est qui ça, justement ? On a des fans bien au-delà du Québec, alors je me suis dit qu’on devrait aller parler avec des chums d’ailleurs pour faire des tounes avec eux.

David Boulanger

Outre la populaire percussionniste Mélissa Lavergne qui ajoute quelques touches exotiques à la recette, le disque comprend aussi des compositions de l’Italien Riccardo Tesi (Santiago) et de l’Irlandaise Sharon Shannon (Benji’s Rollicks), deux accordéonistes de talent, ainsi que du Suédois Erik Rydvall (Le petit Emil), grand interprète de nyckelharpa, un instrument médiéval cousin de la vielle à roue qui se joue avec archet. « On a choisi des chansons qui se prêtaient mieux à notre son, avec lesquelles on avait plus d’accointances sur le plan des styles », explique David Boulanger.

Au fait, est-ce difficile de continuer à innover quand on doit défendre l’héritage d’un groupe aussi mythique ? « On se sent parfois responsable de prendre quelque chose qui existe et d’avoir le devoir de le perpétuer, reconnaît le violoneux de 40 ans. Mais on fait de la musique aujourd’hui et on défend ça aussi, en plus de faire des chansons que les gens ont encore le goût d’entendre. Mais tu sais, on a nous-mêmes trippé à écouter ces chansons-là, à aller les voir en show ; aujourd’hui, on les fait sur le stage. On est à la fois fans et membres du groupe ! »

Quoi de mieux pour La Bottine, qui soulignera ses 50 ans en 2026. Car oui, David Boulanger planche déjà là-dessus. On vous en reparlera.

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