(Milan) Le légendaire pianiste et chef d’orchestre Daniel Barenboim a déploré mercredi le manque d’intérêt accordé selon lui par le monde politique à la culture qui « est restée à la traîne », dans une société où prévaut la recherche de progrès technologiques.

« Nous vivons dans une ère de grands progrès technologiques, d’intelligence artificielle, tout ça c’est très positif, mais la culture est restée à la traîne et les hommes politiques ne s’en rendent pas compte », a-t-il déclaré au cours d’une conférence de presse à la Scala de Milan.

Mercredi soir, le maestro âgé de 78 ans comptait célébrer son retour à la Scala, dont il fut le directeur musical de 2005 à 2014, mais le concert a été annulé à la dernière minute en raison d’un cas de suspicion de Covid-19 au sein de la Staatskapelle de Berlin qu’il dirige depuis trente ans.

Alors que Daniel Barenboim et l’orchestre de Berlin devaient interpréter mercredi et jeudi l’intégrale des symphonies de Johannes Brahms, le pianiste se produira finalement en soliste jeudi soir pour jouer les trois dernières sonates de Beethoven.

« Nous parlons du Zeitgeist, de l’esprit du temps, mais nous vivons une période où l’esprit fait défaut et c’est très dangereux », a-t-il fait valoir devant la presse.

« Quand on parle de culture, on parle de combien d’euros tel ou tel gouvernement donne à un orchestre symphonique ou un projet », a-t-il poursuivi. « Les gens ne s’intéressent pas à la culture, ils pensent qu’elle est réservée à une élite, ils n’ont jamais compris son importance ».

Le maestro israélo-argentin s’est dit « convaincu qu’il y a un manque d’éducation musicale dans le monde » et a proposé d’entamer, après la pandémie de coronavirus, « une réflexion sur l’avenir de la musique et de la culture en général ». La musique est « indispensable à l’équilibre humain », a-t-il insisté.

Il s’est dit « très ému » de son retour à la Scala dont il n’a « gardé que des souvenirs heureux ».

« Je disais toujours que je viens du seul pays d’Italie où l’on ne parle pas italien, l’Argentine, car ce sont les Italiens qui ont construit l’Argentine. Je me sentais comme à la maison ici », a-t-il raconté.

Interrogé sur la mort lundi à 77 ans du pianiste brésilien Nelson Freire, l’un des plus reconnus du monde, il a regretté la disparition d’« un être humain très exceptionnel ». « C’était un grand pianiste », a-t-il relevé.