Le bout du tunnel, c’est ainsi que Martha Wainwright envisage son album Love Will Be Reborn. Elle a mis ses nouvelles chansons dans les mains du réputé réalisateur Pierre Marchand, qui les a placées dans un écrin riche où la voix de la chanteuse se trouve bellement enveloppée.

Il faut remonter bien avant la pandémie pour trouver la source du plus récent disque de Martha Wainwright. Deux ans avant d’en amorcer l’enregistrement, en 2019, au Ursa, l’espace de diffusion créatif qu’elle a mis sur pied sur l’avenue du Parc, elle traversait une période sombre, marquée par un divorce. Pourtant, au milieu de tout ça, a émergé une phrase et une chanson : Love Will Be Reborn.

« Écrire cette chanson, en 2017, m’a beaucoup encouragée. J’étais tellement down. Que cette chanson-là sorte de moi, je l’ai vu comme un bon signe. C’est devenu une sorte d’hymne pour moi, raconte-t-elle, lors d’une escale à Montréal entre des concerts à Morin-Heights et Boston. Ça m’a tenue, ça m’a aidée à porter le regard vers des choses plus positives. Avec le temps, c’est ce qui est arrivé. »

Sa précieuse chanson donne le ton à son nouveau disque, traversé de pensées sombres, mais aussi porté vers l’espoir. Martha Wainwright n’a jamais été fleur bleue. Son plus récent disque ne l’est pas non plus. Elle n’a pas perdu son côté combatif. Seulement, Love Will Be Reborn, malgré les nuages qui passent, est aussi habité par une certaine douceur.

La touche de Pierre Marchand

Ça tient entre autres à la touche pop du réalisateur Pierre Marchand, qui a une histoire avec la famille de la chanteuse : il a travaillé avec sa mère et sa tante (sur Heartbeat Accelerating, des sœurs McGarrigle) et avec son frère Rufus (il était aux commandes de Poses). Martha avait déjà travaillé avec lui, elle aussi, mais jamais pour un album complet.

« On a toujours flirté ensemble musicalement », dit-elle, sans jamais se donner un vrai rendez-vous. Avec sa vie de mère (elle a deux enfants), la gestion d’Ursa et l’écriture de chansons, elle a vite pris conscience qu’elle ne pouvait pas en plus prendre en charge la réalisation de son nouveau disque. « J’avais besoin de mettre ça dans les mains d’une personne de confiance, qui pourrait guider le bateau et prendre des décisions sur le plan musical », dit-elle. Pierre Marchand s’est imposé.

« Je me disais que je méritais de collaborer avec quelqu’un qui saurait travailler avec ma voix », ajoute la chanteuse, qui est, en effet, connue pour son talent d’interprète. Elle joue ses chansons autant qu’elle les chante, mord dans les mots autant qu’elle les caresse. Et ça demeure vrai sur Love Will Be Reborn, où ses interprétations font preuve d’une superbe nuance qu’elle n’a pas toujours eue.

Quand je commence une chanson, je fais quelques accords sur une guitare et la mélodie de la voix vient d’une émotion. Souvent, c’est une phrase. Et là, je m’arrête et je me demande : pourquoi c’est ça qui sort ? Je creuse à partir de là et vois où ça va me mener.

Martha Wainwright

On entend toujours la chanteuse folk, des inflexions country, mais aussi ses racines jazz et, au fond, son énergie rock sur ce nouveau disque où les esthétiques se mélangent. « Je suis un peu caméléon », convient la chanteuse, qui ajoute avoir toujours pu imiter différents styles de musique avec sa voix. Ici, tout ça est parfaitement intégré, soudé dans des morceaux riches, mais empreint d’une légèreté qu’on lui a peu connue.

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Elle en donne le crédit à ses musiciens, des gars de Toronto habitués à plus de douceur, mais aussi à son parcours personnel. « J’ai dû me battre pour bien des choses, précise Martha Wainwright. En me battant, je suis devenue plus forte, moins insécure et plus moi-même. C’est ce qui amène cette légèreté. »

Du balcon à la ruelle

Martha Wainwright a été parmi les premières à offrir des chansons lorsque la pandémie a frappé. Dès mars 2020, elle a chanté sur le balcon de POP Montréal. Un geste qui lui était nécessaire, pour faire contrepoids à l’incertitude et à la peur ambiantes.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Martha Wainwright a chanté sur le balcon de POP Montréal, en mars 2020.

Le printemps dernier, Ursa a lancé des concerts dans la ruelle. Des prestations « pas bruyantes », qui ont fait le bonheur de la communauté, selon la musicienne, mais aussi irrité au moins un voisin. « On est en discussion avec la Ville parce que le zonage ne permet pas de concerts extérieurs à l’arrière dans la ruelle », dit-elle.

Les prochaines prestations seront « tolérées », précise-t-elle, mais elle cherche avec les autorités municipales une façon de pouvoir répéter l’expérience l’an prochain dans un cadre moins informel. « On va finir notre saison, conclut-elle, parce que c’est évident que la communauté aime beaucoup ça. »

Love Will Be Reborn

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Martha Wainwright

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