Les Allah-Las, dont un concert a été annulé à cause d'un possible projet d'attentat découvert in extremis par la police néerlandaise, ont conquis un public féru de rock psychédélique californien, mais sont constamment attaqués à cause de leur nom.

Les quatre musiciens incarnent l'esprit d'une Californie calme et cool, qu'ils célèbrent dans une musique bâtie autour des guitares. Le groupe de Los Angeles ne susciterait aucune controverse - et encore moins un incident international - s'il avait choisi un autre nom.

Mercredi soir à Rotterdam, leur concert a été annulé à la dernière minute après «une information concrète» de la police espagnole sur un projet d'attentat.

Les Allah-Las ont remercié la police, mais se sont refusés à tout autre commentaire.

Ils jouaient jeudi soir à Varsovie et devaient achever leur tournée européenne en France, vendredi au festival Rock en Seine de Saint-Cloud et samedi à Charleville-Mézières.

Depuis qu'ils ont gagné une certaine notoriété - le groupe a été fondé il y a 10 ans et est fort apprécié des publications consacrée à la musique indépendante - les Allah-Las ont toujours été sur la défensive par rapport à leur nom.

Certains musulmans fondamentalistes voient un blasphème dans l'association du nom de Dieu (Allah en arabe) à de la musique ou du divertissement.

Le groupe admet avoir reçu des plaintes, et a déjà dû annuler un concert en Turquie à cause de son patronyme, mais il insiste sur le fait qu'il ne pensait pas à mal, et encore moins à offenser.

Le chanteur et guitariste Miles Michaud a expliqué dans une récente interview que le nom était né de l'association d'Allah et de Shangri-La, une vallée imaginaire et mystique blottie dans l'Himalaya.

Shangri-La est «une sorte de clin d'oeil au kitsch californien» et «ironique», tandis qu'«Allah» devait refléter l'orientalisme qui a tellement imprégné la Californie selon le chanteur.

«Beaucoup d'architecture en Californie, tout comme l'urbanisme et les palmiers sont le fruit du mouvement orientaliste», affirme-t-il dans une interview au promoteur de concerts AXS.

«En plus, c'est musical. Allah-Las sonne comme une chanson», souligne-t-il.

Le groupe avait aussi laissé entendre que son nom était une forme d'hommage au groupe écossais alternatif The Jesus and Mary Chain, dont le tube Just Like Honey n'est pas sans rappeler le son des Californiens.

«Plus de mystère»

Le batteur Matthew Correia a pour sa part insisté sur l'importance de laisser planer un peu de mystère, en souvenir de la période pré-internet, quand tout ce que les fans avaient à se mettre sous la dent étaient les paroles, les quelques indices sur la pochette et peut-être les tuyaux d'un disquaire grincheux.

«Aujourd'hui, il n'y a plus de mystère», assène-t-il, sur le blogue musical Tomatrax.

Le groupe lui-même est baigné de la culture du disque vinyle, et ses membres se sont rencontrés alors qu'ils travaillaient pour Amoeba Music, un vaste disquaire sur le fameux Sunset Boulevard de Hollywood, et un des lieux favoris des audiophiles.

Même si les Allah-Las ont tous les attributs du garage rock, leur son possède clairement une tonalité californienne, avec des réminiscences de The Doors.

Ils ont également enregistré leur troisième et dernier album dans les Valentine Recording Studios, en utilisant des équipements sur lesquels avaient travaillé les Beach Boys.

Les noms controversés ne sont pas rares dans la musique. À la mi-juin, la Cour suprême des États-Unis a fait un grand saut sur le terrain miné du vocabulaire considéré raciste, en jugeant qu'un groupe de rock, The Slants («Les Bridés»), pouvait officiellement déposer son nom.