La Grande Dame de la chanson, Lucille Dumont, sera honorée ce soir à l'occasion du 25e anniversaire de la fondation du Chez-nous des artistes.

«La santé, ça va, mis à part des petites douleurs dans les articulations. C'est normal à mon âge...», lance-t-elle en entrevue à La Presse.

À 92 ans, Lucille Dumont ne chante plus, mais aime encore aller au théâtre et aux Grands Explorateurs. Elle s'est même découvert une nouvelle passion: l'opéra au cinéma. «J'adore allez entendre les opéras du Metropolitan Opera de New York retransmis dans nos salles de cinéma. On a des prises de vues remarquables et que dire du son!»

C'est en 1935, à l'âge de 16 ans, que Lucille Dumont a commencé sa carrière, avec la complicité de sa mère, à une époque où il n'était pas question de mener la vie d'artiste.

«Quand je suis passée à la radio la toute première fois, j'avais pris le pseudonyme de Micheline Lalonde, pour ne pas qu'on me reconnaisse, confie-t-elle. Ma soeur aînée, assez sévère, n'en savait rien. Ma mère s'est tournée vers elle: «Comment tu la trouves?» Ma soeur a répondu que la voix était jolie. Et ma mère d'ajouter: «C'est ta soeur.»»

Très vite, elle se fera entendre à la radio, avant d'apparaître à la télévision, où, dès l'ouverture du «canal 2» de Radio-Canada, elle animera la première émission de variétés, Le café des artistes. Cela lui aura épargné le monde du cabaret, qu'elle n'aimait pas.

«Quand il m'est arrivé d'en faire, c'est parce que j'étais fauchée. Je disais alors à mon agent de me trouver des dates. Mais personne ne nous écoutait dans la salle...»

Un métier difficile

D'autres auditoires sauront apprécier cette interprète de grand style qui, aux vaines gloires du palmarès, préférait défendre les chansons durables. C'était aussi elle qu'on appelait à l'étranger pour défendre les couleurs de la chanson d'ici.

Avec les années, comment voit-elle le métier de chanteur?

«Je pense qu'il faut être de son temps. Quand j'ai débuté, j'étais très influencée par Lucienne Boyer. Et mon mentor, Léo LeSieur, me poussait vers un répertoire plus convenable pour mon âge. Aujourd'hui, c'est aussi difficile qu'hier et il y a moins d'émissions de variétés. Quand je dirigeais l'Atelier, je n'ai jamais caché aux élèves les dures réalités qui les attendaient. Je les encourageais même à prévoir une profession pour les périodes creuses.»

Et les concours?

«C'est un peu cruel. Je n'ai moi-même participé qu'à un seul concours. Mais il n'en demeure pas moins que tout chanteur, gagnant ou pas, doit travailler très fort.»

Que retient-elle de sa vie artistique?

«L'enseignement, sans l'ombre d'un doute. J'ai aimé enseigner aux jeunes. Tellement que, lorsque j'ai cessé de donner mes cours, je me suis ennuyée durant des mois. C'était une passion.»

Ce soir, à la salle Pierre-Mercure, elle assistera à un spectacle mettant en scène 25 chanteurs, dont Jean-Pierre Ferland, Christine Chartrand, Michel Louvain et Diane Juster. C'est à Roger Sylvain que l'on doit l'initiative de cette soirée. C'est lui qui, le premier, poussa le maire Drapeau à trouver un terrain pour ériger l'immeuble du Chez-nous des artistes.

Les profits de la soirée permettront de poursuivre la mission de cette oeuvre.