Le temps fuit. Ou plutôt: Tempus fugit, comme le chantait si bien Yes.

Parlez-en aux membres de l'increvable groupe progressif, qui clôturait dimanche soir le Mondial choral de Laval.

Sans rien enlever à Gregory Charles et son super festival de la couronne nord, il y avait quelque chose de bizarre à voir la formation anglaise se produire dans un stationnement de Laval, à deux pas d'un centre commercial et d'un métro. Et, sans rien enlever à Laval non plus, on ne peut pas dire que ce grand espace de ciment était très favorable aux délires imaginaires, si typiques des pochettes des meilleurs disques de Yes.

Mais pour les fans purs et durs venus entendre leur groupe culte, le lieu était absolument sans importance. À 5$ le prix d'entrée, ce concert était pour eux une véritable aubaine. D'autant que Laval était la seule halte canadienne de Yes cet été - une «exclusivité» que Gregory Charles n'a pas manqué de claironner juste avant le spectacle, en soulignant qu'on était même venu de la Nouvelle-Angleterre pour assister au concert.

 

Forcément, on ne pouvait qu'en avoir pour notre argent. Et ce, même en l'absence (cruelle) du chanteur Jon Anderson, que le groupe semble avoir définitivement remplacé par le Montréalais Benoît David.

Recruté il y a deux ans, en raison de sa voix parfaitement identique à «l'originale», David s'en est plutôt bien tiré dans son rôle de clone, surtout qu'il s'agissait - sauf erreur - de son premier spectacle au Québec avec le combo britannique. Son allure de crooneur de bateau de croisière tranchait net avec le reste du band, plutôt chevelu. Mais il a eu la sage idée de rester effacé, à l'instar du jeune claviériste Oliver Wakeman, qui nous a fait grâce des sparages et des capes elfiques de son célèbre père Rick.

De fait, les véritables vedettes du spectacle étaient sans aucun doute le guitariste Steve Howe et le bassiste Chris Squire, derniers survivants du Yes de la belle époque. Même chauves, même grisonnants, les deux «vieux» ne se sont pas gênés pour prendre tout le plancher, tout particulièrement le famélique Steve Howe, qui a multiplié les solos de six cordes virtuoses, pour le plus grand plaisir d'un public vendu d'avance.

C'était, en ce qui nous concerne, la seule raison valable d'assister à ce concert-nostalgie où les classiques et les grands succès (Tempus Fugit, Yours Is No Disgrace, And You and I, Roundabout, Starship Trooper, Owner of a Lonely Heart) ont largement surclassé les chansons récentes (Onward). Comme tout bon groupe passé date, Yes a donné au public ce qu'il attendait. Rien de plus. Rien de moins.

Ça valait bien 5$.

Blanc sur blanc

Petit mot sur la grande finale Beatles, présentée sur la grande scène du Mondial choral, en première partie de Yes. Que dire, sinon que Gregory Charles, Marc Déry, Sylvain Cossette et Jean-François Breau n'avaient pas choisi le plus facile pour conclure leur exploit digne du livre Guinness des records. Rappelons que les quatre chanteurs s'étaient donné pour mission de reprendre toute l'oeuvre des Fab Four à la virgule près, et que leur mission s'achevait dimanche avec l'Album blanc, de loin le moins aimable des disques des Beatles.

On pourrait dire que les gars s'en sont bien sortis. Qu'ils ont «livré la marchandise». Qu'ils ont courageusement interprété les 30 chansons du White Album - y compris l'inaudible Revolution #9 et d'autres chansons moins connues comme Piggies, Savoy Truffle ou Birthday.

Mais la vérité, c'est qu'il est assez difficile de critiquer un tel exercice. Prise hors contexte (nous n'avions pas vu les concerts précédents), l'affaire ressemblait surtout à un gros trip spontané entre amis, où les gaffes passaient aussi bien que les bons coups.

Finalement, c'est peut-être plus l'idée de la chose qui était séduisante, que la chose elle-même. Mais quelle idée!

Selon un communiqué publié hier, le Mondial choral aurait attiré près de 400 000 spectateurs en 10 jours, du 17 au 27 juin. Une septième présentation est d'ores et déjà assurée et les dates seront diffusées ultérieurement.

Sur un parking. À Laval. Yessss!