Ne cherchez pas de vrais motards dans ce roman ni une quelconque concordance avec les évènements réels qui ont valu à Montréal son surnom de « Chicago du Nord », au milieu des années 1990. L’auteur nous avertit dès la page de garde que son livre est une interprétation très libre de la guerre des motards dont la métropole a été l’épicentre.

En 1996, lorsque le gangster Marc Hamel est libéré de prison après un procès avorté, les motards s’organisent pour conclure des alliances stratégiques et conquérir de nouveaux marchés pour la revente de drogue.

Owen Hayden est enquêteur au sein de l’escouade antigang du SPCUM, l’ancienne appellation du Service de police de la Ville de Montréal ; son frère, Tom, est le numéro deux de la branche montréalaise des Hells Angels. Deux frères, deux destins ; des décennies qu’ils ne se sont pas adressé la parole.

Pendant que les Hells Angels cherchent à se rapprocher des Siciliens et à affaiblir les Rock Machine, notamment en tuant leur chef, l’escouade antigang s’allie à l’escouade antimafia pour constituer une puissante force de frappe et intimider les motards, tout en multipliant les descentes dans les bars.

D’un autre côté, l’amoureuse d’Owen Hayden, procureure responsable de la mise sur pied d’une nouvelle loi antigang, devient elle-même une cible lorsque les motards la mettent sur leur liste noire. C’est le début d’une guerre sur plusieurs fronts, y compris entre le SPCUM et la SQ, dont la crédibilité est minée par le suicide d’un enquêteur corrompu.

Tous ces évènements s’entremêlent habilement dans un polar au rythme trépidant. L’auteur (qui est lauréat de plusieurs prix pour ses romans policiers) a réussi en outre à dépeindre le sentiment de toute-puissance qu’avaient les motards à l’époque ainsi que les dissensions au sein même des forces policières, en plus de greffer à l’intrigue des personnages complexes et fort intéressants – à commencer par son héros, l’enquêteur Owen Hayden, qui se trouve à un tournant de sa vie lorsque tout se met à exploser.

Requiem américain n’est peut-être qu’un bref chapitre dans une guerre qui est loin d’être terminée lorsqu’on aura tourné la dernière page, mais l’auteur a su se servir du contexte enflammé de l’époque pour construire un roman policier haletant et résolument montréalais, dont on appréciera indéniablement les nombreuses couches.

Requiem américain

Requiem américain

Flammarion Québec

320 pages

7,5/10