Le zoblazo, un style pop dont Frederic Ehui Desiré alias Meiway revendique la paternité, se démarque de la scène musicale de son pays. Effectivement, cette musique de variétés a peu à voir avec les folklores actualisés que l'on connaît de la Côte d'Ivoire depuis les années 80. Et vraiment rien à voir avec le roots reggae rock des compatriotes Tiken Jah Fakoly et Alpha Blondy.

Depuis deux décennies, Meiway a mis au point cette musique de variétés, très populaire dans son pays, sur le continent noir ainsi qu'au sein de la diaspora ouest-africaine. En Afrique, en Europe comme en Amérique, Meiway tourne régulièrement et remplit ses salles.  Et Montréal ne fait pas exeption à ses itinéraires.

« Je fais une musique d'ambiance qui se danse, résume-t-il. Quelques-uns dans mon pays font aussi cette musique comme  Malou Amlé et Chantal Taïba. D'autres reprennent le style sans le nommer ou même le rebaptisent. En ce sens, je pense être le père de la musique populaire contemporaine ivoirienne. »

Rien de moins ! Trêve d'humilité, le chanteur populaire dit avoir d'abord créé le zoblazo à partir d'influences traditionnelles ivoiriennes. Un premier album fut lancé en 1989, Ayibebou, après quoi Meiway est devenu une star africaine avec la sortie de 200% Zoblazo en 1991. Avec une douzaine d'albums à son actif, il enregistre et vit en France depuis ses débuts professionnels, bien qu'il passe chaque année plusieurs mois en Côte d'Ivoire, sa «base» et «source d'inspiration».

« J'ai voulu cette musique très moderne par rapport à ma génération qui a émergé avec les ordinateurs et les  synthétiseurs. J'ai voulu faire un mélange et prendre un peu d'avance sur la mondialisation. Dès mon premier album, j'ai voulu faire une musique très métisse. Métisse dans le contexte de la Côte d'Ivoire, mais aussi dans le contexte africain en général », explique le chanteur, auteur, compositeur , réalisateur, producteur, redoutable entrepreneur issu de l'ethnie appolo (ou znema).

Effectivement, les cultures musicales de Côte d'Ivoire ne sont pas les matériaux exclusifs du zoblazo de Meiway, dont le nom d'artiste s'inspire de l'expression «my way», mon chemin.

« Partout où je passe, indique-t-il en ce sens, je ne me prive pas de m'inspirer des sonorités qui me plaisent. Je n'ai pas de limites : highlife du Ghana, makossa du Cameroun, Rumba du Congo, mblalax du Sénégal, musique mandingue du Mali ou musique zouloue d'Afrique du Sud.  Puisque mon rêve est de voir une Afrique unie, je veux en donner l'exemple à travers ma musique. »

Lorsqu'on évoque la présence possible de souches musicales antillaises dans le zoblazo tels le ou le zouk, il corrobore et ajoute : « J'ai toujours voulu que ma musique soit métisse à la base. Ne soyez donc pas surpris d'entendre des sonorités antillaises qui sont toutes d'origine africaine. »

Le zoblazo, rappelle par ailleurs Meiway aux profanes de son style, se danse avec un mouchoir blanc.

« C'est pour moi un signe de pureté, de joie, de paix. Quand on vient d'un pays comme la Côte d'Ivoire qui a connu des moments très difficiles,  il m'apparaît tout à fait légitime de prôner la paix. Nous, les artistes, pouvons donner l'exemple en ce sens. Il faut profiter de notre position d'artiste pour faire passer un message de paix et d'unité.  Et faire avancer les choses, particulièrement en Afrique. »

Puisqu'on en parle, quelle fut la position de Meiway dans ce violent conflit qui a secoué la Côte d'Ivoire au cours de la dernière décennie ? Motus et bouche cousue, avec justification à la clé :

« Il n'y a aucun intérêt pour un artiste d'afficher ses positions politiques, tranche le chanteur. Parce qu'il des fans à gauche, à droite, au nord ou au sud du pays.  Par respect pour son public, ses choix politiques doivent rester dans l'urne. Bien sûr, nous sommes aussi des citoyens, des patriotes, nous avons tous le droit d'avoir une opinion politique mais... par respect pour nos fans, mieux vaut ne rien afficher. Notre mission est de réunir et non de diviser. »

Dans le cadre des concerts gratuits offerts par les Nuits d'Afrique, Meiway et son Zo Gang se produiront ce jeudi, 21h30, sur la scène du Parterre du Quartier des Spectacles.