Déferlante de musiques, vidéos, installations, immersions prévues du 1er au 5 mai : le 14e festival Elektra réunit 40 artistes internationaux et locaux se consacrant aux arts numériques. Alain Thibault, compositeur, fondateur et directeur artistique d'Elektra, résume l'esprit de cette 14e présentation.

«Nous avons choisi de privilégier le thème anti/matière parce que nous voulions présenter des pièces représentant tout le contraire de ce à quoi on s'attend normalement à Elektra. Depuis ses débuts, le festival couvre les arts numériques visuels-sonores, c'est-à-dire un corpus ou une matière plus ou moins abstraite, non narrative. Or, dans chaque soirée, des éléments des oeuvres présentées seront figuratifs, narratifs, comportant des rythmes réguliers, etc. Bien sûr, les nouvelles technologies numériques en demeureront les outils de création. Et n'iront pas toujours à contresens; il s'agit plutôt d'un mélange.»

Jeudi, vendredi et samedi, l'Usine C sera le centre nerveux d'Elektra. On y présentera une dizaine de performances audiovisuelles, toutes des premières se déclinant sur le thème anti/matière. Elektra se déploie également au Centre PHI, à la Cinémathèque québécoise, au Goethe-Institut, à la Société des arts technologiques, au Centre des arts actuels SKOL, à OBORO, chez Occurrence, au Matralab de l'Université Concordia, à l'Écomusée du fier monde et à la maison de la culture Pointe-aux-Trembles.



Quatre choix d'Alain Thibault


Jeudi, 2 mai, 21h, Usine C : Mondkopf

Projet mené par le musicien français Mondkopf et le studio de design graphique Trafik, Eclipse est une performance audiovisuelle reconstituant le spectacle d'une éclipse solaire. Il s'agit aussi d'une évocation du docteur ès ambient, Brian Eno, en particulier son album Apollo: Atmospheres and Soundtracks, bande originale composée en 1983 pour le documentaire For All Mankind. «Servie par une palette chromatique restreinte, la matière visuelle d'Eclipse - entre étincelles organiques et abstractions géométriques - vient compléter, dans la plus pure synchronicité, les productions répétitives et envoûtantes de Mondkopf», peut-on lire sur le site d'Elektra. «On y trouve donc autant une dimension abstraite qu'un côté narratif, complète Alain Thibault. Tu vis ce qu'est une éclipse mais il y a aussi une dimension abstraite dans cette oeuvre. Ça s'inscrit tout à fait dans notre thématique. Ce projet, il faut dire, a été notamment présenté à la Cité de la musique à Paris. Ça a récolté un gros succès.»

ATOMTM , vendredi, 21h, Usine C

Pointure de la scène électronique, très connu des fans montréalais sur ce territoire sonore, l'Allemand et résidant du Chili ATOMTM, Uwe Schmidt de son vrai nom et aussi connu sous moult pseudonymes dont le divertissant Senor Coconut, proposera la version audiovisuelle de l'album HD. Sous étiquette Raster-Noton, cet enregistrement puise dans la musique électronique des années 70 et 80, dans la pop culture en général mais aussi dans une techno contemporaine dont ATOMTM a le secret.  Le patron d'Elektra en pense beaucoup de bien: «Notamment parce qu'il s'agit d'un commentaire sur l'esthétique musicale kraftwerkienne (années 70-80), doublé d'un propos politique très critique. Cette musique de Atom Heart sera bien sûr présentée avec dimension visuelle. Le propos est clair, balisé, donc un peu à contre-courant de l'idée qu'on se fait de notre festival.»

Artistes du label japonais ATAK, samedi, 21h, Usine C

«Le programme principal de samedi est entièrement japonais, ceux qui dirigent le label ATAK, musiques plutôt abstraites avec visuel, le tout coiffé par un set techno pour plancher de danse avec des sonorités plus expérimentales que tu n'as pas normalement dans la techno», souligne Alain Thibault. De Tokyo, ATAK se définit comme une étiquette de musique électronique, mais également comme un collectif de créateurs issus du design, de la vidéo et des technologies. En pleine ascension au Japon, Evala suggère la performance audiovisuelle Re: TTM & Acoustic Bend Stereo Live Version. Au même programme, l'oeuvre Massive Data Flow de Keiichiro Shibuya suggère un amalgame de sons générés par des algorithmes et des équations extirpées de concepts scientifiques, résultat des recherches de Takashi Ikegami, proche collaborateur de Shibuya. En fin de soirée, ce dernier fera équipe avec Evala pour un ATAK Dancehall des plus frétillants.

Helix, oeuvre multimédia de Jean Piché, présentée du 2 au 26 mai, Cinémathèque québécoise.

Du compositeur Jean Piché, Helix est une oeuvre audiovisuelle explorant la technique de mapping vidéo, dite volumétrique, c'est-à-dire qu'elle s'adapte à des surfaces de projection en trois dimensions. Celle qui nous occupe a été mise au point par le Laboratoire Vision3D de l'Université de Montréal - dirigé par Sébastien Roy, professeur au département d'informatique et de recherche opérationnelle de la Faculté des arts et des sciences de l'Université de Montréal. Ainsi, les images seront projetée sur un écran en torsade, fixé au plancher et au plafond et donc en apparente apesanteur. Le spectateur pourra circuler autour et en observer le contenu sous plusieurs angles. Alain Thibault commente: «Super belle pièce, super beau contenu musical avec contrôle de l'information et de l'image. Encore mieux: c'est gratuit et présenté pendant tout le mois de mai.»