(New York) Le procès de la star américaine déchue du R & B, R. Kelly, poursuivie dans plusieurs affaires pour de multiples abus sexuels, a démarré lundi avec la sélection des jurés devant le tribunal fédéral de Brooklyn.

Le chanteur de 54 ans, dont les agissements avaient été dénoncés depuis longtemps, mais qui avait été acquitté en 2008 lors d’un procès pour pédopornographie, était présent dans la salle d’audience, stoïque dans un costume bleu marine.

En détention provisoire dans une prison fédérale de Brooklyn, l’interprète d’« I believe I can fly », vainqueur de trois Grammy Awards en 1998 avec ce tube, doit notamment être jugé pour extorsion, exploitation sexuelle de mineure, enlèvement, corruption et travail forcé, sur une période allant de 1994 à 2018. Il a plaidé non coupable de toutes les charges.

Interrogé par l’AFP en arrivant au tribunal, l’un de ses avocats, Deveraux Cannick, n’a pas souhaité faire de commentaires, se bornant à dire qu’il s’agissait d’« un lundi comme les autres ».

L’acte d’accusation détaille des faits sordides : R. Kelly dirigeait un réseau qui recrutait et préparait des jeunes filles à avoir des relations sexuelles avec lui, les enfermant dans leurs chambres d’hôtel quand il était en tournée, leur demandant de porter des vêtements amples quand elles n’étaient pas avec lui, de « garder la tête basse » et de l’appeler « papa » (« daddy »).

Au tribunal, le chanteur est accusé d’avoir abusé de six femmes, dont des mineures, dont l’identité n’a pas été révélée.

L’ombre d’Aaliyah

La sélection des jurés devait se poursuivre mardi et aboutir à un jury de douze titulaires et six suppléants, lesquels auront pour obligation de ne rien lire du procès ni d’en discuter avec quiconque, et seront escortés chaque jour pendant toute la durée des débats.  

Lundi, 18 jurés potentiels ont été écartés, certains se disant ou laissant entendre qu’ils seraient incapables de croire à l’innocence de R. Kelly.

Les jurés potentiels portaient tous un masque, mais n’ont pas été interrogés sur leur vaccination, alors que des mesures sont actuellement prises dans l’État de New York pour imposer une protection vaccinale aux fonctionnaires, aux soignants, mais aussi pour diverses activités intérieures (restaurants, salles de gym).

De manière inhabituelle pour un procès médiatique, les médias et le public se voient obligés d’y assister par vidéo, dans d’autres salles, d’où il sera difficile, voire impossible, d’apercevoir les d’éventuels éléments de preuves quand ils seront présentés au jury.  

Le procès rentrera dans le vif du sujet à partir du 18 août, avec les premiers témoignages. Il pourrait durer quatre semaines ou plus.

Pendant plus de 25 ans, le chanteur originaire de Chicago à la voix teintée d’influences gospel et aux textes ou aux postures hyper-sexualisés, a nourri les soupçons d’abus, notamment parce qu’il s’entourait de très jeunes filles.

Malgré les accusations, des règlements à l’amiable, et un procès en 2008 qui s’est terminé par un acquittement, il a conservé une solide base de fans et a continué de faire carrière.

Ce n’est qu’en janvier 2019, lors de la sortie de la série documentaire « Surviving R. Kelly », que l’étau judiciaire s’est vraiment resserré. Désormais, le chanteur est inculpé dans quatre procédures instruites dans trois États différents (Illinois, New York, Minnesota).

Si l’identité des victimes au procès de New York est gardée secrète, beaucoup considèrent que l’une d’entre elles est la chanteuse Aaliyah, décédée il y a bientôt tout juste 20 ans, en août 2001 dans un écrasement d’avion, à 22 ans.

L’acte d’accusation reproche en effet à R. Kelly d’avoir corrompu un fonctionnaire de l’État de l’Illinois en 1994 pour obtenir de faux documents et épouser une mineure. Une accusation qui renvoie au mariage, finalement annulé, du chanteur avec la jeune étoile du R & B. Elle avait alors 15 ans.