Patrick Coutu revient en force exposer ses dernières créations chez Blouin Division. Un artiste au sommet de son art avec des œuvres diversifiées sur le thème de l’environnement, des photographies marines, des peintures sur papier et des sculptures variées. Un éventail stupéfiant accompagné, dans la galerie, d’une exposition somptueuse de Myriam Dion. Tout un déploiement à Griffintown !

Le dernier solo de Patrick Coutu dans l’édifice d’Arsenal remontait à 2015. L’artiste montréalais de 47 ans avait exposé ses récifs découlant de sa passion pour les mathématiques et pour les phénomènes géologiques que sont la sédimentation et la cristallisation. Ces dernières années, il a poursuivi sa représentation de la vie, délaissant les maths, mais se consacrant toujours à l’univers minéral.

Il a ainsi photographié des paysages marins du golfe du Saint-Laurent ou encore travaillé, au sol, de grands pans de papier froissé sur lesquels il laissait couler des pigments. Une façon de parler, car la démarche est bien plus corsée qu’il n’y paraît !

PHOTO PAUL LITHERLAND, FOURNIE PAR LA GALERIE

Méandres 11-21-2, 2021, pigment et acrylique sur papier marouflé sur panneau Dibond, 63 po x 47 po

Ces œuvres quasi sculpturales qui en découlent, Méandres, ont un aspect de roche sédimentaire ou de relief géologique, avec lacs, ruisseaux et canyons. Un effet qui rappelle des travaux précédents de Patrick Coutu. Pour d’autres œuvres, le travail horizontal est répété sur tissu et s’accompagne d’une réaction chimique qui crée des taches cellulaires du plus bel effet, comme dans l’œuvre Solis. Ou génère une réaction physique quand l’artiste combine oxyde de fer et aimants, par exemple dans Traction.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Patrick Coutu parmi ses œuvres

La partie la plus spectaculaire de l’expo est toutefois l’arrangement de six sculptures sur de hauts socles et sous un éclairage adouci de calibre muséal. Des sculptures constituées d’un assemblage d’objets en plastique – on reconnaît un tube de silicone et une bouteille de shampooing ! – qui ont été pulvérisés avec un mélange de ciment de gypse, de silice, de minéraux et d’émaux. « Des coraux anthropocènes », dit l’artiste.

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À gauche, Attractions, 2020, matériaux mixtes sur tissu, et, à droite, la sculpture Muselée, 2022

Les sculptures ont en effet l’aspect du corail façonné par la nature océanique. Elles semblent vivantes, encore caressées par les courants marins. En les observant de près, on discerne des stries de croissance comme celles des madréporaires. Et des gouttelettes colorées, comme pétrifiées dans le sens du flux marin. De loin, les sculptures ont des airs romantiques, comme Furie, inspirée du Roland furieux (1867), de Jean Bernard Duseigneur, exposée au Louvre. D’autres évoquent la Victoire de Samothrace, le Radeau de la Méduse ou l’affreuse bestiole Alien d’Hans Ruedi Giger !

  • Furie, 2022, plastique, ciment de gypse, silice, minéraux et émaux, 25 3/4 po x 36 1/4 po x 20 3/4 po

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    Furie, 2022, plastique, ciment de gypse, silice, minéraux et émaux, 25 3/4 po x 36 1/4 po x 20 3/4 po

  • Rafale, 2022, nickel sur bronze, socle de calcaire Saint-Jacques, 40 po x 19 1/2 po x 18 1/2 po. Elle représente un jet d’eau figé.

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    Rafale, 2022, nickel sur bronze, socle de calcaire Saint-Jacques, 40 po x 19 1/2 po x 18 1/2 po. Elle représente un jet d’eau figé.

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Au contraire de Damian Hirst, avec ses immenses et outrancières sculptures « maritimes » présentées à la Biennale de Venise en 2017, il n’y a pas d’effet Disney dans les sculptures de Patrick Coutu, qui privilégie la délicatesse au bling-bling. On ne parle pas d’une fiction à l’eau de rose comme chez Hirst, on parle de pollution des mers et des cours d’eau, de recyclage mal organisé, de préoccupations actuelles insuffisamment partagées et prises en compte. Un art qui capte l’air du temps.

Patrick Coutu a aussi rendu hommage à Frank Lloyd Wright (1867-1959) avec une sculpture-fontaine, Fontaine franche, constituée d’éléments en porcelaine au motif de style néo-maya comme ceux de l’architecte américain. De petits cubes remplis de mousse, l’eau s’écoule doucement jusqu’à un réservoir qui entoure la base de l’œuvre. Un défi technique et un concept sur la force de la nature l’emportant sur l’orgueil humain. Un fantasme de tour de Babel. Une œuvre tropicale, un peu bancale, comme notre monde, dans laquelle on reconnaît un robot statufié. C’est tout dire ! Encore une fois, un langage réfléchi, méthodique et évocateur, la signature de Patrick Coutu.

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À gauche, Solis, et à droite, Fontaine franche

La galerie présente aussi dans sa salle du fond une éblouissante exposition de Myriam Dion, Jardins. Réputée pour ses créations délicates et narratives en papier découpé, l’artiste de 33 ans revient, elle aussi, avec des œuvres sur le thème de la nature, notamment une série comprenant du tissage et du découpage de papier japonais peint et dessiné. Il faut admirer, de près, la qualité de ce travail de fourmi. Fabuleux !

  • Détail de l’œuvre Tracé 2 de Myriam Dion

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Détail de l’œuvre Tracé 2 de Myriam Dion

  • Tracé 2, 2022, Myriam Dion, aquarelle, gouache et dessin sur papier japonais, tissage de papier et découpe de papier au couteau X-Acto, 25 1/8 po x 39 po

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    Tracé 2, 2022, Myriam Dion, aquarelle, gouache et dessin sur papier japonais, tissage de papier et découpe de papier au couteau X-Acto, 25 1/8 po x 39 po

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Patrick Coutu et Myriam Dion à la galerie Blouin Division, jusqu’au 7 janvier.

Consultez le site de l’exposition