Le musée McCord présente depuis vendredi dernier une exposition centrée sur le photographe d’origine écossaise Alexander Henderson. Une plongée inédite dans l’œuvre d’un artiste méconnu du grand public, qui a capté toute la splendeur des paysages canadiens.

Il s’agit de la première exposition d’envergure consacrée au photographe, qui s’accompagne de la publication d’un ouvrage comprenant sa biographie et 170 reproductions fidèles aux tirages d’époque.

« Cette exposition se trouve au cœur de nos célébrations du centenaire du musée », s’est félicitée Suzanne Sauvage, présidente et cheffe de la direction du musée McCord.

[L’exposition] vient reconnaître le travail de l’un des plus importants photographes de paysages au Canada.

Suzanne Sauvage

Le nom d’Alexander Henderson demeure une référence pour les historiens de la photographie, mais un rappel biographique s’impose pour les non-initiés. Né en Écosse en 1831, issu de la petite bourgeoisie terrienne, Henderson émigre à Montréal en 1855, où il habitera jusqu’à la fin de sa vie.

Le succès de ses premiers tirages le conduit à abandonner son métier de marchand commissionnaire pour ouvrir un studio de photographie, puis à sillonner les grands espaces du Québec et l’ouest du Canada pour saisir le charme de leurs paysages naturels. En plus de quelques rares tirages originaux, l’exposition présente plus de 250 reproductions des photographies d’Alexander Henderson, provenant essentiellement du fonds accumulé par le musée McCord au fil des années.

La nature canadienne en images

Excepté les quelques portraits réalisés par l’artiste, la majorité des œuvres présentées montrent des paysages naturels. Au cours de ses nombreux voyages, Henderson s’est rendu dans les principaux centres de villégiature du Québec et de l’Ontario, parcourant le plus souvent en canot d’écorce les rivières Blanche, Rouge, du Lièvre et d’autres cours d’eau réputés de l’est du pays.

  • Si les tirages originaux sont tous de petit format, certaines photos ont été agrandies et projetées sur de larges écrans. Photo principale : rivière Causapscal au pont du chemin de fer Intercolonial, au Québec, vers 1875.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Si les tirages originaux sont tous de petit format, certaines photos ont été agrandies et projetées sur de larges écrans. Photo principale : rivière Causapscal au pont du chemin de fer Intercolonial, au Québec, vers 1875.

  • Les paysages maritimes font partie intégrante de l’œuvre photographique d’Alexander Henderson.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Les paysages maritimes font partie intégrante de l’œuvre photographique d’Alexander Henderson.

  • Les tirages d’époque utilisent le tirage par albumine, premier procédé commercialement exploitable de conversion des négatifs apparu au milieu du XIXe siècle.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Les tirages d’époque utilisent le tirage par albumine, premier procédé commercialement exploitable de conversion des négatifs apparu au milieu du XIXsiècle.

  • L’œuvre d’Henderson raconte aussi le Montréal hivernal d’autrefois : ici le découpage de la glace sur le fleuve Saint-Laurent…

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    L’œuvre d’Henderson raconte aussi le Montréal hivernal d’autrefois : ici le découpage de la glace sur le fleuve Saint-Laurent…

  • … là, le déneigement d’une route sur le chemin Lower Lachine (aujourd’hui boulevard LaSalle).

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    … là, le déneigement d’une route sur le chemin Lower Lachine (aujourd’hui boulevard LaSalle).

  • L’imagerie coloniale est omniprésente dans les photos des peuples autochtones prises par Henderson.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    L’imagerie coloniale est omniprésente dans les photos des peuples autochtones prises par Henderson.

  • L’exposition s’achève sur une projection grand format de 30 photos d’Alexander Henderson en léger mouvement sur un fond musical.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    L’exposition s’achève sur une projection grand format de 30 photos d’Alexander Henderson en léger mouvement sur un fond musical.

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Henderson est surtout un photographe de l’hiver, qui a transporté son matériel dans des conditions difficiles pour capter des vues hivernales à la profondeur saisissante. Les visiteurs pourront ainsi admirer le gel des chutes Montmorency et du Niagara, les embâcles sur le fleuve Saint-Laurent ou le mont Royal couvert de givre. Quelques photos permettent aussi d’admirer le centre urbain de Montréal et le parcours du chemin de fer canadien du Pacifique, pour lequel Henderson a travaillé à la fin de sa carrière.

Un photographe à la fibre artistique reconnue

Les photographies sont marquées par une grande maîtrise du cadrage, de la composition et de la lumière, Henderson allant jusqu’à ajouter des nuages au moment du tirage pour compenser la pâleur des ciels causée par le matériel photographique de l’époque.

Il est aussi beaucoup question de la dimension artistique de son œuvre, explique Hélène Samson, commissaire de l’exposition

Ce n’est pas seulement quelqu’un qui prend des photographies pour documenter ses souvenirs et ses voyages. Il y a chez lui une volonté de faire des œuvres d’art.

Hélène Samson

Alexander Henderson a notamment participé à la création de l’Art Association of Montreal, à laquelle succédera le Musée des beaux-arts de Montréal, contribuant dès les années 1860 à la reconnaissance artistique de la photographie.

Son style emprunte tantôt au romantisme, exprimant une fascination devant les beautés de la nature, tantôt au pittoresque, restituant l’impression de scènes prises sur le vif. Il a ainsi photographié des communautés de pêcheurs et de nombreux peuples autochtones, exprimant face à ces derniers un intérêt « exotique », qui traduit le regard colonial de la société canadienne de l’époque sur des communautés perçues comme vouées à disparaître.

À la fin de l’exposition, des photographies d’Henderson sont projetées en grand format. La conclusion tout en douceur d’une exposition marquée par la découverte. « On espère que les Québécois et les Québécoises auront un nouveau photographe dans leur univers », résume Hélène Samson. Gageons qu’avec cette exposition, l’œuvre d’Alexander Henderson et les paysages du Québec seront reconnus à leur juste valeur.

L’exposition Alexander Henderson — Art et nature est présentée au musée McCord du 10 juin 2022 au 16 avril 2023.

Consultez le site du musée

Le Musée McCord deviendra McCord Stewart

La fermeture du musée Stewart en février 2021 et le rapatriement des collections au musée McCord entraîneront un changement de nom dans ce musée de la rue Sherbrooke. À partir du 21 août prochain, le musée McCord portera la double appellation : McCord Stewart. La collection Stewart rassemble notamment 27 000 objets, documents d’archives et livres rares liés à la présence européenne en Nouvelle-France et en Amérique du Nord.