Quand on aime les estampes, leur lumière, la délicatesse des dessins, on se met à rêver… d’en faire ! Mais quand on n’est pas artiste, est-ce possible ? Oui ! La Presse a participé, avec d’autres néophytes, à un cours d’estampe avec le graveur Michel Dupont, dans son atelier de Frelighsburg.

Les ateliers de Michel Dupont sont organisés les fins de semaine, 15 heures réparties sur deux jours. Le graveur accueille quatre ou cinq personnes par atelier afin d’être suffisamment disponible pour chaque personne. « J’en ai fait deux fois avec six personnes, mais je ne pouvais pas refuser, car c’était chaque fois un groupe d’hommes d’affaires du Midwest américain qui ne venait pas pour la création, mais pour la thérapie ! », dit-il.

Il est vrai que ce cours de gravure contemporaine va au-delà d’apprendre une technique artistique. On en ressort revigoré. Michel Dupont y est pour beaucoup. Son enseignement se fait en douceur, en tout respect et avec un sérieux mêlé d’ouverture aux capacités de chacun. « Tout le monde est capable de créer, dit-il. Il faut juste ne pas stresser, se laisser aller. C’est la même chose pour un artiste professionnel. »

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Une estampe de Rosie Godbout

Comment se déroule le cours ?

À notre arrivée, Michel Dupont avait déjà préparé l’attirail nécessaire fourni à chaque participant. Des pinceaux de différentes tailles, de petits carrés de papier recyclé pour appliquer les couleurs, des feuilles de papier humides pour l’impression, des encres de couleurs haut de gamme de la maison française Charbonnel.

Le cours de gravure ne se fait pas sur plaque de métal, mais sur plaque de plexiglas. Vêtus de vêtements de travail, on commence par égratigner la plaque préalablement sablée et nettoyée, en pratiquant de petites rayures sur la plaque avec la pointe d’une lame de précision (de type X-Acto).

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Sanders Pinault consulte une plaque gravée.

Puis, on la recouvre d’un fin mélange de poudre de marbre et de liant. On apprend à faire des formes, des lignes et des reliefs avec des spatules. Des creux, des saillies, des massifs qu’il faut savoir bien jauger, et atténuer avec des ciseaux à bois, car leur ampleur ou leur finesse déterminera l’allure de l’œuvre improvisée. On laisse sécher la plaque durant une heure, près d’un ventilateur, avant d’apprendre à travailler la coloration. D’abord avec du noir, du rouge et du jaune. La coloration, exécutée avec des gants, est une étape délicate, car la parcimonie du geste définit l’aspect de la première estampe.

On se concentre. Notre attention est totalement prise par ce petit carré coloré duquel surgira notre première création. Mais aussi par la douce musique Spiegel im Spiegel, d’Arvo Pärt, que Michel Dupont diffuse pour rendre ce moment de création totalement envoûtant.

Une fois que les plaques sont à notre goût, le maître les place sur sa presse à taille-douce, recouvertes de feuilles de papier Saint-Armand. Deux minutes de passage du rouleau et on découvre le résultat. Chacun commente, s’extasie, critique. Michel Dupont pointe les zones où la lumière est la plus belle. « En estampe, c’est la lumière qui compte », dit-il.

Les étapes de la création
  • Étape 1 : distribution du matériel

    PHOTO FOURNIE PAR MICHEL DUPONT

    Étape 1 : distribution du matériel

  • Étape 2 : installation sur la table de travail

    PHOTO FOURNIE PAR MICHEL DUPONT

    Étape 2 : installation sur la table de travail

  • Étape 3 : Christine Gosselin concentrée sur sa plaque…

    PHOTO FOURNIE PAR MICHEL DUPONT

    Étape 3 : Christine Gosselin concentrée sur sa plaque…

  • Étape 4 : Michel Dupont explique à Dolores Prevost et à son conjoint Philippe comment commencer la coloration des plaques.

    PHOTO FOURNIE PAR MICHEL DUPONT

    Étape 4 : Michel Dupont explique à Dolores Prevost et à son conjoint Philippe comment commencer la coloration des plaques.

  • Étape 5 : à nous de finir la coloration. Quel défi !

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    Étape 5 : à nous de finir la coloration. Quel défi !

  • Étape 6 : placement des plaques sur la presse

    PHOTO FOURNIE PAR MICHEL DUPONT

    Étape 6 : placement des plaques sur la presse

  • Étape 7 : mise sous presse

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    Étape 7 : mise sous presse

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Passionné, Michel Dupont adore donner ces ateliers d’estampe depuis 18 ans. Il dit en apprendre lors de chaque stage. « Parce que je vous donne une technique, des paramètres, je vous coache, mais la plupart du temps, les gens essaient des choses qu’en principe on ne fait pas, car on sait que ça ne marche pas. Mais de temps en temps, ça marche ! Quand ça fait 50 ans que tu pratiques une technique, tu finis par tomber dans des ornières. Alors, ces cours sont effectivement aussi intéressants pour moi. Après chaque cours, j’ai toujours un petit boost de création. »

Un des participants, Philippe Prevost, ingénieur électrique, s’est avéré excellent dans cet exercice artistique qui était une première pour lui. « Dans l’ingénierie aussi, il y a de la création, dit-il. Notamment quand on crée des circuits imprimés. Dans ce stage, le processus m’intéressait. La pression, le transfert. Je me suis laissé embarquer. On a parfois besoin de s’ouvrir l’esprit. Ça fait du bien pendant la pandémie. Ça n’a pas de prix. »

PHOTO FOURNIE PAR MICHEL DUPONT

Dolores Prevost, Philippe Prevost, Michel Dupont et Christine Gosselin

À la retraite, Christine Gosselin, ex-enseignante d’arts plastiques au primaire, se réjouit d’avoir enfin le temps de créer, dit-elle. « Je m’amuse comme une petite folle avec ce stage. Michel nous fait partager son expertise. On est dans le plaisir total. Ça me permet de me réappropier mon bagage, en action ! J’ai la piqûre. Je viens de m’équiper d’une presse, alors je vais continuer d’en faire, des estampes ! »

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Découvrir l’effet de votre travail est toujours magique…

Spécialisée dans les relations d’aide, notamment en art-thérapie, Dolores Prevost a aussi beaucoup apprécié son stage. « J’aime beaucoup cette matière. Ça me convient bien, car je découvre mon artiste intérieur. Les creux et les reliefs, c’est un mode d’expression qui me ressemble. On est fait de creux et de reliefs, d’émotions refoulées et d’autres qui reviennent en surface. »

Le réel plaisir de cet atelier découle énormément du type d’enseignement de Michel Dupont. Généreux dans la transmission des connaissances et les souvenirs qu’il nous permet d’emporter. Normalement, en deux jours, on réalise dans son atelier-galerie 4 plaques et 12 estampes sur papier. Mais il ne regarde pas à la dépense. Nous sommes repartis avec une vingtaine d’impressions et cinq plaques que l’on pourra toujours réutiliser, améliorer. Nous réclamons votre indulgence, voici deux de nos résultats !

Deux des estampes réalisées par La Presse !
  • L’estampe la plus présentable !

    PHOTO FOURNIE PAR MICHEL DUPONT

    L’estampe la plus présentable !

  • Le loup blanc, en bas de l’estampe, est un dessin découpé dans un papier noir que l’on insère dans la presse avec la plaque.

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    Le loup blanc, en bas de l’estampe, est un dessin découpé dans un papier noir que l’on insère dans la presse avec la plaque.

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Atelier Michel Dupont, 30, rue Principale, Frelighsburg, Québec

Consultez le site de Michel Dupont