(Hong Kong) Un buste de Napoléon réalisé par le sculpteur français Auguste Rodin est mis aux enchères samedi à Hong Kong après sa découverte impromptue en 2014 dans une mairie des États-Unis où il avait sombré dans l’oubli durant 80 ans.

L’œuvre, portant l’inscription « Enveloppé dans son rêve », est estimée entre 70 et 90 millions de dollars hongkongais (11 à 14 millions $) par la maison Sotheby’s chargée de la vente.

« Ce n’est pas un torse représenté de manière réaliste. Napoléon émerge en quelque sorte de la pierre, il émerge de ses rêves », décrit Rishika Assomull, directrice adjointe de l’art moderne pour l’Asie chez Sotheby’s.

La tête de l’empereur émerge d’un bloc de marbre de Carrare aux effets de drapés, portant à l’arrière la signature « A. Rodin ».

C’est sur ce nom que s’est arrêtée Mallory Mortillaro, jeune étudiante de 22 ans chargée en 2014 de dresser l’inventaire des objets du bâtiment accueillant le conseil municipal de Madison, ville de 16 000 âmes dans la banlieue de New York.

Le buste de l’empereur français était exposé, bien visible, depuis 80 ans dans la salle du conseil municipal.

La perspicace étudiante enquête alors et, d’archives en experts, parvient en septembre 2015 à l’authentification de l’œuvre de Rodin.

Le marbre est commandé à l’origine en 1904 par la femme de John Woodruff Simpson, un éminent avocat de New York. Le couple compte parmi les premiers mécènes à avoir exposé Rodin aux États-Unis.

On pense que Rodin a réalisé ce buste en s’inspirant d’un masque mortuaire de Napoléon qu’il avait acquis, et en travaillant avec un sosie de l’empereur, comme il l’a fait pour représenter Balzac.

Lassée d’attendre une commande qui ne vient pas, Mme Simpson ne donne pas suite et c’est un autre Américain, Thomas Fortune Ryan, riche ami de la collectionneuse, qui achète le buste lors d’un passage chez Rodin à Meudon en 1909.

À sa mort, une autre collectionneuse Geraldine Rockefeller Dodge se portera acquéreuse de la sculpture en 1933, avant de la remettre au Hartley Dodge Memorial qu’elle a fait construire en mémoire de son fils décédé et qui abrite aujourd’hui la salle du conseil municipal.

Le Napoléon de Rodin poursuivra peut-être son odyssée sur un autre continent.

« Nos acheteurs asiatiques seront très enthousiastes à l’idée d’avoir l’opportunité d’enchérir sur une œuvre aussi remarquable de cet artiste », veut croire Mme Assomull.