L'artiste de rue Mark Jenkins a exercé son art partout sur la planète. Il est à Montréal pour le festival Art souterrain en ayant bénéficié d'une résidence à Arsenal. Artiste de rue en galerie et au sous-sol!

Marc Jenkins sera bientôt à la rue. Comme l'acteur qui a besoin des planches pour sentir les racines de son art, l'artiste de rue sent qu'un mur, un trottoir ou un cul-de-sac lui feront le plus grand bien. Question de se ressourcer.

«Une fois cette expo terminée, j'irai faire quelque chose dans la rue. Ça fait partie de moi. Ça fait du bien de sortir des institutions.»

Le créateur vient de la rue et y retourne quand il le peut, en fait. Loin des galeries ou des musées qui le réclament de plus en plus: Bordeaux, Paris, São Paulo, Cologne, Londres, Rome... Oui, la rue peut mener loin.

Il est l'un des rares à y favoriser la sculpture plutôt que la peinture, même si l'univers pictural l'inspire beaucoup. Il avoue qu'il aime les expositions en galerie, mais la liberté de la rue reste sa véritable passion.

«C'est une question d'équilibre. Si on se met à vendre des mots écrits sur des sacs à main, ça devient difficile de retourner à la rue après. Il faut être conséquent avec soi-même.»

La reconnaissance de son travail lui importe-t-elle? 

«Je ne veux pas faire partie de la course de chevaux. Je ne veux pas être l'étalon de quelqu'un. Je préfère rester indépendant.»

Art souterrain

Dans le parcours d'Art souterrain, qui commence avec la Nuit blanche aujourd'hui, il a éparpillé quelques sculptures rappelant des oeuvres classiques. En y ajoutant sa touche personnelle, bien entendu, comme cette adaptation du Baiser de Klimt où il fera apparaître le chanteur du groupe rock Kiss.

«J'ai développé ma propre technique de sculpture avec des moulages grandeur nature que j'installe un peu partout, selon ce que m'inspire le lieu ou le sujet.»

Le thème d'Art souterrain cette année, «L'art doit-il séduire?», l'a inspiré. On verra donc des oeuvres connues telles La naissance de Vénus de Botticelli, Le fils de l'homme de Magritte et American Gothic de Grant Wood saluées par son regard ludique et irrévérencieux.

«Parfois, ce sont des détails d'un tableau qui m'inspirent, parfois c'est l'actualité. J'aime faire entrer en contradiction des éléments avec leur décor ou deux parties d'une composition classique entre elles.»

Arsenal

À Arsenal, il sera davantage en mode installatif en parodiant notamment la célèbre photo prise par Charles C. Ebbets en 1932 qui montre des travailleurs assis sur une poutre au-dessus de New York. Publicité ou non, Jenkins en a fait un clin d'oeil caustique aux tours jumelles du 11 septembre 2001. 

«J'aime mixer les choses les plus éloignées possible. On sait maintenant que cette photo iconique était une publicité pour les constructeurs. Je fais en quelque sorte exploser ce mensonge.»

Aucune explosion n'est cependant prévue à l'horaire... Quoique l'art de rue puisse devenir une entreprise à risque dans cette Amérique paranoïaque d'où il vient. Une sculpture laissée au coin d'une rue peut être vue comme un paquet suspect, mais les artistes sont rarement poursuivis.

«Il faut déjouer les règles intelligemment, raconte-t-il. En attachant une oeuvre à un support à bicyclette, par exemple. J'ai déjà eu une escouade anti-bombe sur le dos, mais je n'ai pas été accusé.»

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Art souterrain commence aujourd'hui et se déroule jusqu'au 20 mars. L'exposition Remix à Arsenal commence le 18 mars et se déroule jusqu'au 8 mai.

Les autres expositions

Cynthia Girard-Renard

Cynthia Girard-Renard possède un univers bien à elle et un imaginaire parmi les plus riches visuellement. Dans cette expo, la réappropriation de l'iconographie et de l'esprit de la Révolution française, pour parler de notre époque néolibérale frappée d'austérité, s'avère tout à fait ludique et irrévérencieuse. Picturalement, le dynamisme et les motifs utilisés nous rapprochent d'une intéressante fusion pop Rauschenberg-Johns. Appétissant!

L'exposition La revanche des sans-culottes est présentée à la galerie Hugues Charbonneau (372, rue Sainte-Catherine Ouest, espace 308) du 27 février au 2 avril.

Joe Becker

Ce récent diplômé de Concordia connaît un beau début de carrière. On reste ici dans l'irrévérence et le narratif. Explosion de couleurs et exploration de thèmes traitant de la décadence de l'humain et de son environnement. Avec un humour décapant de tous les instants. Ses compositions sont un véritable régal pour l'oeil.

L'exposition Black Knights of Cockaigne est présentée à la galerie Patrick Mikhail (4445, rue Saint-Antoine Ouest) jusqu'au 19 mars.

Jérôme, le saint

Belle idée que de retracer l'histoire de saint Jérôme, l'auteur de la traduction officielle de la Bible en latin, pour une exposition jouant avec les symboles et les thèmes assignés au personnage. La commissaire Andrée Matte met en relation des artefacts, des tableaux anciens et des oeuvres contemporaines d'artistes comme Matthieu Brouillard, Carl Trahan, Emmanuelle Léonard et Brandon Vickerd.

L'exposition Jérôme, le saint est présentée au Musée d'art contemporain des Laurentides (101, place du Curé-Labelle, Saint-Jérôme) jusqu'au 8 mai.

PHOTO GUY L'HEUREUX, FOURNIE PAR LA GALERIE HUGUES CHARBONNEAU

Cynthia Girard-Renard, Sous les pavés, la plage, 2015, acrylique sur toile libre de coton, 224 x 287 cm.