Star controversée de l'art contemporain, l'Américain Jeff Koons, célébré par une rétrospective à partir de mercredi à Paris, explique qu'un de ses buts est de rendre son art «accessible au public», en lui faisant «vivre une expérience» qui ne soit «pas intimidante».

«Je ne cherche pas nécessairement à faire un art populaire mais un art accessible», a déclaré à l'AFP l'artiste américain lors de la préparation de son exposition au Centre Pompidou.

Le pape du «Néo-Pop» est l'un des artistes vivants les plus chers au monde. Sa sculpture Balloon Dog, en version orange, a été adjugée au prix record de 58,4 millions $ en 2013.

Mais l'oeuvre de l'ancien époux de la «Cicciolina», l'ex-star italienne du porno à la carrière politique météorique, reste controversée, notamment pour ses pièces à connotation sexuelle. L'exposition Koons au château de Versailles en 2008 avait déclenché des débats passionnés.

Se sent-il parfois incompris? «Je pense que les critiques, les jugements, empêchent les gens d'expérimenter l'art», répond d'un ton posé l'artiste au regard bleu sombre, âgé de 59 ans.

«Je me souviens que lorsque je faisais des images publicitaires, je m'étais pris en photo à côté d'un gros cochon et avec un bébé cochon dans les bras». «Je voulais me désigner moi-même comme un cochon avant que quiconque puisse le faire».

«Quand je réalise une oeuvre d'art, je veux que ceux qui la voient, quel que soit leur milieu, ne se sentent jamais indignes d'elle», raconte Koons dont le père tenait un magasin de décoration intérieure.

L'artiste qui s'est intéressé très jeune à la peinture, a éprouvé un jour un choc. «À 17 ans, j'ai réalisé que je ne connaissais rien à l'art».

«C'était mon premier jour à l'Institut d'art du Maryland, en 1972. Nous avons pris le bus pour aller voir une grande collection d'oeuvres cubistes. Je ne connaissais ni Cézanne ni Matisse» et à peine Picasso. «Je n'avais pas été élevé dans cette connaissance» de l'histoire de l'art même «si j'avais des notions d'esthétique».

«Survivre à ce jour»

«J'ai réussi à survivre à ce jour» mais «je pense que beaucoup de gens ne survivent pas à ce type de situation. Ils se sentent perdus. Ils pensent qu'il est déjà trop tard pour pouvoir participer» à l'expérience de l'art.

Jeff Koons, lui, a «toujours voulu participer». «Lorsqu'on m'a jeté la balle, je l'ai saisie du mieux que je pouvais et c'est ce que je continue à faire», poursuit l'artiste vêtu d'un costume impeccable comme toujours.

Juste avant l'entretien, il a dégusté une barre aux noisettes protéinée, en expliquant longuement son «régime alimentaire très équilibré» qui lui permet de rester en forme et donner le bon exemple à ses six jeunes enfants, issus d'un second mariage.

Installé à New York depuis l'âge de 20 ans, Koons règne désormais sur un atelier qui emploie 130 personnes.

Que pense-t-il de la flambée de sa cote? «Je n'y pense pas vraiment», assure-t-il. «J'ai toujours voulu être un artiste, participer au dialogue autour de l'art. C'est cela la vraie valeur de l'art. C'est la récompense que j'en tire, une récompense intellectuelle, le sentiment que je suis peut-être capable de toucher la vie de certaines personnes».

«Les autres aspects sont vraiment secondaires», affirme Koons qui a été courtier à Wall Street à la fin des années 1970 pour financer sa production artistique.

Au fil des ans, Koons a constitué une importante collection d'art, qui comprend notamment des oeuvres de Gustave Courbet.

Koons apprécie la France, «le premier pays étranger» dans lequel il s'est rendu à l'âge de vingt ans pour y exposer un de ses aspirateurs à Lyon.

Il s'étonne encore d'avoir été invité, en compagnie d'autres artistes, à déjeuner avec Jacques Chirac en 2000, lors d'une exposition à Avignon. «Pour un artiste américain, c'est incroyable de déjeuner avec le président d'un pays comme la France». À ses yeux, «c'était un symbole de l'ouverture» d'esprit de ce pays, de son intérêt pour l'art.