Les Intrigues de Manon De Pauw proposées à la Galerie de l'UQAM n'ont rien des complots maléfiques que le terme peut signifier. Elles se présentent aux visiteurs comme des casse-tête lumineux en trois dimensions que l'on finit par reconstituer. Bienvenue au théâtre d'ombres et de lumières de cette artiste multidisciplinaire.

La commissaire Louise Déry, directrice de la Galerie de l'UQAM, a donné le titre Manon De Pauw: Intrigues à l'exposition qu'elle consacre à cette artiste de la performance considérée comme l'une des plus intéressantes de sa génération (fin de la trentaine). «Intrigues», dans le sens de complots ou machinations? Non. Plutôt dans le sens d'énigmes, ou de trames théâtrales, ou encore de stratagèmes pleins d'invention qui éveillent la curiosité, nous font nous poser des questions.

 

L'exposition rassemble des oeuvres qui représentent différentes étapes de la démarche de l'artiste depuis 2000. Les outils de travail de Manon De Pauw sont un indice pour comprendre «l'intrigue» qui se joue devant nous. Il s'agit de photogrammes, photographies, caméras vidéo et vidéogrammes, écrans, tissus transparents, papiers, formes géométriques en plastique transparent et une panoplie de jeux de lumière. Dans certaines vidéos, on voit l'artiste à l'oeuvre dans son atelier, dans d'autres, ses projections sur les murs servent de décor animé à des performances de danseurs et danseuses. Le corps en mouvement fait donc partie des éléments qui reviennent dans ses oeuvres.

Prenons la salle qui donne le coup d'envoi, L'Atelier ouvert. Il s'agit d'une réplique de l'atelier de Manon De Pauw. Sur sa table de travail transparente sont parsemées différentes formes faites d'élastiques, de cristaux, de bandes de papier, de petits pots, etc. Ces éléments sont filmés par une caméra suspendue au-dessus d'eux et projetés dans une dimension beaucoup plus grande sur un mur. Quand on se place devant la table, notre silhouette gêne l'image. L'artiste nous invite à déplacer les éléments et à jouer le jeu. Manon De Pauw donne des performances à cette table tous les jeudis que durera l'exposition.

Un autre exemple: dans la grande salle de la galerie sont rassemblées en cercle plusieurs tables. Chacune est dotée d'un écran vertical sur lequel sont projetées des scènes différentes. Dans l'un, on voit des mains découper un cercle; dans un autre, on voit une femme prise dans le cercle et qui semble se débattre pour en sortir. Le bruit de ses mouvements fait penser à celui d'une souris en cage. Sur un autre écran, en papier celui-là, on voit quelqu'un tenir un cadre semblable à l'écran. Dans un autre cas, c'est une cible que l'artiste dessine avec la peinture sortant d'un tube. Parfois, une image provenant d'un écran se trouve projetée sur un mur. Dans cette installation, l'atelier de l'artiste est encore une fois présent. L'atelier, les outils, le corps, les ombres et les lumières.

Il n'est pas toujours facile de bien représenter, par des expositions, les artistes de la performance. «Performance», selon Manon De Pauw, est un terme inventé dans les années 70 pour décrire les manifestations artistiques où l'acte de l'artiste a une valeur en elle-même... «Un acte jaillissant ici et maintenant», répète-t-elle dans une vidéo d'allure didactique réalisée en 2001. La Galerie de l'UQAM arrive, même quand l'artiste est absente, à nous faire entrer dans l'univers énigmatique lumineux de Manon De Pauw, qui faisait partie des exposants de la Triennale d'art contemporain québécois tenue l'été dernier au Musée d'art contemporain de Montréal.

Manon De Pauw: Intrigues, à la Galerie de l'UQAM, pavillon Judith-Jasmin, jusqu'au 28 mars. Ouvert du mardi au samedi, de midi à 18h. Entrée libre.