Six secondes et demie: c'est le temps que consacrent en moyenne les internautes à la lecture d'une page de résultats dans un moteur de recherche.

Six secondes et demie: c'est le temps que consacrent en moyenne les internautes à la lecture d'une page de résultats dans un moteur de recherche.

Après ça, c'est le clic! C'est pourquoi la bataille fait rage entre les sites qui veulent être aperçus les premiers, et avoir l'honneur d'être choisis.

Cette donnée a été découverte lors d'une étude réalisée par Enquiro, une agence de «marketing dans les moteurs de recherche» basée en Colombie-Britannique.

«Il semble que la manière dont on interagit avec l'information a changé», explique son président Gord Hotchkiss, rencontré au cinéma Excentris, où il donnait récemment une conférence organisée par le magazine InfoPresse.

«C'est incroyable à quel point le monde a changé en une décennie. Il y a dix ou quinze ans, on passait des heures à chercher une information qu'on peut aujourd'hui trouver en quelques secondes. Le résultat, c'est que les gens sont devenus extrêmement impatients dans leurs recherches. On fait plusieurs choses à la fois sur nos ordinateurs, et toutes sortes d'infos nous sollicitent à l'écran, d'où un déficit d'attention généralisé. Pour les professionnels du marketing, ça veut dire que les méthodes d'il y a dix ans ne marchent plus.»

Les méthodes d'aujourd'hui, c'est une batterie de calculs statistiques qui permettent de s'ajuster en temps réel à l'offre et à la demande, pour se placer au bon endroit et au bon moment dans les «liens commandités» des moteurs de recherche comme Google, Yahoo et MSN.

«Les moteurs de recherche sont ce qu'il y a de mieux pour déstocker un produit au dernier moment», explique Damien Lefebvre, vice-président chez Césart, une agence québécoise similaire à Enquiro, lui aussi en conférence le même jour.

«Disons qu'il me reste 500 billets pour Cuba à vendre, et je n'ai plus le temps d'acheter de la publicité dans les journaux ou à la télé. Les moteurs de recherche vont permettre de faire une promotion efficace de dernière minute. Entre vendre des sièges à 200$ et ne rien vendre du tout, c'est facile de choisir.»

Beaucoup d'annonceurs se disputent les meilleures places dans l'espace réservé aux liens commandités; surtout si elles se trouvent dans le «triangle d'or», c'est à dire la zone la plus couverte par le regard des internautes.

Selon des tests d'«oculométrie» réalisés par Césart avec une caméra à infra-rouge qui capture les mouvements oculaires d'internautes-cobayes, cette zone forme un triangle en haut à gauche de chaque page de résultats. Les liens commandités placés à droite d'une page, par exemple, sont beaucoup moins regardés et donc, moins rentables.

Là où le placement publicitaire devient un sport extrême, c'est que les liens commandités se vendent sous forme d'enchères.

Ainsi, vous pouvez «acheter» sur Google à 10 heures du matin le mot-clef «Cuba» au coût de 10 cents pour chaque clic d'un internaute; votre lien commandité apparaîtra en haut des résultats pour ce mot-clef. Mais si un concurrent arrive à 11h00 et propose de payer Google 20 cents pour le même mot-clef, il passera devant vous.

À vous d'empoigner votre calculatrice pour savoir jusqu'où vous êtes prêt à payer chaque clic sur votre site. Selon le nombre de clics qu'il vous faut pour générer une vente (soit le «taux de conversion»), vous pourrez évaluer le «coût d'acquisition» de chaque vente, et savoir jusqu'à combien vous pouvez surenchérir.

Il y a dix ans, les agences de référencement comme Enquiro et Césart ne faisaient qu'enregistrer des mots-clefs sur Yahoo, puis attendaient tranquillement les visiteurs. Aujourd'hui, elles recrutent des statisticiens, qui vont non seulement calculer le meilleur prix d'achat mais aussi le meilleur mot-clef à acheter, selon une foule de variables.

«Tout doit être testé et scientifiquement validé. On teste, on mesure, on re-teste. Il faut être parano sans cesse», résume M. Lefebvre.

Prochaine étape: le «géociblage». Sur MSN, Yahoo ou Google, l'achat de liens commandités se fera bientôt en fonction de la localisation géographique, de l'âge et du sexe des internautes visés par la promotion, comme c'est déjà le cas aux États-Unis.

Pour y parvenir, ces trois entreprises utiliseraient les données personnelles récoltées avec les outils gratuits qu'elles offrent aux internautes: courriel, messagerie instantanée, clavardage, applications bureautiques en ligne, etc. Si vous vous demandiez comment ces logiciels gratuits peuvent être rentables pour leurs fabricants, voilà votre réponse.