Entre deux voitures électriques, un robot martien et un test d'ADN pour la maison, le service de vélos publics montréalais Bixi se classe au 19e rang des meilleures inventions de l'année selon le Time Magazine. Une reconnaissance inattendue pour une technologie de paiement fabriquée au Québec et qui jumelle énergie solaire et réseaux sans fil. Prochain objectif: conquérir d'autres villes nord-américaines et européennes.

Dans son palmarès, la publication américaine vante la robustesse des vélos, de même que «toute la technologie qu'on puisse imaginer» permettant à Stationnement de Montréal de suivre leurs déplacements et de facturer les usagers en conséquence. Les technologies de l'heure y sont effectivement bien en évidence: les bornes de paiement sont alimentées par des capteurs solaires et communiquent entre elles, ainsi qu'avec des ordinateurs de poche, grâce à un réseau sans fil relié à l'internet. Chaque vélo est par ailleurs identifiable à distance à l'aide d'une étiquette à radiofréquences (RFID).

 

«Il n'existe aucun système équivalent en Amérique du Nord», affirme Isabelle Bettez, présidente de 8D Technologies, la société montréalaise qui a conçu les bornes de paiement utilisées pour le service Bixi. «C'est un système innovateur et nous sommes très heureux, parce que la Ville de Montréal a investi beaucoup dans ce projet.»

Et pour cause. La vitrine qu'incarne Bixi pour la technologie de 8D, et sa mention dans le Time, permet à Isabelle Bettez d'attirer les regards et, espère-t-elle, les nouveaux contrats. Au moment de parler à La Presse Affaires, l'entrepreneure montréalaise revenait tout juste d'un séjour à Minneapolis. La métropole du Minnesota songe à implanter un système similaire au Bixi sur son territoire. Boston, New York et San Francisco ont manifesté le même désir, tout comme certaines villes d'Europe, selon Mme Bettez.

Par rapport à des services du même genre comme le Vélib', à Paris, Bixi se distingue par son concept modulaire: comme tout est sans fil, on peut ajouter, déplacer ou retirer des bornes et des supports à vélo de façon presque illimitée. Stationnement de Montréal compte en utiliser trois cents dès la mise en service de ses vélos le printemps prochain, mais pourrait en ajouter lors de grands événements, ou durant la période des festivals, par exemple. Ce serait plus compliqué à Paris: chaque borne se branche à un réseau câblé enfoui sous le sol.

Transport en commun à la carte

Les bornes conçues par 8D Technologies et sa trentaine d'employés semblent plutôt polyvalentes: Montréal en possède déjà plus de 1500, en fait. Depuis quatre ans, elles ont remplacé presque tous les parcomètres du centre-ville. Il sera d'ailleurs possible de payer pour son stationnement ainsi que pour l'emprunt d'un Bixi à partir de la même borne.

Mieux encore, estime Isabelle Bettez: la ville pourrait créer des zones incitatives, en périphérie du centre-ville, où le stationnement et les vélos coûteraient moins cher. «C'est une solution hybride qui intéresse beaucoup les villes américaines, assure-t-elle. Les gens iraient en ville à vélo. Ça aiderait à régler des enjeux liés à la pollution, la congestion automobile et à l'économie.»

Elle va plus loin: pourquoi ne pas unifier les modes de paiement de tous les services de transport en commun et de stationnement de la ville? Une seule carte de paiement qui donnerait accès au métro, aux autobus et aux vélos convaincrait peut-être davantage de voyageurs de laisser tomber leur voiture au profit d'un moyen de transport moins encombrant et moins polluant.

Ce serait réalisable, conclut Mme Bettez: «On a développé une plate-forme logicielle et matérielle qui est universelle: on a créé une sorte de point de vente qu'on a simplement décidé d'appliquer au stationnement, mais elle pourrait être adaptée pour bien d'autres choses.»