Pour les sociétés de services informatiques, dont les revenus sont très dépendants du secteur financier, la crise fait resurgir le spectre de la débâcle du début des années 2000, même si un tel scénario semble pour l'instant peu probable, selon les analystes.

Dans ce contexte tourmenté, le numéro un français Capgemini s'est voulu rassurant cette semaine: «que ce soit en termes de chiffre d'affaires ou de prises de commandes, le mois de septembre n'a connu aucune rupture de rythme en dépit d'une actualité financière chargée», a déclaré le groupe dans un communiqué, avant de confirmer ses objectifs pour 2008.

En revanche, 2009 paraît plus incertain, les clients étant «en cours d'élaboration de leur budget», a ajouté Capgemini, tout en reconnaissant que le marché progressera probablement moins vite l'an prochain.

Difficile en effet d'exclure un ralentissement du marché, alors que les services financiers «absorbent entre 20 et 25% de la dépense informatique mondiale», souligne Brice François Thébaud, expert chez Aurel.

C'est le secteur, poursuit-il, «qui consacre la part la plus importante de ses revenus à l'informatique: 7% en moyenne, contre 4% sur toute l'industrie confondue».

Entre la disparition de certaines banques et la réduction des dépenses informatiques au sein des établissements fragilisés, la crise aura donc forcément un «impact significatif», selon lui.

Le numéro un mondial des logiciels professionnels SAP a notamment reconnu avoir subi un ralentissement «très brutal et inattendu» de son activité en septembre.

«En cette période agitée, les sociétés vont être plus prudentes dans leurs investissements», note Alexander Peters, analyste du cabinet d'études Forrester.

Cependant, «la perception de l'informatique s'est considérablement améliorée par rapport à la dernière crise du début des années 2000: désormais la technologie est vue comme un facteur de succès» et de performance, relève-t-il.

À l'inverse, lors de la bulle internet, «la demande avait été maintenue artificiellement par l'adoption de l'euro et le passage à l'an 2000, donc une fois ces problématiques passées, les clients n'avaient plus investi», explique M. Thébaud.

Les sociétés de services et d'ingénierie informatique (SSII) sont aussi mieux protégées grâce à leur mue vers un modèle beaucoup plus industrialisé qu'à l'époque.

Paradoxalement, la crise pourrait même être moteur de croissance. «A court et moyen terme, cela va être plus compliqué pour nous, mais sur le long terme, plus de régulation et de contrôle profiteront aux sociétés informatiques», espère Yves Stucki, responsable de la stratégie de Linedata Services, éditeur de logiciels pour le secteur financier.

«Le principal atout d'une banque, c'est principalement son système d'information: sans technologie, on ne peut pas affronter la crise», renchérit Franck Nassah, du cabinet de marketing IDC.

Sans oublier l'accélération des fusions qui pourrait soutenir les services informatiques, souvent sollicitées dans le cadre de telles opérations.

Autant de raisons qui rendent «très faible la probabilité d'une réplique du scénario de 2001-2003 avec des baisses de l'ordre de 10% à 15% du chiffre d'affaires des acteurs», estime l'analyste d'Aurel.

Néanmoins, l'inconnue qui plane sur 2009 pèse sur le cours de Bourse des sociétés du secteur, qui avaient bien résisté jusqu'ici.

Victime de ces craintes, Capgemini a ainsi vu son action chuter de plus de 41% depuis le début de l'année, soit encore plus que le CAC 40.