Les progrès de l'informatique permettent de débusquer des fraudes boursières et délits d'initiés qui auraient pu auparavant passer inaperçus, comme vient de l'apprendre à ses dépens Erik Franklin, un courtier de Wall Street.

Les progrès de l'informatique permettent de débusquer des fraudes boursières et délits d'initiés qui auraient pu auparavant passer inaperçus, comme vient de l'apprendre à ses dépens Erik Franklin, un courtier de Wall Street.

Il semblait doué d'un talent particulier pour choisir les meilleures actions et réaliser de confortables bénéfices. Mais le 1er mars, la justice américaine l'a inculpé de délit d'initié, l'accusant d'avoir profité de «tuyaux» passés par un de ses amis travaillant pour la société financière UBS Securities.

Un responsable de cette firme, Mitchel Guttenberg, sept autres professionnels de la finance et deux avocats ont aussi été inculpés, accusés d'avoir empoché plus de 15 millions de dollars en organisant l'une des fraudes les plus élaborées vues à Wall Street depuis celle d'Ivan Boesky.

Celui-ci avait été jeté en prison dans les années 1980 pour délit d'initié, l'affaire inspirant le célèbre film «Wall Street».

Les autorités boursières américaines affirment toutefois que les progrès de l'informatique ces dix dernières années leur permettent de détecter plus facilement les opérations suspectes.

«Il y a des programmes informatiques sophistiqués qui nous permettent d'enquêter, de comparer et d'analyser les chiffres du marché», souligne Robert Kaplan, un directeur adjoint de la Commission des opérations en Bourse américaine (SEC) qui a supervisé l'enquête sur Franklin et Guttenberg.

«Ces deux dernières années ont vu une augmentation significative du nombre et de la complexité des affaires de délit d'initiés», a indiqué lors d'une audition devant le Congrès en septembre, Robert Marchman, un responsable de la surveillance à la Bourse de New York (Nyse).

Mais le Nyse s'est équipé «d'ordinateurs et de logiciels sophistiqués» pour surveiller les marchés et contrer cette augmentation, a-t-il ajouté, citant un programme informatique surveillant les sites de chat boursiers sur l'Internet pour y détecter les conversations suspectes.

Les moyens utilisés pour débusquer la fraude mise au point par Franklin et Guttenberg n'ont toutefois pas été révélés.

Selon les juges qui ont instruit l'affaire, le réseau disposait de téléphones portables qui n'étaient utilisés qu'une seule fois. Il utilisait aussi des codes secrets pour désigner les actions qu'il fallait acheter ou vendre après que Guttenberg ait obtenu chez UBS Securities des informations confidentielles non encore communiquées au grand public.

La vague de fusions et d'acquisitions qui touche la Bourse américaine depuis plusieurs mois favorise les malversations. La SEC a ainsi annoncé début mars l'ouverture d'une enquête sur des transactions suspectes dans le cadre du rachat en février du groupe d'énergie TXU par un consortium de fonds privés pour 45 milliards de dollars.

Selon la SEC, des «acheteurs non identifiés» ont empoché 5,4 millions de dollars en plaçant des ordres sur les titres TXU avant que la transaction ne soit annoncée.

Des milliers de fonds privés opèrent aux États-Unis sans être soumis aux mêmes règles de transparence que les banques d'affaires et maisons de courtage de Wall Street qui ont pignon sur rue.

Robert Kaplan reste discret sur l'ampleur de la fraude aux États-Unis mais l'autorité financière britannique vient de publier un rapport selon lequel près d'un quart des fusions et acquisitions intervenues sur le marché de Londres en 2005 auraient été précédées d'opérations illégales de délit d'initié.

Les responsables américains soulignent que le réseau mis en place par Franklin et Guttenberg présentait la caractéristique plutôt rare de mettre en cause plusieurs employés des firmes réputées de Wall Street.

«Ils étaient des professionnels de la finance et des gens qui savaient ce qu'ils risquaient. Ces gens étaient la crème de la crème de Wall Street», a déploré Robert Kaplan.