Un défi envisageable, selon le responsable du projet entre Québec et la Ville Reine

Voyager en train entre Montréal et Toronto en trois heures, voire moins ? C’est envisageable, selon le responsable du mégaprojet entre Québec et la Ville Reine, Martin Imbleau, qui fait miroiter des temps de trajet comparables à certains des services ferroviaires à grande vitesse que l’on voit en Europe.

Alors que le scénario de référence du projet appelé « train à grande fréquence » table sur une durée qui dépasse les quatre heures, celui qui dirige la filiale de VIA Rail responsable de ce nouveau corridor ferroviaire dédié aux passagers entre Québec et Toronto mettra des hypothèses plus ambitieuses, mardi, à l’occasion de son passage devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM).

Mais avant de fixer une cible, il faut « travailler intelligemment » pour avoir un projet solide, plaidera M. Imbleau dans son discours, que La Presse a pu consulter. Celui qui est en poste depuis septembre dernier demandera donc que l’on soit patient avant qu’un objectif soit fixé.

« Aujourd’hui, on relie Montréal à Toronto en 5 h 15 ou 5 h 30, parfois plus, pour faire 540 kilomètres, lit-on dans l’allocution de M. Imbleau. Ce sera quoi demain ? Trois heures trente, 3 h 15 ? 3 heures ? Moins ? Maintenant, donnez-nous le temps de travailler intelligemment pour vous proposer les contours d’un projet solide ! »

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Martin Imbleau dirige la filiale de VIA Rail responsable du mégaprojet de service ferroviaire entre Québec et Toronto.

Il s’agira de la première allocution de M. Imbleau devant la CCMM à titre de président-directeur général de VIA TGF. Il doit aussi répondre aux questions du président et chef de la direction de la Chambre, Michel Leblanc, où d’autres aspects du projet pourraient être abordés.

Un temps de trajet d’environ trois heures entre Montréal et Toronto correspond à une vitesse commerciale de 180 km/h, un indicateur qui tient notamment compte des arrêts ainsi que des phases d’accélération et de ralentissement. La vitesse de pointe des trains est largement supérieure pendant qu’ils circulent sur les segments ferroviaires à haute vitesse. Actuellement, la vitesse moyenne des trains de VIA Rail oscille aux alentours de 100 km/h.

À deux volets

L’appel d’offres de ce projet multimilliardaire a été lancé en septembre dernier. En plus du scénario de référence, dans lequel les trains circuleraient à des vitesses de pointe d’environ 200 km/h sur des voies ferroviaires réservées aux passagers, les trois consortiums retenus doivent proposer une version plus ambitieuse avec une réduction des temps de trajet. Cette option semble prendre de plus en plus d’importance.

Expert en planification des transports à l’Université de Montréal, Pierre Barrieau s’est exprimé à maintes reprises sur le projet de train entre Québec et Toronto. C’est avec des temps de trajet de trois heures ou moins que l’on peut concurrencer efficacement l’avion, dit-il.

« Ça changerait la donne si l’on peut arriver à trois heures, affirme M. Barrieau. On peut alors faire un aller-retour pour une journée de travail sans s’anéantir le lendemain. Ce sont des temps concurrentiels avec l’avion et c’est ce qui est fondamental ici. »

En entrevue avec La Presse en octobre dernier, M. Imbleau avait avancé quelques « comparables » existants à ce qui pourrait voir le jour au Canada. Ce dernier avait notamment évoqué le trajet qui relie Paris (France), Bruxelles (Belgique) et Amsterdam (Pays-Bas). Sur le Vieux Continent, les trains relient Paris et Bruxelles en près de 90 minutes en atteignant des vitesses de quelque 300 km/h. Par la suite, ils mettent environ 2 h 15 pour effectuer les 200 kilomètres restants vers Amsterdam alors que plusieurs arrêts sont effectués.

En moyenne, les trains roulent à 156 km/h sur l’ensemble du réseau.

M. Imbleau avait prévenu les lecteurs que cet exemple ne signifiait pas que les trains atteindraient cette vitesse au Canada. L’exemple témoignait, disait-il, de la cohabitation entre les tronçons à haute vitesse et les arrêts plus fréquents sur d’autres segments.

Encore des questions

Il continuera d’y avoir des questions sans réponse au terme du passage du patron de VIA TGF devant la CCMM. Ce dernier ne s’avancera pas sur un tracé précis, une estimation des coûts ou une « date de mise en service ».

« J’aurais 100 % de chances de me tromper si je le faisais », écrit M. Imbleau.

Parce que le Canada est le seul pays du G7 à ne pas compter un train à grande vitesse (TGV), des voix se sont élevées, notamment au Québec, pour demander au gouvernement Trudeau de considérer cette option. Le corridor entre Montréal et Toronto figure parmi les plus prometteurs en Amérique du Nord pour un TGV. Jugé trop onéreux, ce scénario, qui pourrait coûter jusqu’à 80 milliards, avait été écarté par Ottawa. Il faudrait, par exemple, construire de nombreux viaducs et tunnels pour éviter les passages à niveau, soulignaient les autorités fédérales.

Des calculs effectués par La Presse estiment qu’un demi-TGV, avec des segments à haute vitesse sur 60 % du parcours, coûterait 62 milliards. Dans le cas d’un train à grande fréquence, la facture oscillerait entre 28 et 35 milliards.

En savoir plus
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    Arrêts prévus du TGF : Québec, Trois-Rivières, Laval, Montréal, Ottawa, Peterborough et Toronto
    via tgf
    1000 kilomètres
    Longueur du corridor ferroviaire réservé aux trains de passagers du projet
    via tgf