L’engagement pris par Air Canada en 2016 au moment d’acheter des avions maintenant appelés A220 se concrétise finalement : son fournisseur Avianor construira – avec l’aide de Québec – un centre voué à l’entretien lourd des appareils. Reste à trouver d’autres clients, ce qui ne devrait pas tarder, promet l’entreprise québécoise.

Cet agrandissement des installations d’Avianor situées à Mirabel, dans les Laurentides, coûtera plus de 70 millions. Le gouvernement Legault consent un prêt-subvention de 9 millions. Les détails seront dévoilés ce mardi au Salon international de l’aéronautique du Bourget par l’entreprise et le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon.

« On ne se limitera pas à l’Amérique du Nord », explique Denis Deschamps, cofondateur et président et chef de la direction de DRAKKAR, propriétaire d’Avianor, en entrevue avec La Presse depuis l’Hexagone. « Nous avons déjà des demandes d’outre-mer. C’est dans cette optique que l’on ambitionne de devenir un centre d’excellence de calibre mondial. »

Plus précisément, Avianor construira un hangar d’environ 105 000 pieds carrés (9755 mètres carrés) adjacent à ses installations de Mirabel. Cela permettra d’ajouter quatre chaînes de maintenance capables d’accueillir des avions monocouloirs comme l’A220, pour un total de sept. En 2020, le spécialiste de l’entretien et de la reconfiguration intérieure d’aéronefs étudiait un complexe de 250 000 pieds carrés (23 225 mètres carrés). Il a finalement opté pour un plus petit hangar destiné à la « spécialisation des monocouloirs ».

Avianor effectue l’entretien des cellules des avions A220, soit les ailes, le fuselage, les trains d’atterrissage et l’empennage. Les activités devraient officiellement démarrer à l’automne 2024, et plus de 110 personnes viendront se greffer aux 225 salariés d’Avianor. La priorité sera donnée aux avions autrefois construits par Bombardier (C Series), mais M. Deschamps ne ferme pas la porte aux autres programmes d’avions monocouloirs, comme la famille 737 de Boeing et la gamme A320 d’Airbus.

Qui sont les autres ?

Pour assurer la pérennité de ce « centre d’excellence », Avianor devra attirer d’autres transporteurs. La plupart des principaux exploitants de l’A220, comme Swiss, Air Baltic et Korean Air Lines, effectuent l’entretien des appareils eux-mêmes ou avec d’autres fournisseurs.

En Amérique du Nord, des occasions pourraient se présenter avec les compagnies américaines JetBlue et Breeze Airways. Lundi, les deux transporteurs aériens n’avaient pas répondu aux questions envoyées par La Presse visant à savoir s’ils avaient conclu des ententes pour la maintenance lourde de leurs A220. Delta Air Lines est l’autre exploitant nord-américain de l’avion.

PHOTO FOURNIE PAR AVIANOR

De gauche à droite : Denis Deschamps, cofondateur et président et chef de la direction de DRAKKAR, Benoit Hudon, président et chef de la direction de DRAKKAR Aéronautique, et Hugo Brouillard, vice-président et chef de l’exploitation d’Avianor

« On est en relation avec chacune des sociétés américaines, a dit M. Deschamps, sans toutefois les nommer. Notre équipe a fait ses devoirs. Il faut être capable de rentabiliser un investissement de cette nature. »

Il laisse même entendre que des clients européens pourraient s’ajouter.

Une longue saga

La construction du centre d’Avianor constitue le plus récent chapitre d’une saga qui remonte à plus d’une décennie en ce qui a trait à la maintenance des avions d’Air Canada.

En passant une commande de 45 appareils qui allait s’avérer cruciale à la survie de ce qui s’appelait la C Series en 2016, Air Canada avait réussi à mettre derrière elle une longue dispute judiciaire. Au moment d’annoncer le contrat, le plus important transporteur aérien au pays avait pris l’engagement de contribuer à la création d’un centre d’excellence pour l’entretien de l’appareil rebaptisé A220 Airbus.

Québec avait alors accepté de mettre fin à ses recours judiciaires contre Air Canada, qui avait fermé en 2012 ses centres d’entretien d’appareils à Montréal, à Winnipeg et à Mississauga, supprimant ainsi 2600 emplois chez Aveos, dont 1800 au Québec. L’État québécois faisait valoir que la compagnie aérienne avait contrevenu à la loi fédérale. Pour sa part, Ottawa avait modifié la loi ayant mené à la privatisation d’Air Canada pour en retirer les obligations liées à la maintenance d’aéronefs.

Il a néanmoins fallu beaucoup de temps avant de concrétiser le projet d’un centre d’entretien pour les A220. Selon M. Deschamps, la pandémie a coûté « trois ans ». L’entente entre Avianor et Air Canada est d’une durée de 10 ans et est renouvelable.

En savoir plus
  • 1995
    Avianor a été fondée il y a plus d’un quart de siècle.
    Source : avianor
    265
    Nombre d’A220 livrés depuis la mise en service de l’avion
    Source : Airbus Canada